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Les domaines de la Loi et du règlement sous la 5e République 

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Par   •  28 Février 2017  •  Dissertation  •  4 388 Mots (18 Pages)  •  1 598 Vues

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Les domaines de la Loi et du règlement sous la 5e République :

Le 23 aout 1958, le Juge constitutionnel déclare que : « la loi n’exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution ».

La loi, comme le dispose l’article 6 de la DDHC contenu dans le préambule constitutionnel, est en effet : « l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux (…). » Ainsi, la loi a classiquement deux critères qui sont organique et procédural : sa source est populaire, qu’elle soit directe ou indirecte, et c’est cette dernière qui concoure à sa formation. Le règlement, quant à lui, est règle de droit écrite procédant du Premier Ministre dans un domaine relativement autonome qui a pour limite de ne pas être celui de la loi. Déjà, en 1789, la loi a un objectif formel, une vocation qui résulte de son essence même, tandis que le règlement qui lui est strictement soumis ne fait que la mettre en oeuvre : elle est strictement égalitaire puisqu’aveuglément (impersonnellement) universelle. Au sens littéral, la loi est donc Républicaine, mais a priori, rien ne garantit qu’elle soit démocratique. Elle est simplement le préalable de tout régime, mais il faut encore qu’elle ait un contenu pour qu’elle puisse le réaliser.

La conception classique de la loi héritée de la Révolution n’était donc encore qu’une transition théorique vers la démocratie en ce qu’elle est républicaine car égalitaire a priori, elle se situe en amont d’une longue progression vers sa fin historique. Elle manque encore de sens propre (en cela qu’elle n’est pas définie matériellement), c’est  donc en amont de la question politique, de la partisannerie, que se trouve le problème que tentent de résoudre les Constituants de 1958 lorsqu’ils vont penser la Constitution. C’est d’ailleurs ce qui expliquera que la Constitution sera, in fine, fragilisée par le fait politique (majoritaire) a posteriori.

Plusieurs faits marquants ont étayé la volonté de réformer fondamentalement nos institutions, en assignant à la loi et au règlement un domaine afin de limiter la compétence du législateur et de favoriser une collaboration des pouvoirs propice à « rationnaliser » la République et à ancrer durablement le régime dans la démocratie, en renforçant l’exécutif.

En effet, avant 1958, la distinction entre la loi et le règlement, qui ont pourtant même vocation générale et impersonnelle, existait de facto mais sans autonomie propre ; de sorte que parfois, contraint par les évènements, le Parlement, tout en violant la Constitution (dans son Article 13 en 1946) déléguait déjà ses pouvoirs à l’exécutif. Mais le pouvoir de l’un découlait toujours de celui de l’autre et le Parlement, jusqu’à la 5e République, détenait en matière de pouvoir normatif un pouvoir non partagé qui l’érigeait en titulaire de la souveraineté Nationale. Le culte légicentriste décrivait alors cette réalité d’un Législateur insoumis, incontrôlable. De plein droit, en toute impunité, la volonté du Peuple représenté est alors illimitée de sorte que, tel que Joseph de Lolme l’exprimait, le Parlement eut pu tout faire « sauf changer un homme en femme ». Cette omnipotence du Parlement eut deux versants qui expliquent la volonté constituante de 1958 : l’un technique et l’autre sociologique. Dans un premier temps, le Parlement eut pu de par sa composition même (aussi diverse et fluctuante que l’opinion qu’il représente entre ses murs) nuire à l’effectivité de sa propre volonté en renversant successivement les gouvernements qui se proposaient de l’appliquer sans qu’un réel contrepouvoir ne puisse pousser au consensus en l’absence de majorité. C’est le problème de l’instabilité gouvernementale sous la 4 e République. Et même, puisque la démocratie effective n’est pas celle du plus grand nombre mais celle de la coexistence de la totalité des citoyens, le problème s’est aussi posé de l’absence de contenu donné à la loi afin de lui donner son essence démocratique, soit de la rendre viable aussi bien pour la majorité que pour les minorités. Après la guerre, après le génocide evoqué sans réaction entre les murs mêmes du Parlement allemand, la France songe à la matérialité de la loi. Une République qui n’est pas tempérée par l’Etat de droit, une loi qui n’est pas définie, intelligible, voue la démocratie à ne rien être de plus qu’un accord dont la pérennité est aussi compromise que la nature des choses. L’Homme doit préserver ses acquis démocratiques, doit ancrer dans la loi son destin, former un socle de valeurs fondamentales qui aura force légale au delà des contingences de sa volonté. Alors seulement, par la loi convergera la volonté de chacun avec l’intérêt de tous. La Constitution doit devenir la promesse cohérente d’un avenir démocratique pérenne, forte de ses Institutions républicaines.

C’est dans cette nécessité urgente que l’on eut pensé d’une part définir, préciser la vocation matérielle de la loi et, dans la nécessité de la préserver ensuite par le contrôle de nos institutions, que l’on eut par là même divisé le pouvoir normatif en rénovant la compétence de l’organe exécutif, fort de sa nouvelle autonomie.

Mais c’est en l’absence de majorité que l’on eut pensé limiter la compétence législative en octroyant une part du pouvoir normatif au gouvernement pour assurer à la volonté son effectivité ; or on peut, de par la survenance du fait majoritaire, interroger la réalité actuelle de cette séparation du pouvoir normatif conçue en 1958. En effet, comme le disait M. Favoreu : la révolution juridique n’a pas eu lieu.

Nous verrons ainsi que si, a priori, la distinction entre le domaine de la loi et celui du règlement opérée par les Constituants visait à décentraliser le pouvoir normatif pour limiter la souveraineté du Peuple, la « rationaliser » à l’aide du Cerbere de l’exécutif (I), la survenance imprévisible du fait majoritaire a bouleversé cette séparation et par là même l’équilibre de nos institutions en opérant l’effet inverse, sans pour autant éconduire sa portée révolutionnaire par le biais d’un juge constitutionnel transformé. (II)

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