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Correction de commentaire : « Vous faites voir des os » - Paul Scarron

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Par   •  23 Novembre 2016  •  Commentaire de texte  •  1 772 Mots (8 Pages)  •  3 002 Vues

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Correction de commentaire : « Vous faites voir des os » - Paul Scarron

Introduction1 : Paul Scarron, auteur baroque parmi les plus amusants de son époque, le milieu du XVIIe siècle, a souvent pratiqué à travers le théâtre, le roman ou la poésie, les styles humoristiques à la mode de son temps : le burlesque, le style héroï-comique, la parodie, par exemple dans son fameux Virgile travesti. Dans ses publications de 1654, on peut lire le poème « Vous faites voir des os », qui se présente à la fois comme un sonnet et, en partie, comme un blason, s’adressant à une femme dont est brossé le portrait, avec une insistance plus particulière sur la denture2. Nous allons pouvoir étudier en quoi ce poème est conçu essentiellement comme une parodie3. Pour ce faire, nous verrons en un premier temps que Scarron reprend ici nombre de caractéristiques du sonnet amoureux et du blason tels qu’on les connaît dans la tradition. Puis nous verrons comment s’effectue le détournement parodique des modèles auxquels il se réfère.

I – Les caractéristiques du sonnet amoureux et du blason

A la lecture du poème, il semble que Scarron ait conçu son texte en s’appuyant sur deux formes poétiques à la mode dans la période baroque : le sonnet amoureux et le blason.

1) Les caractéristiques d’un sonnet. Le poème est bien constitué de quatorze vers répartis en deux quatrains et deux tercets. Les rimes féminines (-ène, -euse…) et masculines (-ancs, -ants, -fit) alternent, dans un pur respect des habitudes traditionnelles. La disposition des rimes dans les deux tercets est conforme à ce que l’on appelle le sonnet « à l’italienne » : une rime suivie puis deux rimes embrassées. Le choix de l’alexandrin est lui aussi habituel. Un autre principe du sonnet voulait que les deux quatrains et les deux tercets se différencient nettement par leur ton ou leur thème. C’est bien le cas ici, puisque, du vers 1 au vers 8 Scarron aborde essentiellement le thème des dents, alors que dans les six derniers vers l’attention est attirée sur le rire d’Hélène. Une dernière tradition est parfaitement respectée par le poète, celle qui consiste à faire du dernier vers une pointe finale, couronnement du poème : ici, ils s’agit d’un retournement de sens qui fait toute la saveur du souhait exprimé : « Pourvu que vous creviez de rire… »

2) Les caractéristiques de la poésie amoureuse. Le sonnet est fréquemment utilisé, à la Renaissance, dans la poésie amoureuse. Le prénom de la destinataire est d’ailleurs ici probablement un clin d’œil aux Sonnets pour Hélène de Ronsard, que celui-ci écrivit pour chanter l’amour qu’il portait à la belle Hélène de Surgères. Hélène connote aussi l’amour et la beauté dans la mesure où ce nom renvoie également à Hélène de Troie. Comme dans la poésie amoureuse traditionnelle, le poète s’adresse directement à sa destinataire, par l’apostrophe en fin de premier vers, par le vouvoiement respectueux : « vous faites voir », « vous riez » (vers 12)… ainsi que par des tournures injonctives aux vers 9, 10 et 13 (« fréquentez »…). Dans le vocabulaire, on peut aussi relever plusieurs éléments significatifs : « fidèle » (v.11), « mettre à vos pieds » (v.8), qui renvoie à l’attitude le l’amoureux rendant hommage à sa dame, ou encore le jeu de contraste entre le blanc et le noir dans la première strophe. Scarron multiplie donc les références formelles aux poèmes d’amour.

3) Les caractéristiques du blason. Ces références sont complétées en quelque sorte par les caractéristiques qui rapprochent les deux quatrains d’une autre forme poétique amoureuse – voire érotique – prisée à l’époque : le blason. En effet le discours, essentiellement descriptif, se focalise sur un détail du corps féminin : ici, en l’occurrence, les dents. Si Scarron utilise de fait au vers 1 le mot « os », le champ lexical de la denture (« cariées », v.4, « gencive », v.5) confirme bien à quoi nous avons affaire. De même que dans le blason traditionnel, la description – surtout visuelle comme le confirme dès le début le verbe « voir » – du détail physique se veut précise et méthodique. Le poète donne notamment des précisions sur les couleurs, avec le contraste du noir et du blanc (vers 2 et 3) ou même les connotations de rouge apportée par l’adjectif « sanglants » (v.8) ; il fournit aussi des précisions sur l’état des dents, du vers 2 au vers 5 (« entiers », « ne tiennent qu’à peine »…). Il est méthodique en particulier dans la conception de sa description du vers 2 au vers 4, appuyée sur une construction ternaire : « les uns », « les autres », « Et tous ». Ces techniques descriptives et la focalisation sur les seules dents sont bien propres au blason.

Il apparaît donc de façon évidente que Paul Scarron a bien coulé son texte dans le moule de formes poétiques très courantes en son temps : il respecte notamment la plupart des règles du sonnet, adopte la situation d’énonciation et divers traits de la poésie amoureuse, ainsi que le discours descriptif et un sujet propres au blason poétique.

I – Le détournement parodique de ces modèles

Mais au-delà des formes adoptées, le propos de Scarron est loin d’être conforme aux contenus que l’on rencontre habituellement dans le sonnet amoureux ou le blason. Son intention est parodique : il détourne avec impertinence et humour, voire avec comique, les modèles auxquels il se réfère.

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