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La justice constitutionnelle est elle compatible avec l’idée démocratique?

Dissertation : La justice constitutionnelle est elle compatible avec l’idée démocratique?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  5 Mars 2018  •  Dissertation  •  2 548 Mots (11 Pages)  •  3 182 Vues

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Dissertation: La justice constitutionnel est elle compatible avec l’idée démocratique?

Selon M. Tropper, « il existe en France une ancienne tradition d’hostilité au contrôle de constitutionnalité, jugé incompatible avec la démocratie ». En effet, pour certain il existe une véritable antinomie entre l'existence même d'une justice constitutionnelle et le modèle démocratique. Ceci demeure, encore aujourd'hui, le principal angle de contestation de la justice constitutionnelle, son degré de compatibilité avec le modèle démocratique. Cette critique peut se décliner de plusieurs manières, tantôt on met en avant le problème fondamental de la place de la Constitution au sein de l'ensemble normatif ; tantôt est soulevé le problème de la légitimité des juges constitutionnels face à d'autres organes élus directement ou indirectement par le peuple; notamment en évoquant les effets d'un tel contrôle et en avançant qu'il déboucherait sur un "gouvernement des juges" substitué à la volonté populaire.

Institué par la Constitution du 4 octobre 1958 pour être une « arme contre la déviation du régime parlementaire », affirme M. Debré, le Conseil Constitutionnel avait pour mission originelle de veiller à ce que le Parlement respecte les limites du domaine de la loi énoncées par l’article 34 de la Constitution. Mais c’est son rôle de juge constitutionnel qui prime depuis 1971 et il est aujourd’hui plutôt considéré comme l’organe chargé de contrôler la conformité de certaines normes à la Constitution. Il a pris une place grandissante dans le système politique de la Ve République, où il est présent comme dans beaucoup d’autres régimes où le peuple détient la soupe raineté et participe au pouvoir, c’est-à-dire les démocraties.

Il semble, cependant, qu’au vu de certaines considérations doctrinales, le contrôle de constitutionnalité porte atteinte au fondement même de la démocratie, à savoir la souveraineté du peuple, car celle-ci ne peut subir aucun contrôle, étant donné le caractère illimité de son pouvoir. Ainsi, si la légitimité du Conseil Constitutionnel et son action se voient mises en cause, il convient donc de s’interroger sur la compatibilité de cet organe de contrôle avec la conception de la démocratie. Nous procéderons tout d’abord, par aborder l’antinomie entre la justice constitutionnelle et l’idée démocratique (I) puis nous évoquerons la justice constitutionnelle, garante de l’idée démocratique (II)

I - Les antinomies entre la justice constitutionnelle et l’idée démocratique:

La notion de justice constitutionnelle présente des incompatibilités avec l’idée démocratique. En effet, elle est perçue comme un obstacle à la volonté générale (A) du fait de la non-légitimité de ces acteurs (B)

La justice constitutionnelle: un obstacle à la volonté générale:

1) Un obstacle à la volonté générale:

Il s'agit là de l'argument le plus traditionnel, qui était déjà employé à la fin du XVIII° siècle, pour rejeter le « jury constitutionnaire » proposé par Siéyès. Cet argument repose sur un raisonnement qui part d'une définition étymologique de la démocratie : c'est le « pouvoir du peuple » mais comment se manifeste ce pouvoir ?

Une fois admis que le principe de démocratie représentative permet de mettre en oeuvre efficacement ce « pouvoir du peuple », il en découle que les représentants du peuple expriment la volonté de ce dernier. Donc « la loi est l'expression de la volonté générale » (Article 6 de la déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789). De ce fait, la loi, élaborée et votée par des Assemblées législatives dites « souveraines », doit être logiquement considérée comme sacrée, au même titre que le peuple dont elle est la manifestation et ainsi non contrôlable.

La Constitution, en revanche, est un texte à portée essentiellement politique, qui n'a pas vocation à s'applique en tant que norme, et exprime seulement le « contrat social » sur lequel repose le régime politique du pays. Tout l'édifice normatif s'appuie donc sur la loi souveraine, et elle seule. En appliquant ce raisonnement jusqu'à son terme, permettre à une institution quelconque de contrôler la conformité de la loi votée par le Parlement à la Constitution, revient à lui permettre de censurer la volonté générale exprimée par le peuple par l'intermédiaire de ses représentants élus. Cette possibilité sera rejetée en France tout au long du XIXème siècle, et pendant une partie du XXème siècle, comme anti-démocratique.

2) Le culte de la loi:

Ce raisonnement s'appuie sur deux grands courants de la philosophie politique et juridiques différents, mais qui concordent sur ce point, et que l'on qualifie donc des «légicentristes».

Le premier est celui de Jean-Jacques ROUSSEAU, figure des Lumières, qui défend, dans « Le contrat social » (1762), l'idée que la loi est l'expression suprême de la volonté générale, et doit donc faire l'objet d'un grand respect et par voie de conséquence ne pouvait être contrôlée mais il ne connaissait pas le concept de Constitution comme norme. Par ailleurs, il relève deux textes de l'époque révolutionnaire, qui prolongent l'article 6 de la DDHC précité, en prohibant sans réserve tout contrôle judiciaire de constitutionnalité. Il cite d'abord les très connues lois des 16 et 24 aout 1790 prescrivant formellement :« les tribunaux ne pourront prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif, ni empêcher, ou suspendre l'exécution des décrets du corps législatif sanctionnés par le roi, à peine de forfaiture ». Dans le même ordre d'idées, la Constitution de 1791, prend le relai de l'article 6 de la déclaration révolutionnaire d'inspiration Rousseauiste, en son titre 3 chapitres V art.3 en réitérant : « les tribunaux ne peuvent s'immiscer dans l'exercice du pouvoir législatif ou suspendre l'exécution des lois »

Le deuxième de ces courants est celui de Raymond Carre de Malberg (1861-1935), concepteur du « positivisme étatique », pour lequel c'est l'État qui engendre la totalité du Droit, dont la loi, pour satisfaire aux besoins de l'ordre social qu'il régit. De ce fait, même si c'est pour des raisons différentes, à cause de la majesté et de la toute-puissance de l’État,

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