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Le caractère administratif du contrat

Commentaire d'arrêt : Le caractère administratif du contrat. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  12 Mai 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  3 527 Mots (15 Pages)  •  2 336 Vues

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Commentaire d’arrêt

      « La matière des contrats est peut-être celle où les règles de compétence sont les plus complexes » par cette affirmation, Édouard Laferrière dans son œuvre traité de la juridiction administrative et des recours contentieux exprimait déjà la difficulté de la détermination du contrat administratif; difficulté encore présente aujourd’hui, notamment lorsqu’il est question d’un contrat conclu entre deux personnes privées, comme en témoigne un arrêt rendu par le Tribunal des conflits en date du 8 juillet 2013, Société d’exploitation des Energies photovoltaïques c./ Société Électricité Réseau Distribution France.
     
En l’espèce, une société d’exploitation d’énergies photovoltaïques (SEEP), dans le cadre d’un projet de réalisation d’une installation de production d’électricité sur la commune de Saint Jean de Serres a, en novembre 2009, conclu un contrat de vente de l’énergie produite avec la société Électricité de France (EDF) dont les disposition tarifaires étaient alors régies par un arrêté du 10 juillet 2006, ainsi qu’un contrat avec sa filiale, société Électricité réseau distribution de France (ERDF) visant au raccordement de l’installation au réseau de transport et de distribution de l’électricité. Or, la société ERDF n’ayant pas soumis de proposition technique et financière telle qu’elle s’était engagée à le faire auprès de la SEEP avant le 5 avril 2010, cette dernière, estimant que les engagements n’avaient pas été respectés, avait alors assigné la société ERDF devant le Tribunal de commerce de Nîmes le 15 novembre 2010. En attendant le jugement, de nouvelles négociations et propositions reprennent, et la société ERDF par lettre du 22 novembre 2010 adresse à la SEEP une proposition technique et financière en vue du raccordement de son installation au réseau, proposition acceptée par cette dernière, que la société ERDF rompt finalement 18 mars 2011, estimant son offre caduque à la suite à d’un décret en date du 9 décembre 2010 instituant un moratoire sur la mise en œuvre de l’obligation d’achat pour l’électricité photovoltaïque. La SEEP va alors saisir les juridiction compétentes afin d’examiner l’irrégularité de cette décision de la ERDF de ne pas exécuter ses obligations en se prévalant dudit décret.
      La SEEP avait dans un premier temps saisi le Tribunal de commerce, devant lequel elle demandait à ce que soit enjoint à la société ERDF le respect de ses obligations, ainsi qu’à la société EDF d’acheter l’électricité produite aux conditions de l’arrêté du 10 juillet 2006. Par un jugement déclinatoire de compétence en date du 12 avril 2011, le Tribunal du commerce, reconnaît le juge judiciaire incompétent pour connaître du litige et renvoi la cause et les parties à mieux se pourvoir. La SEEP, demanderesse, saisi alors le Tribunal administratif. Sa demande se dirige tout d’abord contre la ERDF, ayant annulé sans objet le contrat de raccordement d’installation au réseau afin de lui enjoindre d’exécuter ses obligations. Puis, contre la société Électricité de France pour lui enjoindre de racheter l'électricité à produire aux conditions tarifaires prévues par l'arrêté du 10 juillet 2006. Le Tribunal administratif dans un jugement en date du 15 janvier 2013 tranche le litige relatif à l’exécution du contrat entre la SEEP et la société EDF qu’il qualifie ainsi de contrat administratif dont il est susceptible de connaître en vertu de l’article L.314-7 du code de l’énergie. En revanche, le Tribunal se déclare incompétent pour connaître de la demande dirigée contre la société ERDF et renvoi la question au Tribunal des conflits en prévention d’un conflit négatif par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié.
       Devant le Tribunal des conflits, la société d'exploitation des énergies photovoltaïques estime que le juge judiciaire doit être déclaré compétent pour connaître du litige l’opposant à la société ERDF, au motif que le litige est relatif à un contrat entre personnes privées n'agissant pas pour le compte d'une personne publique. Ce que soutiennent les sociétés Solaire Saint-Jacques et Vol-V Solar, société tierces intervenant au litige. Au contraire, la société ERDF estime quant à elle que la compétence pour connaître de ce litige relève du juge administratif, aux motifs, d'une part, que le contrat de raccordement au réseau de transport et de distribution d'électricité constitue l'accessoire du contrat d'achat d'électricité par la société EDF légalement qualifié de contrat administratif, et d’autre part, qu'un tel contrat est passé par ERDF pour le compte des collectivités territoriales et de l'Etat.
     La question qui se posait alors au Tribunal des conflits était celle de savoir si un contrat de raccordement lié à un contrat d’achat d’électricité peut être considéré de même nature et ainsi permettre la compétence du juge administratif ?
     À cette double question, le Tribunal des conflits répond par l’affirmative, dans un arrêt en date du 8 juillet 2013, mais n’applique pas cette réponse à l’espèce. En effet, tout en reconnaissant deux exceptions au principe selon lequel un contrat conclu entre deux personnes privées est nécessairement de droit privé, il affirme que ces exceptions ne s’appliquent pas en l’espèce. Ainsi, le juge des compétences attribue au contrat de raccordement conclu entre un producteur indépendant et la société ERDF un caractère de droit privé, jugeant ainsi que « le litige opposant la SEEP à ERDF relativement au raccordement au réseau de transport et de distribution d'électricité d'une installation de production d'électricité d'origine photovoltaïque relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ».
     Cette décision est importante par ses conséquences pratiques, s’agissant de la détermination des juridictions compétentes pour trancher les nombreux litiges que suscitent ces contrats de raccordement, en particulier face au développement ces dernières années de sources d’énergies renouvelables. Aussi, elle s’inscrit ainsi dans une jurisprudence qui, depuis quelques années, a été amenée à se prononcer sur la nature juridique des différents contrats intervenant dans ce domaine. L’intervention admise de deux sociétés tierces au litige mais défenderesses dans des litiges similaires, est la preuve de l’importance de la question posée. Mais, au delà de cette dimension sectorielle, cette décision revêt une importance certaine, car elle reconnait clairement l’existence d’une nouvelle catégorie de contrats administratifs : les contrats accessoires de contrats de droit public.
     Ainsi, il s’agira dans un premier temps de quelle manière le Tribunal des conflits affirme que le contrat de raccordement au réseau est un contrat de droit privé (I), puis en quoi la consécration du juge judiciaire pour connaître des conflits relatifs à ces contrats apparaissant cependant critiquable (II).

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