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Critique du colonialisme dans Les Essais

Commentaire d'oeuvre : Critique du colonialisme dans Les Essais. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  6 Février 2020  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 151 Mots (9 Pages)  •  811 Vues

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ORAL : Critique de la colonisation dans « Les Essais »

    Introduction :

  Montaigne est un écrivain médévial français du XVIe siècle, considéré comme le fondateur des sciences humaines et historiques en langue française. Il écrit « Les Essais » en 1580. On se situe donc dans la seconde partie du XVIème siècle, juste après  la colonisation du Nouveau Monde par les Européens. On appelle Nouveau Monde le continent américain, mais aussi une partie de l'Océanie. Ce terme fut employé au XVIe siècle après la découverte de ces nouvelles régions par les Européens, appartenant par opposition à l'ancien monde. Cette période est également marquée par les guerres de religion entre catholiques et protestants dont l’évènement majeur est le massacre de la saint Barthélémy en 1572. Ces guerres, s’ajoutant aux guerres de colonisation, ont sérieusement heurté les penseurs du XVIème siècle. C’est dans ce contexte de guerre et de violence que Montaigne rédige ces textes, abordant la conquête de l’Amérique et se questionnant sur la légitimité de la colonisation. Il remet en question les mœurs des Européens, les comparant à ceux des indigènes, en faisait l’éloge de leur vie simple et naturelle. Certains penseurs de l’époque y avaient vu une raison d’optimisme, un progrès pour l’Occident, qui doit beaucoup à l’Amérique (les tomates, le tabac, la vanille, le piment, et surtout l’or). Mais Montaigne exprime surtout de l’inquiétude. Ainsi, nous pouvons nous demander en quoi Montaigne critique-t-il le colonialisme dans ses « Essais » ?

      Texte :

  • Dans cette œuvre, Montaigne fait un réquisitoire contre la colonisation. Dans l'ensemble des essais, il développe une opposition en faisant une éloge du nouveau monde et de ses hommes et la société occidentale ainsi que la colonisation. Pour justifier ces propos, nous prendrons appui sur deux extraits des essais.
  • Extrait 1

« Notre monde vient d’en trouver un autre (et qui nous répond si c’est le dernier de ses frères, puis que les Démons, les Sibylles, et nous, avons ignoré cettui-ci jusqu’à cette heure ?) non moins grand, plain, et membru, que lui : toutefois si nouveau et si enfant, qu’on lui apprend encore son a, b, c : Il n’y a pas cinquante ans, qu’il ne savait, ni lettres, ni poids, ni mesure, ni vêtements, ni blés, ni vignes. Il était encore tout nu, au giron, et ne vivait que des moyens de sa mère nourrice. Si nous concluons bien, de notre fin, et ce Poète de la jeunesse de son siècle, cet autre monde ne fera qu’entrer en lumière, quand le notre en sortira. L’univers tombera en paralysie : l’un membre sera perclus, l’autre en vigueur. » (III, 6, 1423)

  • Il prône le monde enfantin et innocent des peuples du Nouveau Monde, se suffisant à lui-même : « C’était un monde enfant » (p. 58), il fait l'éloge des indigènes, très liés à la Nature puisqu’ils ont gardé leur « naïveté » (p. 19) et leur monde était « encore tout nu au giron » de sa « mère nourrice » (p.58). Montaigne utilise souvent cette représentation anthropomorphique de « Mère Nature », car cela rejoint l’idée que l’Homme est dépendant d’elle et il considère les inventions de l’esprit humain comme des « productions de la Nature » et nie notamment la pensée que l’art ou la technique humaine puisse rivaliser avec la Nature. Montaigne caractérise ce monde enfant par le manque : l’écriture, les vêtements, le pain et le vin (des questions religieuses essentielles sont sous-entendues). L’auteur se pose une question importante : si les Cannibales sont nus et sans ressentir de la honte : est-ce parce que le péché originel les a épargnés ? Montaigne affirme que plus l’homme est proche de la Nature, mieux c’est : les hommes et les femmes du Nouveau Monde vivaient donc mieux avant que Colomb ne les découvre.
  • Extrait 2

 « Or je trouve, pour revenir à mon propos, qu'il n'y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu'on m'en a rapporté, sinon que chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage ; comme de vrai, il semble que nous n'avons autre mire de la vérité et de la raison que l'exemple et idée des opinions et usages du pays où nous sommes. Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toutes chose. (…) Ils sont sauvages, de même que nous appelons sauvages les fruits que nature, de soi et de son progrès ordinaire, a produits : là où, à la vérité, ce sont ceux que nous avons altérés par notre artifice et détournés de l'ordre commun, que nous devrions appeler plutôt sauvages. En ceux-là sont vives et vigoureuses les vraies et plus utiles et naturelles vertus et propriétés, lesquelles nous avons abâtardies en ceux-ci, et les avons seulement accommodées au plaisir de notre goût corrompu. Et si pourtant, la saveur même et délicatesse se trouve à notre goût excellente, à l'envi des nôtres, en divers fruits de ces contrées à sans culture. Ce n'est pas raison que l'art gagne le point d'honneur sur notre grande et puissante mère Nature. Nous avons tant rechargé la beauté et richesse de ses ouvrages par nos inventions que nous l'avons du tout étouffée. Si est-ce que, partout où sa pureté reluit, elle fait une merveilleuse honte à nos vaines et frivoles entreprises.Tous nos efforts ne peuvent seulement arriver à représenter le nid du moindre oiselet, sa contexture, sa beauté et l'utilité de son usage, non pas la tissure de la chétive araignée. Il me semble que ce que nous voyons par expérience en ces nations-là surpasse non seulement toutes les peintures de quoi la poésie a embelli l'âge doré et toutes ses inventions à feindre une heureuse condition d'hommes, mais encore la conception et le désir même de la philosophie. Ils n'ont pu imaginer une naïveté si pure et simple, comme nous la voyons par expérience, ni n'ont pu croire que notre société se pût maintenir avec si peu d'artifice et de soudure humaine. C'est une nation, dirais-je à Platon, en laquelle il n'y a aucune espèce de trafic ; nulle connaissance de lettres ; nulle science de nombres ; nul nom de magistrat ni de supériorité politique ; nul usage de service, de richesse ou de pauvreté ; nuls contrats ; nulles successions ; nuls partages ; nulles occupations qu'oisives ; nul respect de parenté que commun ; nuls vêtements ; nulle agriculture ; nul métal ; nul usage de vin ou de blé. Les paroles mêmes qui signifient le mensonge, la trahison, la dissimulation, l'avarice, l'envie, la détraction, le pardon : inouïes. Combien trouverait-il la république qu'il a imaginée éloignée de cette perfection. »

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