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Commentaire littéraire (Jean de la Bruyère, Les Caractères, De l'homme)

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Par   •  30 Janvier 2016  •  Commentaire de texte  •  2 533 Mots (11 Pages)  •  5 725 Vues

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Commentaire littéraire

Jean de la Bruyère, Les Caractères, « De l'homme »

Au XVIIème siècle, Jean de La Bruyère veut faire réfléchir, à travers son œuvre Les Caractères, publiés entre 1688 et 1696, sur le comportement « Des Grands », « De la cour » et « De l’Homme » à son époque. Il lui a fallu dix-sept ans avant de publier ce recueil de 420 « remarques », sous forme de maximes, de réflexions et de portraits. Le chapitre 5, intitulé « De l’Homme », est une nouvelle occasion pour le moraliste de soulever les problèmes de la misère, de l’inégalité et de l’injustice sociale à travers l’écriture de ce texte. Le moraliste dresse le portrait de Gnathon, un être profondément égoïste, se comportant en goujat et méprisant autrui. Le personnage permet à l'auteur de dénoncer, par le biais d'une caricature très satirique, l'égocentrisme.

Nous nous demanderons comment La Bruyère procède-t-il pour critiquer ce défaut ?

Dans un premier temps, nous mettrons en évidence que Gnathon apparaît comme un être répugnant puis dans un deuxième temps nous étudierons son égocentrisme.

Dans  cette première partie, nous verrons l’être répugnant que représente Gnathon. Pour cela, nous étudierons le goinfre puis l’homme sans gènes ni scrupules qu’il incarne.

Force est de constater que la gloutonnerie est ici mise en scène à grand renfort d’images éloquentes. La moitié du texte est en effet consacrée au comportement de Gnathon à table. « Gnathon » vient de grec qui signifie « mâchoire », le personnage est réduit à son appétit insatiable. En effet, la structure des phrases du texte souligne l’avidité avec laquelle le personnage se nourrit : on note des phrases longues, constituées de nombreuses propositions juxtaposées entre elles : « il se rend maître du plat […] : il ne s'attache à aucun des mets […] ; il voudrait pouvoir les savourer tous ». (Lignes 4-5).

On note également l’accumulation des verbes décrivant l'action de l’homme en train de manger : «manie (...) remanie, démembre, déchire,... » (Lignes 5-6) qui met en évidence la brutalité de cette façon de s’alimenter. La frénésie vorace de cet homme est d’autant plus évidente que la description constituée de longues propositions juxtaposées s’achève par une proposition indépendante introduite par la coordination « et » : « et il continue à manger » (Ligne 11).

Son appétit excessif et sans fin fait penser à une bête. En témoigne cette comparaison : « la table est pour lui un râtelier » (Ligne 10), qui évoque clairement le comportement d’un animal.

Le portrait dressé ici est bel et bien celui d’un vorace qui mange avec avidité et sans retenu. En témoigne la métaphore filée qui évoque le prédateur rapportant sa proie au terrier : « s’il enlève un ragoût »... « il le répand en chemin »... « on le suit à la trace » (Ligne 8-9).

Ainsi, à table, Gnathon apparaît déjà comme un personnage fort mal élevé et sans gêne.

Le comportement grossier du personnage se donne à voir dans son attitude répugnante à table : « capable d’ôter l’appétit aux plus affamés » (Ligne 7-8).

Mais la grossièreté s’exprime également par le sans gêne qui le caractérise. Le personnage ne semble vivre qu'avec le souci de son bien-être physique : manger est l’activité qui semble occuper la première place, mais son confort occupe également toute son attention. En témoigne la forme restrictive de la proposition subordonnée introduite par « que » : « il n’y a dans un carrosse que les places du fond qui lui conviennent » (Ligne 13).

