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Devoir 3 : vision de la fatalité dans 2 poèmes de Nelligan et Garneau

Dissertation : Devoir 3 : vision de la fatalité dans 2 poèmes de Nelligan et Garneau. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Janvier 2023  •  Dissertation  •  786 Mots (4 Pages)  •  188 Vues

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Devoir 3C – Dissertation critique        

Sujet de dissertation critique

A-t-on raison de penser que Saint-Denys Garneau et Émile Nelligan présentent, dans Cage d'oiseau et Les Corbeaux, une même vision de la fatalité ? Discutez.

Dans les deux poèmes à l’étude, Saint-Denys Garneau et Nelligan offrent la même vision de la fatalité, c’est-à-dire une vision funèbre de leur propre mort. Dans Cage d’oiseau, Saint-Denys Garneau évoque la mort inévitable par la métaphore de l’oiseau qui le mange. L’oiseau représente la mort : «un oiseau tenu captif / La mort dans ma cage en os» (v.13-14). La mort, c’est à dire l’oiseau, avait seulement «fait son nid» au vers 5, au début du poème, puis elle se moque de lui en quelque sorte lorsqu’il l’entend «qui roucoule / Au fond» de lui (V.10-11). Tandis qu’elle s’installe en son sein et prend des aises, le poète questionne: l’oiseau ne «voudrait-il pas s’envoler» (V.15). Cette interrogation n’est que formalité, en effet, il possède déjà la réponse, négative, puisqu’il demande immédiatement qui le retient alors au vers 16. La réponse est en lui et il fait semblant de ne pas le savoir par ce «Est-ce moi» (V.17). Puis le couperet tombe : «Il ne pourra s’en aller / Qu’après avoir tout mangé / Mon cœur / La source du sang / Avec la vie dedans» (V.19-23). Cette gradation permet de sentir une mort progressive et funeste. La mort dans Les corbeaux de Nelligan est tout aussi lugubre et inéluctable. Nelligan use également de la métaphore macabre des oiseaux «déchirant à larges coups de bec, sans quartier, / [Son] âme, une charogne éparse» et « dévor[ant] [son corps et son âme] en entier» (V.12-13 et 14). Dans les deux poèmes, les auteurs insistent sur le fait qu’il ne reste rien du repas des oiseaux, ce qui ajoute un poids tragique à l’issue certaine et irréversible de la mort comme fatalité.

Par ailleurs, on note une différence dans la provenance de la mort dans ces deux poésies. Saint-Denys Garneau décrit la source intrinsèque de sa mort, provenant de ses entrailles, puisque lorsqu’il écrit «Je suis une cage d’oiseau» (V. 1) et «l’oiseau dans ma cage d’os / C’est la mort qui fait son nid» (V. 4-5), il compare sa cage thoracique à la cage d’un oiseau le maintenant prisonnier. L’oiseau «tenu captif» (V.13) est ce mal qui le ronge de l’intérieur jusqu’à la mort inévitable. Par contre, dans Les corbeaux, Nelligan décrit plutôt une scène d’attaque par des corbeaux nombreux, «en essaim» (V.1). Les corbeaux, ces oiseaux de malheur ou «démons des nuits» (V.9), l’encerclent «lugubrement, comme un cercle sur des tombeaux» (V.5). Le champ lexical de la chasse animale menant généralement à la mort de ses proies est assez étendu avec «carcasses», «proie échue», «chair en lambeaux», «charogne». La mort est donc vue comme une force extérieure l’assaillant.

Finalement, malgré le point commun de la mort inéluctable imagée par les repas d’oiseaux, la vision de la fatalité dans ces 2 poèmes diffère par la provenance intérieure ou extérieure de la mort mais aussi par une appréhension différente de la fatalité de celle-ci. Bien que ces deux auteurs soient quasiment contemporains l’un de l’autre, leur perception idéologique de la mort en lien avec la religion notamment diffère considérablement. La vision de la fatalité est affranchie de la religion chez Nelligan alors qu’il y a un seuil de respect ou de doute que Saint-Denys Garneau ne semble pas prêt à franchir. Dans Cage d’oiseau, la mort s’en vient plus doucement, elle s’installe lorsque le rire «cesse» (v.9), soit lorsque la mélancolie le gagne. La mort semble respecter l’âme car l’oiseau semble libre de s’envoler et d’emmener avec lui «[son] âme au bec» (V.23), tel l’image biblique voulant que l’homme accepte sa mort selon la volonté de Dieu et que son âme le quitte, seule. Il y a là une sorte d’euphémisme rendant l’acceptation de la mort plus facile. Au contraire dans Les corbeaux, la mort est violente, en effet, il est d’abord blessé puisque les corbeaux «planaient […] / Agitant à leurs becs une chair en lambeaux» (V.8), puis il tombe avec «cette proie échue [… qui] / N’était autre que [sa] Vie en loque» (V.9-10). Les images mortifères sont fortes, voire choquantes, ce que le clergé n’encourageait pas. La mort n’est ni voulue, ni libératrice. Et avec l’allégorie, «mon âme, une charogne éparse», on peut sentir que la mort chez Nelligan s’en prend même à son âme qui est aussi attaquée et dispersée, alors que l’âme est sur le plan religieux insaisissable et immortelle. Les deux poètes ne transposent donc pas la même idéologie dans vision de leur destin.

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