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NEUTRALITE DU SERVICE PUBLIC

Dissertation : NEUTRALITE DU SERVICE PUBLIC. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  17 Octobre 2016  •  Dissertation  •  3 664 Mots (15 Pages)  •  2 784 Vues

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                  Pour le Professeur Chapus, « il est naturel que l’atteinte portée aux libertés ne soit légale que si elle est nécessaire (et par la suite ‘adaptée et proportionnée’ aux risques de troubles de l’ordre public) ». Il indique plus loin que « la nécessité, c’est la justification, ou même, pourrait-on dire, l’excuse de la mesure de police ». La problématique évoquée est de trouver le juste équilibre entre la liberté et son atteinte soit la neutralité, le tout étant qu’elle soit justifiée et légitime.

La première affaire contentieuse de ce type date d’une décision en date du 22 novembre 2011, par laquelle le Tribunal administratif de Montreuil doit répondre à la requête d’une mère d’élève voilée qui avait demandé l’annulation d’une disposition du règlement intérieur d’une l’école élémentaire en Seine Saint-Denis imposant «aux parents volontaires pour accompagner les sorties scolaires de respecter dans leurs tenue et propos la neutralité de l’école laïque». Le 9 juin 2015, une décision du tribunal administratif de Nice a relancé le débat sur la question de savoir si une mère portant un foulard islamique était autorisée à accompagner des enfants en sortie scolaire. Dans cette affaire, une mère d’élève, désireuse d’accompagner une sortie scolaire, avait demandé à l’administration de l’école élémentaire la possibilité de conserver son voile islamique. Il lui avait été répondu : « Nous n’avons malheureusement plus le droit d’être accompagnés par les mamans voilées. Vous ne pourrez nous accompagner que si vous l’enlevez ». Cette maman a alors demandé au tribunal administratif l’annulation de cette décision de refus. Elle soutenait que cette décision était insuffisamment motivée, qu’elle méconnaissait le principe d’égalité et qu’aucun texte n’interdisait aux parents accompagnant une sortie scolaire d’exprimer de façon passive leurs croyances religieuses.

Le Tribunal administratif de Montreuil rejette la demande de la requérante alors qu’à l’inverse le tribunal niçois fait droit à la demande de cet affaire dont les faits sont semblables à la première.

La question ici posée aux juges était de déterminer à quel statut répondait les parents d’élèves accompagnateurs de sorties scolaires c’est à dire s’ils étaient soumis aux exigences de laïcité imposée aux différents personnels des écoles de l’enseignement public.

Les juges administratifs de première instance ont tout d’abord considéré que le règlement intérieur litigieux n’était pas dépourvu de base légale. En effet, il résulte des textes constitutionnels et législatifs (art. 10 DDH et art. 2 Const. 58) que le principe de liberté de conscience, celui de laïcité de l’État (dont le principe de laïcité de l’enseignement public est un des éléments) et celui de neutralité des services publics s’appliquent aux parents d’élèves accompagnateurs. Le principe de neutralité de l’école laïque ne permet pas à ces parents de manifester, lors de sorties scolaires, leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques que ce soit dans leur tenue vestimentaire ou leurs propos.Par ailleurs, la disposition du règlement intérieur contestée ne discrimine aucune confession. Elle ne traite pas différemment les parents d’élèves portant un voile et les autres. Les juges rappellent également que l’accompagnement des sorties scolaires n’est pas un droit pour les parents. Enfin, la requérante soutenait que la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité affirme que « le refus de principe opposé aux mères d'élèves portant le foulard » de participer à des sorties scolaires est « contraire aux dispositions interdisant les discriminations fondées sur la religion ». Le tribunal administratif considère que cette recommandation ne porte pas sur la disposition du règlement intérieur litigieux. Il ne peut s’appliquer au cas d’espèce.

En 2015 le tribunal administratif niçois a censuré la décision de refus en considérant que celle-ci ne s’appuyait sur aucune disposition légale ou réglementaire précise, ne se prévalait pas non plus de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service : « Les parents d’élèves autorisés à accompagner une sortie scolaire à laquelle participe leur enfant doivent être regardés, comme les élèves, comme des usagers du service public de l’éducation. Par suite, les restrictions à la liberté de manifester leurs opinions religieuses ne peuvent résulter que de textes particuliers ou de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service. ».

Les Tribunaux administratifs de Marseille et Nice se sont employés à définir la situation juridique des parents accompagnateurs de sorties scolaires dans le souci de concilier deux principes opposés (I) entraînant des restrictions à la liberté de manifester son appartenance religieuse de manière casuelle (II).

I/ Le rappel des juges de la difficile conciliation entre neutralité et liberté de conscience

La confrontation entre besoin de neutralité de l’enseignement  face aux manifestations et pressions religieuses (A) entraîne donc une nécessaire clarification du comportement des parents accompagnateurs de sortie scolaire (B).

A- La neutralité de l’enseignement public face à la liberté religieuse individuelle

  1. Le principe de liberté religieuse

L’article 10 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen selon lequel « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi », repris par l'article 1er de la Constitution "La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinctions d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances" sacralise la liberté de conscience et religieuse dans notre société française.

En l’espèce dans cette affaire jugée en 2011, la requérante s’appuie sur ces textes constitutionnels pour soutenir la légitimité de sa demande devant les juges. Cette dernière argue également que l’article du règlement scolaire qu’on lui a opposé pour refuser son accompagnement des élèves présente une atteinte excessive à la liberté de penser et de religion consacrée par la Convention européenne des droits de l’homme, ratifiée par la France, dans son article 9.

  1. Le principe de stricte neutralité obligatoire dans l’enseignement public

Le principe de neutralité s'impose au service public Elle s’étend aux agents eux-mêmes. Les agents ne doivent exprimer en aucune  façon leur conviction dans le service, par exemple un avis contentieux a rappelé que le port par les agents publics du moindre signe révélant une appartenance religieuse est interdit qu'ils soient enseignants ou non (CE, Avis, 2000, Mlle Marteaux : "le principe de laïcité fait obstacle à ce qu'ils disposent, dans le cadre du cadre du service public, du droit de manifester leurs croyances religieuses"). En 2011 le tribunal de Montreuil a rappelé que l’intérêt supérieur de l’enfant “doit être une considération primordiale”, comme l’édicte la         Convention internationale des droits de l’enfant dans son article 3-1, d’ou sa décision qui prend la précaution de préserver l’enfant de toute potentielle influence et manifestation religieuse, quitte à faire émerger une notion de “participant au service public” qui serait soumis aux mêmes devoirs que le personnel de l’Education nationale.

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