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La police administrative, notions et compétences - Commentaire d’arrêt. CE, 17 juill. 2023, Ligue des droits de l’Homme, n° 475636, au Lebon T.

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Par   •  17 Octobre 2023  •  Commentaire d'arrêt  •  3 671 Mots (15 Pages)  •  604 Vues

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Séance 5: La police administrative, notions et compétences - Commentaire d’arrêt.

CE, 17 juill. 2023, Ligue des droits de l’Homme, n° 475636, au Lebon T.

        « Pour la police, mérite d’être interdit tout ce qui provoque du désordre, mérite d’être protégé ou toléré tout ce qui n’en provoque point. Le désordre matériel est le symptôme qui guide la police comme la fièvre est le symptôme qui guide le médecin » (Précis de droit administratif, 1933), ces paroles prononcées par le Doyen Maurice Hauriou, professeur de droit administratif à Toulouse et figure phare de cette même discipline, posent une définition relative à la police administrative et son objet. En effet, l’administration, ainsi que son corps d’agents, disposent chacun de pouvoirs plus ou moins divers et à différentes échelles permettant une mise en œuvre harmonieuse du respect des règles et des libertés qualifiées de fondamentales. Cette harmonie, appliquée en vertu de lois, de principes ou de manière discrétionnaire, est parfois difficile à appréhender et nécessite l’analyse d’un œil expert. C’est dans ce cadre que le Conseil d’État intervient tel qu’il en procède dans son ordonnance rendue le 17 juillet 2023.

        En effet, le 7 juin 2023, le maire de Mandelieu-la-Napoule prend un arrêté concernant la réglementation de l’accès aux plages et à la baignade entre le 15 juin et le 31 août 2023, visant notamment le port de tenues manifestant de façon ostensible une appartenance religieuse, au nom du maintien de l’ordre public.

L’association de la Ligue des droits de l’Homme forme une requête en référé suspension contre cette acte (accompagné d’une procédure de fond de recours pour excès de pouvoir). Statuant en référé, le 3 juillet 2023, le juge du Tribunal administratif de Nice rejette cette requête, et la Ligue des droits de l’Homme forme un pourvoi contre cette ordonnance, enregistré les 5 et 12 juillet 2023 (respectant ainsi le délai de 15 jours dans une procédure de recours à un référé). Le 17 juillet 2023, le Conseil d’État fait droit à la partie requérante, précisant qu’il y avait lieu de statuer et de suspendre l’arrêté municipal attaqué, et annule l’ordonnance de première instance.

        La partie requérante au pourvoi dénonce une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales caractérisant l’urgence de sa demande de suspension. Tandis que la partie défenderesse (la commune de Mandelieu-la-Napoule), défend des mesures prises dans le cadre du maintien de l’ordre, de conditions d’hygiène et de sécurité en l’état de circonstances locales survenues en 2012, 2016 et 2020 (rixes et attentats).

        Ainsi, de quelle manière le pouvoir de police administrative générale et spéciale du maire peut-il être limité à l’occasion de mesures restrictives de liberté ?

        Le Conseil d’État, statuant en référé, dispose qu’afin de restreindre une liberté fondamentale, le maire doit justifier et motiver sa démarche dans l’intérêt de l’ordre public caractérisé par des circonstances de temps et de lieu suffisantes. En l’espèce, l’arrêté municipal du 7 juin 2023 présente un caractère illégal en ce qu’il intente de manière disproportionnée et injustifiée à des libertés fondamentales.  

        Le juge administratif procède tout d’abord à une analyse des conditions de la forme du recours (I) puis, affirmant la recevabilité de ce dernier, il poursuit avec une étude précise du fond de l’espèce (II).

  1. L’examen rigoureux des conditions de forme

        Afin de rendre une décision éclairée, le Conseil d’État estime pertinent de retracer de manière didactique les compétences de la police administrative municipale ainsi que celle du juge à appréhender cette police (A) pour en déduire une violation de ces compétences (B).

 

  1. Le rappel pédagogique des compétences du juge et du maire

        « Saisi d’une demande en ce sens justifié par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle {il aurait été porté} une atteinte grave et manifestement illégale », ainsi débute le juge du Conseil d’État, rappelant le principe de l’article L.521-2 du Code de justice administrative (CJA) relatif au référé suspension. Les procédures de référés ont été consacrées par la loi du 30 juin 2000 afin de remédier de manière efficace et rapide à une violation de liberté fondamentale par un acte administratif, compensant alors la durée d’une procédure administrative classique. En effet, face à une « atteinte grave et manifestement illégale » à une liberté fondamentale, le juge administratif doit agir rapidement afin de protéger au mieux cette dernière vis à vis des administrés qui ne peuvent en être légalement privé sauf justifications exceptionnelles. Cette atteinte est appréciée de manière objective et globale par le juge qui estimera de façon discrétionnaire si celle-ci est grave et illégale (CE Section, 2001, Préfet des Alpes maritimes contre Société Sud Est assainissement). S’il s’avère que l’atteinte comporte ces deux caractères, il est urgent de remédier à sa protection, et cette « urgence » tel que le rappelle le juge dans l’article  L.521-2 du CJA, est déterminée si l’acte attaqué fait grief à la situation ou aux intérêts que le requérant entend défendre (CE Section, 2001, Confédération nationale des radios libres). C’est ainsi que l’office du juge des référés lui permet de prendre « toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale », disposant d’un délai courant entre 48 heures (pour les référés liberté) et un mois.

« Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence {…} qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée {…} sans procédure contradictoire et sans audience publique. », le juge poursuit en évoquant un second pouvoir du juge des référés, celui du rejet d’une demande, disposé à l’article L.522-3 du CJA. Il précise que ce dernier doit justifier sa démarche et concernant une décision qui serait « mal fondée », il devra se prononcer sur l’ensemble des moyens soulevés en première instance et pourra ainsi rejeter d’office la requête en référé.

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