Les classes populaires indifférentes à l'écologie ?

Les classes populaires sont-elles indifférentes à l’écologie ?

Pour répondre à cette question, nous allons nous appuyer sur un extrait de l’article « A propos de la dépossession écologique des classes populaires », paru en 2015, de Jean- Baptiste Comby. Ce dernier est un sociologue, un chercheur au Centre d’Analyse et de Recherche Interdisciplinaire sur les Médias (CARISM) ainsi qu’au Centre Nantais de Sociologie (CENS) et également un maître de conférences à l’Institut Français de Presse de l’Université Paris 2. Il travaille sur les rapports des classes populaires à l’écologie et considère que « le discours écolo oublie les classes populaires, qui n’y sont pourtant pas insensibles ».

Intégration sociale « tendue » et mise à distance de l’écologie Dévalorisation de la morale écologique et disqualification des « élites » Une dépossession des instruments de définition des visions légitimes

En matière de pollution, on constate que les classes populaires sont plus « écolos » dans leur mode de consommation que les classes dominantes. Elles en génèrent moins et sont le plus souvent celles qui en souffrent le plus. En effet, une personne riche va émettre plus de gaz à effet de serre (si elle prend l’avion par exemple) qu’une personne pauvre du fait de son train de vie.

On peut alors voir la question écologique comme une affaire de classes sociales.

Dans les classes supérieures, on va d’un côté manger bio pour faire bonne figure mais on va d’un autre côté faire des kilomètres en SUV. Les personnes des classes populaires sont donc bien souvent « écolos » à leur insu puisqu’elle n’ont pas le même train de vie et font face à des contraintes budgétaires. Elles seront plus dans l’entraide, dans la réparation et dans le recyclage.

Comme le dit Jean-Baptiste Comby, « Prendre l’environnement au sérieux reviendrait en effet à constater l’obsolescence des logiques sociales au principe de leurs privilèges ».

Bien souvent, on associe l’écologie à une préoccupation de « riches » parce que le discours écologique dominant a été produit par des classes moyennes et supérieures. Cette vision dominante de l’écologie est alors conforme aux habitudes et manières d’être de ces classes.

Les classes populaires apparaissent donc comme plus éloignées de l’écologie. Or, en réalité, les classes populaires ne tournent pas le dos à l’écologie, elles reçoivent juste de manière distante et sceptique ce discours.

Exemple de Carole, une jeune femme issue d’un milieu populaire qui, malgré le rejet d’une identité écologique, est « écolo » à son insu pour des raisons financières.

Selon elle, tant qu’il aura de grosses usines, la cause est vaine. Et donc les petits gestes écologiques qu’elle pourrait adopter n’auront aucun impact. Si elle adopte certains gestes au quotidien c’est qu’elle en est contrainte du fait de sa situation financière et non pour sa conscience écologique. Une conscience qu’elle considère éloignée des principes à partir desquels s’organisent les modes de vie financièrement limités.

Toutefois, cette mise à distance de l’écologie, ne doit pas être assimilée à une indifférence ou à une incompétence. Elle ne se sent en réalité pas vraiment légitime d’avoir une conscience écologique du fait de sa position sociale et de son intégration et préfère donc mettre à distance cette morale écologique des classes supérieures plutôt que de s’en emparer.

Pour elle, les politiques n’ont pas la bonne approche pour motiver la population à s’investir dans l’écologie car au lieu de tenir un discours pour la planète, ils devraient plutôt faire comprendre aux gens que cela peut réduire leurs coûts. Cela aurait plus d’impact parce qu’ils sont beaucoup plus réactifs lorsqu’il s’agit de faire des économies financières que de pratiquer les bons gestes écologiques.

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