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Cours de droit administratif des biens L3 2016-2017

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Par   •  18 Octobre 2017  •  Cours  •  23 291 Mots (94 Pages)  •  969 Vues

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Le code de la propriété publique s’articule autour des pouvoirs de la personne publique.

Section 2 : Les caractères spécifiques du droit de propriété des personnes publiques


La question continue de diviser la doctrine.
Y. Gaudemet soutient qu’il n’y a pas de différence entre la propriété privée et la propriété publique. La propriété ne renvoie qu’à une seule notion. Il argumente que pour le Conseil constitutionnel, la propriété vient toujours de la même source, l’article 17. Aussi, il pense que c’est une absurdité de penser qu’il y a plusieurs types de propriété, seules les règles applicables changent si un bien passe de la propriété privée à la propriété publique (et vice versa).
P. Yolka considère que le fait qu’on ait deux régimes différents entre propriété publique et propriété privée démontre simplement qu’il y a deux formes de propriété. Pour lui il y a deux règles spécifiques à la propriété publique qu’on ne retrouve pas en propriété privée.

  1. Le principe d’insaisissabilité de la propriété publique

(Yolka JCP A 2007 n°307, Gaudemet RJEP 2007 repère page 285)

Les biens publics (dans le domaine public ou le domaine privé) sont tous insaisissables. Un créancier de l’administration ne peut mettre en œuvre aucune voie d’exécution forcée à l’encontre d’un bien d’une personne publique. C’est un principe ancien consacré aujourd’hui au L 2311-1 du CG3P. Comme les biens publics sont affectés à l’usage de tout le monde, c’est impossible de saisir.
Arrêt de principe :
Cour de cassation, 1ere chambre civile 21 décembre 1987 BRGM c/ Société Lloyd Continental : Est-ce que ce principe d’insaisissabilité s’applique aussi aux biens immatériels d’une personne publique ? En l’occurrence il s’agissait de parts que détenait un département dans le capital d’une société concessionnaire d’autoroute. Ces parts ont fait l’objet d’une offre de rachat.
Chambre commerciale de la Cour de cassation, 21 janvier 2014 Département de Saône et Loire : Ces parts de capital font partie du domaine privé du département et c’est pour ça que le juge judiciaire est compétent. Le principe d’insaisissabilité s’applique bien aux biens immatériels mais ne s’oppose pas à une offre de rachat.

Certains EPIC considèrent que ce principe d’insaisissabilité est un frein à leur compétitivité économique. Il se peut que quelqu’un de l’EPIC ait besoin d’un prêt auprès d’une banque en donnant en garantie une garantie réelle, sauf que le bien sera insaisissable même en cas de défaut de paiement.
Des personnes publiques demandent donc des assouplissements.

  1. L’interdiction de cession à vil prix

C’est la cession d’un bien à un prix manifestement inférieur à sa valeur réelle. C’est l’équivalent du principe d’interdiction des libéralités. Elles n’ont pas le droit d’accorder à quiconque des avantages injustifiés. Mais comment connaître la valeur réelle d’un bien public ? Pour les biens de l’Etat il y a un établissement public appelé France Domaine et pour les collectivités locales c’est le service des domaines rattaché au département. Ils sont compétents pour évaluer la valeur des biens publics.
La cession à vil prix concerne évidemment que les biens du domaine privé, le domaine public ne pouvant pas être cédé.
Le principe paraît évident mais en réalité la collectivité pourrait être amené à réduire le prix en contrepartie d’un service de l’acheteur.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 et 26 juin 1986 dit ceci : La Constitution s’oppose à ce que des biens ou des entreprises faisant partie de patrimoines publics soient cédés à des personnes poursuivant des fins d’intérêt privé pour des prix inférieurs à leur valeur.
Cependant le Conseil d’Etat dans son arrêt
Commune de Fougerolles du 3 novembre 1997 : « La cession par une commune d’un terrain à une entreprise pour un prix inférieur à sa valeur ne saurait être regardée comme méconnaissant le principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant des fins d’intérêt privé lorsque la cession est justifiée par des motifs d’intérêt général et comporte des contreparties suffisantes. »
L’entreprise s’engageait à créer un certain nombre d’emplois. C’est un pragmatisme de bonne augure mais risqué car les notions d’intérêt général et de contreparties suffisantes sont très vagues.
La cession à vil prix est donc subordonnée à deux conditions cumulatives. Si une des deux conditions fait défaut la vente sera annulée :
CE 25 septembre 2009 Commune de Courtenay.
Et si l’acheteur ne respecte pas ses engagements après la vente ? La sanction est aussi prévue : la personne privée engage sa responsabilité contractuelle et devra rembourser les sommes inutilement engagées par la commune. Conseil d’Etat Asselin.

La loi du 13 août 2004 est venue préciser le régime des aides immobilières aux entreprises.
La tendance de la jurisprudence c’est que le Conseil d’Etat interprète très largement les conditions de la cession à vil prix. Deux arrêts ont été critiqués :
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25 novembre 2009 Commune de Mer (AJDA 2010 p.51) Une commune a cédé un bâtiment à une association franco-turque. Cette cession a été contestée au nom de l’interdiction de la cession à vil prix. Or le Conseil d’Etat va considérer que cette cession est légale. Si la doctrine a été critique c’est parce que la jurisprudence Fougerolles impose deux conditions, et si l’intérêt général ne pose pas de difficultés, il n’existe pas de contrepartie.
Pourquoi ne pas subventionner au lieu de
donner un bâtiment public ? Si à chaque fois la solution est de donner un bâtiment public le problème va vite se poser. Le CE donne l’impression de ne pas trop protéger les biens publics.
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Ce 14 octobre 2015 Commune de Chatillon (AJDA 2016 p. 1125) Un terrain d’une commune illégalement occupée par des gens du voyage. La commune a pris par délibération la décision de vendre le terrain à vil prix. Là encore le motif d’intérêt général est visible, par contre les contreparties… La CAA avait annulé la vente au motif que les contreparties étaient insuffisantes. Mais le Conseil d’Etat va censurer l’arrêt de la CAA et retient des avantages en termes d’hygiène, sécurité, d’économie réalisée par la commune pour l’aménagement d’un terrain d’accueil et le coût d’entretien des terrains occupés.

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