Zazie Dans Le métro

I. Portrait fou

Portrait imparfait, incertain

Le nom et prénom sont des créations, ils participent à la caractérisation : Zazie est fantaisie, Lalochère franchouillard. Ce mélange du réaliste (caractère social) et du fantaisiste donne un côté factice, artificiel. Zazie est emprunté aux zazous, puis à Zizi Jeanmoire, chanteuse du music-hall. La grande Zaza, aussi égérie des zazous, des jeunes qui pendant la WW2 affichaient un décontract choquant, désimpliqué de la politique et résistance, habillés de costumes américains dans une période de privation. Pourchassés par les vichystes, leur côté anarchiste a influencé Zazie. On trouve aussi la récurrence de St Germain des prés, fréquenté par la grande Zaza, par Greco (rappel aux lecteurs ayant connu la guerre 15 ans avant).

Dans le roman, aucun portrait physique, on ne sait pas son âge (13/14 ans). Nombreuses sont les récurrences à l’enfance, mais elle parait adolescente. Son obsession d’avoir un blue-jean + les références au sex posent le doute. Son âge est une arme, se défendre ou agresser le monde adulte (prétendre à la pédophilie). Elle contredit l’image de l’enfant pure et angélique. Son portrait biographique faible montre un père violeur, mais portrait douteux car fait à Pedro Surplus. Ce portrait lacunaire est entre réalisme et fantaisie.

Références littéraires ?

Zazie est entre Alice et Gavroche. On retrouve ce genre de garnement insolent dans les œuvres de la comtesse de Ségur Les malheurs de Sophie. Persiste le côté initiatique d’Alice au pays des merveilles de Lewis Caroll. Affronter des obstacles, plonger dans un monde fou, inconnu, fascinant en sortant de l’enfance prouve la même curiosité. Pour Zazie, Paris l’émerveille « superbes gratte ciel », « somptueuse avenue » p43. Zazie et Alice sont dans une parenthèse formatrice, mais l’une est bien élevée, l’autre impolie.

Gavroche en revanche est l’emblème du gamin des rues, un être joyeux de 7 à 13 ans, non mauvais, irrévérencieux, mais honnête, innocent. Il est le personnage du titi parisien, péjoratif, affectif, sympa des années 1830. On trouve d’ailleurs dans Les misérables « keksekça » dans la bouche de Gavroche : retranscription d’une langue orale populaire. Mais Zazie n’est pas des rues, pas miséreuse, pas engagée.

Ni miséreuse ni merveilleuse, Zazie est ce que Queneau affectionne : l’enfant bousculeur des conventions et règles, qui casse le cliché enfantin pour valdinguer le lecteur.

Un portrait psychologique ?

Aucun portrait psychologique en acte ni monologue intérieur = flou total. Mais p44 « C’est pas possib, c’est un acteur en vadrouille, un de l’ancien temps » montre ce que pense Zazie, le cinéma lui est familier. P56 « non mais de quoi je me mêle » p66 « avec sa petite voix intérieure, chui aussi bonne que Michèle Morgan ». On souligne l’artifice du procédé romanesque, le monologue intérieur, à la mode dans les 60’s.

Zazie semble dénuée de pb psychologique, de fissures. Mais elle en cause partout, avec des connotations très brèves : « vexée » p104, toujours à distance. Ce personnage est toujours absent, souvent exaspéré, p14 contre Gabriel, agressive p100. C’est un personnage de désir et de volonté = enfant = intolérante à la frustration.

Analyse 2° partie chap I

P10, elle rencontre son oncle avec des questions/réponses & conflits = désir de prendre en main les événements, de dominer. C’est un enfant tyrannique. P11 « Ah, les salops », « Il est rien moche son bahut », « Comment ça non ? ». Le métro revient 10 fois, comme une obsession capricieuse. Sa violence « Je m’en fous », « folle de rage » arrive à un trait psycho inquiétant, elle veut tyranniser, rappelant son rêve d’être maîtresse.

Dans le film : Malle rajeunit Zazie de 4 ans = grand public, limite son côté lolita. On élimine « Je ne veux pas qu’elle se fasse violer » = enfant, aidé par son costume. Cette fillette s’enfuit pour secouer les grilles (scène non présente dans le roman). L’accéléré donne un effet comique (Taxi volé, fautes d’orthographe dans « graive »).

Conclusion

Zazie n’est pas un personnage traditionnel, qui se prête au portrait : elle se définie par ses actes, ses paroles. Guidée par ses désirs (Cacocalo, métro) elle est difficile à adapter (l’actrice dévie le portrait incertain). Zazie à l’écran ne peut pas demeurer une abstraction.

II. Elément perturbateur

Dans la structure d’une histoire au schéma narratif classique, Zazie est l’élément perturbateur qui change la situation stable de Paris.

Rapport entre Zazie et Turandot

Dans le livre : « ça me plaît pas » p20 : Turandot craint le scandale, Zazie est trop grande, le commerce est menacé par une Lolita dont la charge érotique l’inquiète. Il veut conserver sa respectabilité, le tiroir caisse passe avant. Laverdure le remet à sa place « Tu causes… » Zazie est ce scandale de la désorganisation.

Dans le film : Le son est couvert par la musique non synchronisée, Turandot est théâtralisé par le montage cut post synchro au dialogue accentué. C’est un grand drame, parodiant le tragique. Turandot est au-delà de ce livre un Opéra à l’univers tragique, rappelant sa crise. Dans son bistrot, un portait de Pétain, sur sa tête un béret, à connotation française de collabo. Il fait un discours des bonnes mœurs, mais en quelle mesure Zazie perturbe-t-elle ?

Perturbation du récit

Zazie est à l’origine des péripéties par ses fuites, refus, désirs. Chap 2, elle crée la colère de Turandot, chap 3 elle fugue, altercation p33, attroupement p57, dispute avec Charles p88, scène de choucroute chap 8… Zazie est partout, précipite les choses, comme virer Pedro pour garder les bluejeans. La scène de la choucroute p133 nous montre que les parents incitent Zazie à ne pas donner son opinion. Elle ne supporte pas la lâcheté des adultes qui mentent. Elle met à jour l’hypocrisie des adultes qui ne veulent pas déséquilibrer l’ordre. Dans l’espace elle introduit une vitesse qui désoriente : p43 zig-zag, ou la fuite de Pedro dans le film.

Volonté de

...