Le manque d’intérêt que Gnathon affiche pour autrui est le pendant de sa voracité. L’énumération à la fin du portrait est éloquente. La forme négative des propositions juxtaposées souligne le manque total d’empathie du personnage : « ne se contraint pour personne, ne plaint personne...ne pleure point la mort des autres... » (Ligne 17-18).

De plus, l’énumération dresse des défauts liés au manque d'intérêt pour autrui qui vont crescendo. De la pure indifférence à l’égard d’autrui « Il embarrasse tout le monde » (Ligne 17), l’énumération s’achève sur un défaut plus grave. En effet, le personnage serait capable de sacrifier l’humanité entière pour se préserver lui-même : « n’appréhende que [sa mort] qu’il rachèterait volontiers de l’extinction du genre humain » (Ligne 19-20).

Plus qu’un simple portrait répugnant d’un homme vorace, J. de La Bruyère, comme les moralistes du XVIIème, n’a de cesse de dénoncer les comportements nuisant à une vie sociale harmonieuse. Aux nombres des défauts souvent décriés figurent la grossièreté et l’égoïsme.

C’est donc bien un personnage sans souci d’autrui qui est dépeint ici. Mais au-delà de la description de défauts humains, il y a chez J. de La Bruyère une véritable volonté de dénoncer. Le moraliste cherche l’approbation du lecteur en utilisant sa rhétorique polémique afin d’amener le lecteur à suivre son avis. Le contre-exemple que représente alors Gnathon est tourné en dérision.

Commentaire de texte

Introduction

Les Caractères, grand œuvre du moraliste La Bruyère, offre une riche galerie de portraits satiriques. Si les lecteurs du xviie siècle voulaient y voir des allusions à des personnages réels de l'époque et faisaient même circuler des « clés », ces portraits n'en restent pas moins des observations d'une grande acuité dans lesquelles La Bruyère épingle différents vices de la nature humaine en général. Ainsi, dans le chapitre « De l'homme », le moraliste dresse le portrait de Gnathon, un être profondément égoïste, se comportant en goujat et méprisant autrui. Le personnage prend une dimension quasiment allégorique et permet à l'auteur de dénoncer, par le biais d'une caricature très satirique, l'égocentrisme. Comment La Bruyère procède-t-il pour mener la critique de ce défaut ? Nous verrons dans un premier temps que Gnathon apparaît comme un être répugnant, avant d'étudier ensuite son égocentrisme. Enfin, nous observerons comment le portrait prend une dimension générale.

I. Un être répugnant

1. Un goinfre

Le portrait de Gnathon est un portrait en actes. La Bruyère présente son personnage dans différentes situations de la vie courante et accorde en particulier une grande attention au comportement de son personnage à table. En effet, sa manière de manger occupe plus de la moitié du texte et Gnathon apparaît d'emblée comme un être répugnant et goinfre. Il semble affamé et se remplit de nourriture sans arrêt et presque sans discernement, comme le soulignent les phrases relativement longues et souvent composées de propositions simplement juxtaposées : « il se rend maître du plat […] : il ne s'attache à aucun des mets […] ; il voudrait pouvoir les savourer tous ». De même, l'accumulation de verbes suivante suggère la rapidité de Gnathon à s'emparer de la nourriture : « il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire ». Il mange ainsi de manière mécanique, presque compulsive, et comme s'il n'allait jamais s'arrêter. Alors que le fait de se curer les dents signale en général la fin du repas, ce n'est pas le cas pour lui, comme le souligne la chute de la phrase introduite par la conjonction de coordination « et » : « et il continue de manger ». En outre, Gnathon se nourrit de façon répugnante. Il mange avec les mains, fait couler les sauces partout et manque totalement de discrétion comme l'indique l'expression redondante : « il mange haut et avec grand bruit ». En fait, il est assimilé métaphoriquement à un animal : « la table est pour lui un râtelier ». Ainsi, à table, Gnathon apparaît déjà comme un personnage fort mal élevé et sans gêne, ce que confirme de façon générale tout son comportement.

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