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ETAT D'URGENCE et POLICE ADMINISTRATIVE

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Par   •  25 Avril 2017  •  Dissertation  •  5 632 Mots (23 Pages)  •  1 436 Vues

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Exposé de droit administratif

État d’urgence et police administrative

Le 30 mars 1955, dans l'hémicycle, et alors que le débat autour du projet de loi instituant l’état d'urgence et l’appliquant en Algérie fait rage, le député Vals attaque avec verve ce régime restreignant les libertés pour ramener l’ordre public. « Ne sentez-vous pas la monstruosité de cette parodie de garanties ? Jamais, sauf en période de dictature, on n'a fait en France si bon marché de la liberté des citoyens ». Ce propos liminaire sera l’occasion de mieux cerner les notions et enjeux affectés par cette citation. Parce que la police administrative est « gardienne » de l’ordre public, on saisi aisément que lorsque celui-ci est mis en péril par des atteintes graves et imminentes, les pouvoirs de police sont accrus, du moins modifiés. Ainsi, il convient de définir ce que peuvent être chacune de ces notions : police administrative, ordre public et état d’urgence. On comprend bien les corrélations et l’impact que chacun à sur l’autre, et déjà l’on voit poindre une confrontations d’idéaux, sécuritaire d’une part, libertaire de l’autre.

L’ordre public

Dans un premier temps, attachons nous à définir l’ordre public. Si la police administrative intervient pour éviter les troubles à l’ordre public (L. 2212-2 du CGCT, cité plus loin), c’est pour maintenir la discipline sociale au sein de la société. Il s’agit là d’un « ordre finalisé, lié à la construction de l’État libéral » (E. Picard, La notion de police administrative, LGDJ, 1984). Comprenons ici qu’il n’est pas un ordre totalitaire, de ceux que firent régner à Varsovie les troupes russes au XIXème. Non, il est davantage un ordre indispensable à la garantie des droits, à la sauvegarde des libertés proclamées par la DDHC. L’ordre public est ambivalent, en atteste la jurisprudence du Conseil constitutionnel : s’il est une limite aux droits fondamentaux (CC, 27 juillet 1982), il en est la garantie absolue, la prévention des atteintes à l’ordre public étant « nécessaire à la sauvegarde des droits de valeur constitutionnelle » (CC, 26 août 1986).

L’ordre public, pour être exhaustif, se conçoit négativement. Il n’est « ni désordre, ni trouble, et reste matériel et extérieur » pour reprendre les mots du Professeur Hauriou. Du reste, l’ordre public n’est pas un ordre public économique, en ce qu’il ne peut entraver la libre concurrence par exemple (CE, 22 novembre 2000, Sté L. et P. Publicité). Il n’est pas non plus un ordre public esthétique (CE, 11 mars 1983, Commune de Bures-sur-Yvette, à propos de l’incapacité du maire à réglementer la force des monuments funéraires). Si un doute subsiste quand à la moralité de l’ordre public, le Conseil d’État fait parfois usage de l’immoralité comme composante d’une atteinte à l’ordre public (CE, 7 novembre 1924, Club indépendant chalonnais, sur la légalité d’un arrêté municipal interdisant les combats de boxe), la doctrine, et à sa tête le Pr. Hauriou, s’oppose fermement à ce que la morale s’immisce dans l’ordre public. S’insérant dans la jurisprudence communautaire, le Conseil d’État semble substituer à la morale la notion de dignité de la personne humaine, allant jusqu’à « protéger » (la notion de protection étant aussi subjective que relative) l’homme de lui-même (CE, Commune de Morsang-sur-Orge, 1995).

S’il fallait donc extraire une définition de tout cela, retenons que l’ordre public est avant tout tributaire de son époque, évoluant au gré des consensus sociaux. Mais il est une chose certaine, consacrée par l’article L. 2212-2 du CGCT, l’ordre public correspond au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publique.

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La police administrative

Une fois la notion d’ordre public définie, certes laborieusement, il convient d’étudier l’autorité à qui il appartient de préserver ce dernier. Le mot police est polysémique par son étymologie et accueille plusieurs acceptions contemporaines. On simplifiera donc en précisant qu’il s’agit des compétences de certaines autorités publiques leur permettant, afin d’assurer la sauvegarde de l’ordre public, d’émettre des actes normateurs et de décider d’opération matérielles, en faisant appel aux forces de police pour la mise en oeuvre des décisions. Maurice Hauriou défini la police ainsi : « Pour la police, mérite d’être interdit tout ce qui provoque du désordre, mérite d’être protégé ou toléré tout ce qui n’en provoque point. Le désordre matériel est le symptôme qui guide la police comme la fièvre est le symptôme qui guide le médecin. » (Précis de droit administratif et de droit public, 9e éd., Paris, Sirey, 1919). Il décrit là ce que devrait être, selon lui, la police administrative : une police qui ne se préoccupe que des désordres matériels, c'est-à-dire, a contrario, qui ne se préoccupe surtout pas de la morale.

Traditionnellement, on oppose la finalité préventive de la police administrative à la finalité répressive de la police judiciaire. Ce critère finaliste est l’oeuvre d’une longue jurisprudence qu’il ne convient pas d’étudier ici, mais simplement de nommer les arrêts principaux : CE, 1951, Consorts Baud et TC, 1951, Noualek.

Pour résumer, la police administrative apparait comme la fonction de l’administration qui a pour but de faire régner l’ordre public, en imposant en amont aux membres de la société des restrictions à leurs libertés publiques pour assurer la discipline qu’exige la vie sociale. Elle reste essentiellement préventive, bien que non exclusivement puisqu’il n’est pas exclu que l’administration prenne des sanctions punitives ayant la forme de sanctions administratives.

L’État d’urgence

L’état d’urgence est traité dans la plupart des manuels de droit administratif en quelques lignes. Régime d’exception peu mis en place par le passé, il est entrainé avec fracas dans le débat doctrinal par les récents attentats. C’est une loi du 3 avril 1955 qui instaure pour la première fois l’état d’urgence, dans un contexte d’extrême tension en Algérie, où la guerre fait rage. Il apparait alors comme un remède aux insuffisances des pouvoirs des autorités publiques. L’état d’urgence prend la forme d’un décret en conseil des ministres, pris en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public ou, pour résumer, de « calamité publique ». En cas de prolongation au delà d’un délais de 10

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