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L'actualite des articles 1156 et suivants du code civil

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Par   •  14 Mai 2013  •  4 457 Mots (18 Pages)  •  1 038 Vues

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L’INTERPRETATION DES CONTRATS : REGARD SUR

L’ACTUALITE DES ARTICLES 1156 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL.

par Vincent EGEA

Allocataire-Moniteur

Institut d’Etudes judiciaires – Faculté de droit d’Aix-Marseille

« L’office du juriste peut

s’appeler interprétation ».

M. Villey .

Dans le Code civil, au sein du chapitre relatif à l’effet des obligations, une section V est consacrée à « l’interprétation des conventions ». Que signifie précisément interpréter une convention ? Pour Messieurs les professeurs Malaurie, Aynés, et Stoffel-Munck, « l’interprétation d’un contrat est la recherche de la volonté des parties » , nécessaire pour l’appliquer. Interpréter un contrat consiste donc à « en rechercher la signification » . Pour M. le professeur Sériaux, l'interprétation est "l'opération juridique qui consiste à définir quels sont exactement les droits et les obligations des parties aux contrats".

L’interprétation est un office particulier du juge . En effet, il ne s’agit pas seulement ici de trancher un litige, le juge doit donner du sens. Interpréter un contrat est donc une tâche particulièrement noble, puisqu’il s’agit de rendre clair un acte flou et obscur. En interprétant un contrat, le juge exerce un premier office « ordinaire » : il tranche un litige, une contestation . Il le fait en exerçant une jurisdictio , qui peut être ordinaire, quand elle porte la loi, norme générale . Cela étant, en matière d'interprétation, cette jurisdictio porte aussi sur une norme individuelle, issue de la volonté des parties : le contrat. C’est sur ce point que l’office du juge en matière d’interprétation est particulier et dépasse une mission étriquée. Cet office nécessite un juge particulièrement actif et impliqué. En effet, il participe ici d’un affinement du principe de liberté contractuelle, en complétant la carence des parties, afin de garantir la vigueur du lien contractuel. C’est en ce sens que l’on peut parler de noblesse de la mission interprétative, qui consiste à donner du sens, de la cohérence, de la précision à un acte obscur. L’interprétation est donc le triomphe du rationalisme sur l’absurdité. Pour aider le juge dans cette tâche, le Code civil de 1804 a prévu toute une série de directives d’interprétation, dans ses articles 1156 et suivants .

Le lecteur contemporain qui se limiterait à une lecture rapide de ces textes serait bien peu renseigné sur la manière dont les contrats sont interprétés en droit français. La jurisprudence a, en effet, joué ici un rôle considérable. En matière d’interprétation du contrat, on songe à la pertinence de la maxime de Portalis qui considérait que « l’office de la loi est de fixer par des grandes vues des maximes générales du droit, d’établir des principes féconds en conséquence, et non de descendre dans le détail de chaque question. C’est au magistrat et au jurisconsultes, pénétrés de l’esprit général des lois, à en diriger l'application » .

Les règles contemporaines d’interprétation du contrat ne peuvent se comprendre et s’analyser qu’en tenant compte de l’apport essentiel de la jurisprudence. Si ce constat s’impose aussi bien dans la délimitation du champ de l’interprétation (I), que dans la précision de ses méthodes (II), il est particulièrement patent dans l’étude de la portée de l’interprétation (III).

I. Le domaine de l’interprétation : le pouvoir souverain des juges du fond strictement encadré.

Plusieurs grands principes d’interprétation du contrat, que l’on peut qualifier de « classiques » ont été altérés par la pratique jurisprudentielle de l’interprétation. Le premier de ces principes concerne le domaine de l’interprétation. Par une présentation volontiers simplificatrice, on aborde souvent la question de manière très dichotomique : les juges du fond interprètent souverainement le contrat, et cette interprétation échappe au contrôle de la Cour de cassation . Cette vision ne reflète plus la pratique contemporaine de l’interprétation contractuelle, qui connaît une grande prégnance de la Cour de cassation. Si les juges du fond jouissent toujours d’un pouvoir souverain d’interprétation, le domaine d’exercice de ce pouvoir est très strictement encadré. Cet encadrement se manifeste dans le double contrôle de nécessité interprétative et de dénaturation d’une part (A), et d’autre part dans la multiplication d’exceptions au profit d’un contrôle par la haute juridiction (B).

1A. Un double contrôle

La pratique jurisprudentielle révèle une emprise plus importante de la Cour de cassation, que ne laissait pas entrevoir une vision dichotomique de la question. Lorsque les juges du fond ont donné une interprétation du contrat, qui est contestée, la Cour de cassation vérifie qu’il y avait bien une nécessité interprétative, et que les juges n’ont pas dénaturé le contrat. Dans ce double contrôle, un truchement régulier de la Cour de cassation dans la mission d’interprétation, se manifeste.

- Contrôle de la nécessité interprétative.

Les juges ne peuvent, bien évidemment, pas interpréter n’importe quel contrat. Ils doivent respecter la volonté des parties lorsque celle-ci est évidente . L’interprétation est intimement liée à l’article 1134 du Code civil. Le contrat étant la loi des parties, l’expression de leurs volontés souveraines, le juge ne saurait s’immiscer dans l’exécution contractuelle en interprétant le contrat. La « primauté de la loi contractuelle passe par sa clarté » . A contrario, le contrat obscur ouvre le champ à l’intervention judiciaire. Pour MM. Malaurie, Aynés, et Stoffel-Munck, l’obscurité peut découler soit d’une ambiguïté du contrat, soit d’une contradiction entre des clauses . Pour M. le Doyen J. Mestre et Mme. A. Laude, l’interprétation se fait lorsque les documents sont ambigus, obscurs, équivoques . L’étude de la jurisprudence de la Cour de cassation fait apparaître la notion-clef de « nécessité » interprétative. Cette nécessité interprétative est ici le critère du litige interprétatif . La formule employée par la cour de cassation est devenue quasi-systématique, voire rituelle, et illustre le double contrôle qu’elle opère. Quand elle approuve

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