Souffrance Et Littérature

Souffrances et littérature Traumatisme et littérature: projet en cours

Une des leçons que la psychanalyse nous a laissées est que la "santé" narrative est de nature homéopathique et qu'elle est condamnée à la circularité: elle se nourrit de la blessure à petites doses régulières et la souffrance est une histoire sans fin vouée à la révision perpétuelle. C'est ce à quoi on n'échappe pas. Autrement dit, la mise en mots de la douleur ne la supprime pas, elle la présente selon une perspective différente et aide à vivre mieux en l'intégrant à la trame de l'existence. De même la littérature ne guérit pas vraiment le trauma, elle en propose seulement ce qu'on pourrait appeler une "circanalyse", elle offre d'autres angles d'approche, en suggère des intensités nouvelles, lui confère une intériorité et une profondeur, elle en est la quatrième dimension réfléchie, elle rend l'insoutenable plus soutenable vers un accomplissement autre. Opératrice de compassion, elle en garde la mémoire vivante, instaure une lucidité permanente tout en donnant au traumatisme le repos de la forme. "Après auschwitz/il n'y a que la poésie" écrit Jerome Rothenberg. Nous ne serions que douleur brute et passive sans les mots pour la dire et que détresse subjective pure sans la littérature pour la partager avec une certaine distanciation. Si l'on accepte l'idée d'Elias que la civilisation réside dans la manière dont la société traite les émotions, les artistes et les écrivains ont à jouer un rôle majeur dans la captation et même dans l'orientation de ce traitement car ils proposent une intelligence de l'émotion qui conforte, ils témoignent de ce qui a été inhumain et font avancer l'humanité dans la vigilance. Cette réflexion sur les interactions de la souffrance et des mots va s'appuyer sur des exemples d'œuvres francophones du 20e & 21ème siècle qui ont abordé la violence et la douleur pour défendre la littérature comme instrument de conscience et d'éveil, comme témoignage, testament, réserve de sens, résistance et révolte.

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