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Racine - La Tirade De Phèdre (commentaire Linéaire )

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Par   •  2 Novembre 2014  •  2 551 Mots (11 Pages)  •  2 137 Vues

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Racine n’a rien écrit depuis Iphigénie en 1674. Phèdre en 1677. A sûrement travaillé le plus à cette tragédie, même si occupé à d’autres choses. Conçue comme un retour à l’esprit véritable de la tragédie grecque et, à l’opposé des faciles merveilles de l’opéra, comme la démonstration du vrai sublime de la tragédie parlée : sublime de la représentation de l’irreprésentable, dans l’expression des sentiments (avouer l’inavouable en cherchant à ne pas l’avouer), sublime dans la déploration des conséquences funestes de la passion, sublime dans la peinture verbale du désastre humain. Tragédie antigalante : refus d’adoucir les crimes d’adultère et d’inceste. L’amour y est vu comme une perdition, un châtiment et non comme un moyen d’atteindre un idéal (galanterie) Scène 3 de l’acte I = première apparition de Phèdre sur scène, sous le signe de la mélancolie. Théorie des humeurs. Selon la médecine jusqu’à la découverte de la circulation du sang au XVIIe siècle par Harvey, notre corps est composé de 4 humeurs (bile, sang, phlegme, atrabile). L’équilibre de ces humeurs dans le corps détermine notre bonne santé ; si déséquilibre majeur, danger pour la santé. C’est le cas de Phèdre ici, dont l’humeur mélancolique (= atrabile) l’emporte sur les autres. Le tempérament mélancolique est le privilège des grandes âmes. Le silence de Phèdre est brisé par Œnone, sa confidente, au début de la sècne. Premier aveu de Phèdre dans la pièce, à propos de son amour pour son beau-fils Hippolyte : aveu attendu, on connaît histoire. Aveu appartient à la tradition galante. Déplacement de l’aveu de la galanterie vers la noirceur mélancolique. LECTURE Tirade qu’on étudie : moment où Phèdre fait généalogie du mal. Alternance entre prostration silencieuse et responsabilité assumée ; alternance qu’on retrouve entre les stichomythies (début de la scène) et la longue tirade de Phèdre. De plus grande musicalité des vers (voir v. 14-15 sur Ariane). Ces balancements (entre faiblesse et volonté de Phèdre) et cette musique donne la spécificité de Phèdre : tragique intérieur et de la déploration. Elle est à la fois la « fille de Minos et de Pasiphaé », c’est-à-dire d’un juge des Enfers (Phèdre souffre d’autant plus qu’elle connaît l’horreur et l’injustice de sa passion) et de celle qui a donné naissance au Minotaure (passion monstrueuse). Le progrès de l’action n’est plus le résultat d’affrontement entre personnages mais des conflits qui se déroulent à l’intérieur de la conscience d’un unique personnage. Tragédie française mute d’une tragédie d’intrigue à tragédie de caractère. Sujet de Phèdre confère une place essentielle et exclusive à l’agent humain : désir monstrueux et mensonge calomnieux. 4 mouvements ici au sens musical. Alternance repos/ inquiétude, raison / folie amoureuse. Retour sur le même « thème » (au sens musical) qu’est Hippolyte, thème entêtant pour Phèdre. 1) L. 35-44 : narration de la rencontre avec Hippolyte : au repos de sa vie maritale succède le trouble de la rencontre avec Hippolyte. 2) L. 45-56 : 1ère résolution de Phèdre, ne s’abandonne pas à sa passion, elle trouve une solution dans la religion : mais échec. 3) L. 57-72 : 2nde résolution, politique, échec aussi mais cette fois hasard s’en mêle (Thésée ramène son fils). 4) L. 73-82 : 3ème solution, tragique : suicide. Dans ces 4 mouvements, lutte de la fatalité et de la volonté. Texte : suite de résolutions prises mais qui avortent toujours. Repos jamais sûr, toujours menacé. Penser que le mot « repos » renvoie à l’ataraxie (stoïcisme) ou félicité divine (vocabulaire chrétien alors). Ce que montre la pièce de Racine est l’échec des morales de la volonté (stoïcisme principalement). Image double de Phèdre : amante furieuse, dépossédée d’elle-même et princesse digne ; esprit résolu et lucide / corps brûlant ; héroïne / rebut de l’univers, monstre. Cette dualité fait de

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Phèdre un perso tragique au plus haut point dans lequel s’affrontent les principes de civilisation et de nature, de la galanterie et des pulsions monstrueuses. Originalité de Racine est donc de placer le conflit tragique à l’intérieur même du personnage (et non plus un conflit entre 2 personnages). PROBLÉMATIQUE : comment Racine invente ici une nouvelle forme de fatalité, une fatalité interne, un tragique intérieur qui s’énonce dans et par le corps ?

Premier mouvement : l’archéologie du mal L. 35. Changement de ton (1 seul hémistiche qui annonce le thème) : marque volonté de se reprendre, prend de la hauteur. Passage au récit : généalogie. « Mal » a 2 sens : maladie ou malédiction. Mythe : « fils d’Égée » / fille de Minos et Pasiphaé. Égée : ancien ennemi de Minos, roi d’Athènes et père de Phèdre => inscription des perso dans une descendance et compréhension de leur mal par leur hérédité. Tentation de l’irresponsabilité chez Phèdre qui inscrit son amour maudit dans une longue tradition familiale. L. 36-37. Évocation d’une situation paisible (assonances + allitérations), mais situation mise en suspens par le « à peine » (l. 35). Est mariée pas fiancée (mariage = peu romanesque) ; absence de description d’un amour préalable entre elle et Thésée, comme s’il n’y en avait eu aucun ; plus-que-parfait (« étais engagée ») = ordre du révolu. Pas d’amplification sur « bonheur ». « Repos » = mot philosophique pour sérénité dans l’absence de passions. Elle n’aime pas Thésée L. 38. Passé simple : introduit une rupture par rapport au plus-que-parfait. Donne un tour politique à sa rencontre avec Hippolyte : « Athènes », « ennemi ». Ces métaphores militaires appartiennent à la tradition de la galanterie. Mais Racine les emploie ici dans un sens concret : Hippolyte est vraiment l’ennemi politique de Phèdre et dans cette guerre amoureuse Phèdre sera indirectement la cause de la mort d’Hippolyte (on peut vraiment mourir d’amour chez Racine, pas comme dans la galanterie). « Superbe » = orgueilleux, mais aussi magnifique, au-dessus des autres. On note déjà une confusion des dimensions politique et sentimental (Phèdre aime son ennemi politique). Grandiose du vers aussi avec allitération et périphrase : refus de nommer son amant.

L. 39-44. Description du trouble physique : amour s’enracine d’abord dans le corps, d’abord une manifestation corporelle. Vers 39 : rythme ternaire avec rimes internes en « i ». Rappelle « veni, vidi, vici » de César : comme pour César, il s’agit d’une conquête totale (encore métaphore politique). Cette référence indirecte à César met Phèdre dans la position de la victime, de la barbare, de l’animal = pas du côté de la civilisation

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