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THÉORIE de la loi écran

Commentaire d'arrêt : THÉORIE de la loi écran. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Octobre 2022  •  Commentaire d'arrêt  •  3 338 Mots (14 Pages)  •  281 Vues

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COMMENTAIRE D’ARRÊT

La théorie de la loi-écran est une théorie jurisprudentielle selon laquelle le juge administratif refuse d’annuler un acte administratif inconstitutionnel pris en l’application d'une loi au motif qu’un tel contrôle reviendrait à reconnaître l'inconstitutionnalité de la loi. Or, cette théorie ne joue plus lorsque l’acte pris en vertu d’une loi pose des normes qui ne découlent pas nécessairement de la loi parce que cette dernière a laissé une marge de manoeuvre à l’autorité administrative. On parle alors d’un « écran transparent ». En effet, c’est ce qu’a retenu le Conseil d’État dans un arrêt d’assemblée pris en date du 12 juillet 2013, arrêt de la Fédération nationale de la pêche en France.

Le 18 septembre 2007, le Conseil de l’Union Européenne a adopté un règlement instituant des mesures de reconstitution du stock d’anguilles européennes en imposant ainsi aux États membres d’élaborer un plan de gestion de l’anguille pour chaque bassin hydrographique et de le soumettre à la Commission avant le 31 décembre 2008. De ce fait, la France a présenté à la Commission un plan de gestion le 31 décembre 2008 qui a été approuvé. Au titre des mesures de mis [pic 1][pic 2][pic 3]en oeuvre du plan national de gestion de l’anguille, un décret en date du 22 septembre 2010, relatif à la gestion de la pêche et de l’anguille, est venu autoriser les pêcheurs professionnels à pécher l’anguille de moins de douze centimètres et l’anguille argentée.

La Fédération nationale de la pêche en France fait un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’État afin de demander l’annulation du décret du 22 septembre 2010 en tant qu’il autorise les pêcheurs professionnels à pêcher l’anguille de moins de douze centimètres et l’anguille argentée. La requérante soutenait notamment que ce décret méconnaissait les dispositions de l’article 3 de la Charte de l’environnement.

Le Conseil d’État est amené à se poser la question suivante : dans quelle mesure le juge administratif est-il compétent pour contrôler la constitutionnalité d’un acte ?

Le Conseil d’État réuni en assemblée se fonde à la fois sur l’article 34 de la Constitution qui prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux de la préservation de l’environnement, et sur l’article 3 de la Charte de l’environnement qui dispose que « toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ». Il rappelle que ces dispositions ont valeur constitutionnelle signifiant ainsi qu’elles s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétences respectifs. De ce fait, le Conseil d’État retient que le législateur, le pouvoir règlementaire et les autorités administratives doivent déterminer, dans le respect des principes énoncés à l’article 3 de la Charte de l’environnement, les modalités de mise en oeuvre des dispositions prévues par cet article. Il convient ainsi que les autorités administratives qui sont appelées à préciser les modalités de mise en oeuvre d’une loi définissant le cadre de prévention ou de la limitation des conséquences d’une atteinte à l’environnement sont tenues de veiller au respect du principe énoncé à l’article 3 de la présente Charte. De plus, le Conseil d’État considère qu’il n’est pas compétent pour contrôler la conformité des dispositions législatives définissant le cadre de la prévention ou de la limitation des conséquences d’une atteinte à l’environnement au principe énoncé par l’article 3 de la Charte de l’environnement et que, par conséquent, il faut se référer à la procédure de la QPC prévue à l’article 61-1 de la Constitution. En revanche, concernant la demande du requérant, le Conseil d’État admet que le juge administratif est compétent pour vérifier si les mesures prises en l’application de la loi ont eu connaissance du principe prévu à l’article 3 de la Charte de l’environnement. C’est ainsi que le Conseil d’État a  opéré à un contrôle et a estimé que les mesures prises en application de la loi de transposition de l’article 3 de la Charte, en mettant en oeuvre l’article L. 436-11 du Code de l’environnement et l’article L 921-1 du Code rural et de la pêche, ne méconnaissaient pas les dispositions de l’article 34 de la Constitution et de l’article 3 de la Charte de l’environnement tout comme les articles 1er, 7 et 9 du décret contesté. De ce fait, le Conseil d’État vient écarter le vice de compétence du pouvoir réglementaire et rejette la demande de la Fédération nationale de la pêche en France.

Dans cet arrêt, le Conseil d’État rend un arrêt de principe et s’inscrit dans une lignée jurisprudentielle. En effet, dès lors, il était considéré qu’un acte administratif pris en application d’une loi ne pouvait pas être contrôlé par le juge administratif en raison de la loi qui fait « écran » entre l’acte et la Constitution (I). Cependant, si un acte administratif pris en l’application d’une loi émet des dispositions qui ne découlent pas de cette la loi, le Conseil d’État se considère compétent pour contrôler sa constitutionnalité en application de l’écran « transparent » (II).

I. Le rappel de la théorie de la loi-écran comme rempart au contrôle de constitutionnalité d’un acte administratif

Dans sa solution, le Conseil d’État opère un rappel de ce qu’est la théorie de la loi-écran et, en l’espèce, il constate que la loi de transposition de l’article 3 de la Charte de l’environnement devrait servir de rempart au contrôle de constitutionnalité d’un acte administratif pris en son application puisqu’elle fait écran entre l’acte et la Constitution (A). De ce fait, et toujours selon cette théorie de la loi-écran, le Conseil d’État ne peut pas contrôler la constitutionnalité d’un acte administratif pris en application d’une loi (B).

  1. L’existence d’une loi de transposition de l’article 3 de la Charte de l’environnement : un obstacle au contrôle d’un acte tirant les conséquences de son application

Le bloc de constitutionnalité désigne l'ensemble des normes de références mobilisées par le Conseil constitutionnel pour effectuer le contrôle de constitutionnalité. La décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971 qui consacre la liberté d’association reconnaît la pleine valeur du préambule. Ce préambule fait référence à trois piliers que sont la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen, le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et la Charte environnementale de 2004. Par conséquent  la Charte a valeur constitutionnelle.

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