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Conditions de l'opposabilité au débiteur du transfert de sa créance à une société d'affacturage

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Par   •  5 Décembre 2012  •  1 674 Mots (7 Pages)  •  4 074 Vues

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Recueil Dalloz 1991 p. 180

Conditions de l'opposabilité au débiteur du transfert de sa créance à une société d'affacturage

Yannick Dagorne-Labbe

 

NOTE

[1] L'art. 1250, 1°, c. civ. prévoit la possibilité, pour un créancier qui reçoit son paiement d'un tiers, de le subroger dans ses droits et actions contre son débiteur. Cette subrogation ex parte creditoris est soumise à des règles de forme, elle doit être expresse et faite en même temps que le paiement ; par ailleurs, elle produit ses effets à l'égard des tiers dès le versement par le subrogé sans qu'il soit besoin d'en avertir le débiteur(1). Il va donc y avoir un décalage entre le moment où la subrogation se réalise et celui où le débiteur en est informé. Cette situation est la source de difficultés car, pendant la période séparant ces deux événements, peuvent intervenir des faits de nature à éteindre partiellement ou totalement le droit de créance qui a été transféré. Le débiteur peut-il les opposer au créancier subrogé ? A-t-il le droit d'invoquer des exceptions nées ou dont les conditions d'application ne sont apparues que dans la période entre la subrogation et son information pour refuser de payer le subrogé ? Cette question présente un intérêt pratique considérable compte tenu du fait que le mécanisme de la subrogation consentie par le créancier est à la base du contrat d'affacturage, ou de factoring, qui depuis une trentaine d'années s'est développé en France. En effet, par cette convention d'origine américaine, un commerçant, recevant d'un factor une somme représentant le montant de ses créances sur ses clients, sous déduction d'une commission, subroge celui-ci dans ses droits et actions contre les clients concernés(2). Il importe donc de savoir quelles sont les exceptions que ces clients peuvent opposer au factor. C'est sur ce point qu'intervient l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation daté du 3 avr. 1990. En l'espèce, un contrat d'affacturage est conclu entre deux sociétés. En application de cette convention le factor réclame à une troisième société, débitrice de la société subrogeante, le paiement de sa créance. Celle-ci refuse en invoquant la compensation avec une créance qu'elle détient sur cette société subrogeante. La cour d'appel admet que la compensation est opposable au factor car elle s'est produite alors que le débiteur n'avait pas été informé de la subrogation. Cet arrêt est cassé au motif que la compensation ne serait opposable que si elle était intervenue avant la subrogation, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Pour les magistrats de la Chambre commerciale, l'exception de compensation ne peut être opposée à un subrogé dès lors que l'un des éléments nécessaires à la mise en oeuvre de cette compensation fait défaut lors de la subrogation, même s'il se produit avant l'information du débiteur. En premier lieu, nous situerons cette décision par rapport à la doctrine et la jurisprudence en la matière, puis, en second lieu, nous rechercherons les critiques qui peuvent être apportées à la solution retenue par la Chambre commerciale.

La doctrine, dans sa quasi-unanimité, estime que la compensation n'est opposable au subrogé que si la créance du débiteur et les éléments nécessaires à la mise en oeuvre de cette compensation sont antérieurs à la subrogation(3). Cela s'explique car la compensation a déjà joué au moment de la subrogation, les deux dettes étaient fongibles, liquides et exigibles, et que, par suite, le subrogeant n'a pu transmettre au subrogé une créance qui n'existait plus(4). C'est la simple application de l'adage nemo plus juris ad alium transfere potest quam ipse habet. Cette doctrine est confirmée par l'ensemble de la jurisprudence et c'est dans cette ligne que s'inscrit l'arrêt annoté(5). Cependant, une exception est admise par la doctrine et la jurisprudence en cas de connexité entre la créance transférée et celle qu'invoque le débiteur(6). Par contre, la situation est différente en matière de paiement effectué entre la date de la subrogation et celle de l'information du débiteur. Celui-ci est libératoire et donc opposable au subrogé, cette analyse est celle de la jurisprudence et de la doctrine(7). Elle se fonde sur l'art. 1240 c. civ., c'est-à-dire sur le fait que le débiteur était de bonne foi lors du règlement. Il existe, toutefois, une différence entre la faculté d'opposer la compensation au subrogé et celle de lui opposer le paiement. Ce dernier constitue une exception inhérente à la créance qui peut être invoquée dès lors qu'elle est née avant l'information du débiteur même si elle n'est dévoilée qu'ultérieurement. La première, à l'inverse, est une exception extérieure à la créance, c'est pourquoi il ne suffit pas que la créance du débiteur soit née avant la subrogation mais il doit en être de même des éléments nécessaires à la mise en oeuvre de la compensation(8). Plusieurs raisons permettent, selon nous, de contester l'analyse confirmée par l'arrêt du 3 avr. 1990.

Deux arguments amènent à penser que la compensation doit être opposable au créancier subrogé à partir du moment où elle s'est réalisée avant la notification de la subrogation au débiteur. Le

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