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Arrêt du 26 mai 2006 : les avants contrats

Commentaire d'arrêt : Arrêt du 26 mai 2006 : les avants contrats. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  29 Octobre 2016  •  Commentaire d'arrêt  •  2 144 Mots (9 Pages)  •  976 Vues

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Arrêt du 26 mai 2006

        La nature et le régime des avant-contrats fait l’objet d’un véritable débat. Les difficultés concernent essentiellement les conséquences d’une violation de ces contrats préparatoires tant le type et les modalités de sanctions ont un impact sur la sécurité juridique des signataires. C’est par un arrêt du 26 mai 2006 que la Cour de cassation réunie en chambre mixte entend donner une réponse dans la lignée de l’avant-projet de réforme du droit des obligations à la doctrine.

Une parcelle d’un bien immobilier, attribuée par un acte de donation-partage contenant un pacte de préférence en date du 18 décembre 1957, est transmise par un nouvel acte de donation-partage du 7 août 1985 à sa destinataire, rappelant l’engagement de préférence. Cependant, cette dernière la vend quatre mois plus tard à une société civile immobilière. La bénéficiaire du pacte de préférence demande en 1992 sa substitution dans les droits de l’acquéreur et le paiement de dommages et intérêts. Ses héritiers font grief à l’arrêt (Papeete, 13 février 2003) de l’avoir déboutée de sa demande.

En leur qualité de demandeurs à l’action, les héritiers de la bénéficiaire du pacte de préférence soutiennent d’abord qu’aucun obstacle ne pouvait empêcher son exécution forcée,  qu’ainsi la cour d’appel a violé l’article 1142 du code civil. Ils avancent l’argument alternatif selon lequel la substitution constituerait l’exécution entière et adéquate du contrat, la cour d’appel ayant ainsi violé les articles 1134, 1138 et 1147 du code civil. Enfin, ils invoquent la constatation par la cour d’appel de la publication régulière du pacte de préférence avant la vente pour rendre inutile la condition de l’existence d’une faute commise par l’acquéreur posée par elle, violant alors les articles 28, 30 et 37 du décret du 4 janvier 1955.

Le problème posé à la Cour de cassation concernait alors la question de la sanction de la violation d’un pacte de préférence et plus précisément : la violation d’un pacte de préférence entraîne-t-elle la nullité du contrat formé avec un tiers et la substitution du bénéficiaire à l’acquéreur ?

La Cour de cassation rejette le pourvoi au motif que l’annulation du contrat passé avec un tiers et la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence à l’acquéreur se fera à la double condition que ce tiers ait eu connaissance lorsqu’il a contracté, de l’existence de ce pacte et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, qu’en l’espèce la seconde condition n’était pas remplie.

Il sera donc intéressant d’étudier comment ce revirement de jurisprudence rend sa force obligatoire au pacte de préférence (I) néanmoins dans une mesure décevante tant il impose des conditions de mise en œuvre pratiquement impossibles (II).

  1. Un revirement de jurisprudence attendu restaurant la force obligatoire du pacte de préférence

L’arrêt du 26 mai 2006 fait du pacte de préférence « «une préférence pour la force obligatoire » selon l’expression de Dimitri Houtcieff. En effet si l’impossibilité d’une exécution forcée rendait la nature et le régime de cet avant-contrat, controversés (A), la Cour de cassation a consacré la force obligatoire du contrat (article 1134 alinéa 1er) en posant la possibilité de substitution du bénéficiaire du pacte de préférence dans les droits de l’acquéreur (B).

  1. La nature et le régime d’un avant-contrat controversés

La négociation d’un contrat nécessite parfois d’être formalisée. On forme à cet effet des avant-contrats qui sont des contrats préparatoires autonomes au contrat définitif et qui sont de deux types : pacte de préférence ou promesse de contrat. Par le pacte de préférence, l’une des parties s’engage à proposer à l’autre en priorité la conclusion du contrat au cas où elle se déciderait à conclure ce type de contrat. La question s’est alors posée de savoir quelle sanction appliquer, si dans le cas d’une vente par exemple, elle était réalisée avec un tiers sans que le bénéficiaire du pacte ait été interrogé au préalable sur son intention de se prévaloir de son droit de préférence ou non. Pendant longtemps, la Cour de cassation n’a condamné qu’à des dommages et intérêts au regard de l’article 1142 du code civil qui stipule que l’inexécution d’une obligation de faire se résout en dommages et intérêts. De cette façon, l’impossibilité d’une exécution forcée ôte toute sécurité juridique aux avant-contrats.

D’après Denis Mazeaud, le pacte de préférence fait naître un « droit potestatif », celui d’imposer la vente par un acte unilatéral de volonté. Si la conclusion du contrat pouvait être écartée par une simple fraude alors la force obligatoire du contrat serait mise en péril.

La Jurisprudence a admis dans un premier temps, la possibilité de nullité du contrat si le tiers connaissait l’existence du pacte de préférence et l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir dans un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 10 février 1999. Seulement les partisans de l’exécution forcée du pacte de préférence attendent également la possibilité de substitution du bénéficiaire à l’acquéreur en plus de l’éventuelle nullité.

  1. L’avènement d’une possibilité de substitution du bénéficiaire du pacte de préférence à l’acquéreur au profit de l’article 1134

Dans le cas du pacte de préférence, la Cour de cassation avait fait application de l’article 1142 du code civil pour refuser toute substitution du bénéficiaire dans les droits de l’acquéreur. De cette façon, la sanction d’une violation d’un pacte de préférence par l’exécution forcée était impossible. Parallèlement, dans le cadre des promesses unilatérales de vente qui sont des avant-contrats voisins, la jurisprudence considérait que si le promettant se rétractait, le bénéficiaire pouvait obtenir la conclusion forcée du contrat car la promesse unilatérale de vente est un contrat qui entraîne un engagement irrévocable selon l’article 1134 du Code Civil. Néanmoins, la troisième chambre civile de la Cour de cassation avait fait application de l’article 1142 du code civil dans un arrêt du 15 décembre 1993 qui avait suscité une forte critique doctrinale puisqu’il n’avait pas permis l’exécution forcée en nature de la promesse. Parce qu’il surpasse le domaine des pactes de préférence d’une part et qu’il impose une innovation attendue en matière d’avant-contrat d’autre part, l’arrêt du 26 mai 2006 a une portée considérable.

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