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Bts tourisme Cult G D2 2ème année

Dissertation : Bts tourisme Cult G D2 2ème année. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  28 Février 2018  •  Dissertation  •  3 160 Mots (13 Pages)  •  623 Vues

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Du Minotaure à Frankenstein, en passant par la bête du Gévaudan ou le yéti, la figure du monstre hante nos cultures et nos imaginaires. À ce sujet, Marc Aymes, Charles Ruelle et Élodie Cassan, dans un article extrait de la revue Labyrinthe, apportent une réflexion théorique très nourrie sur cet être emblématique, tandis que Michel Viegnes dans un extrait de l’essai L’Inquiétante étrangeté des monstres, s’attache à déterminer les paradoxes de ces créatures ambivalentes. Dans le même ordre d’idées, Victor Hugo, dans un célèbre extrait de son roman Notre-Dame de Paris, dresse le portrait de Quasimodo, d’une absolue laideur et pourtant acclamé et élu par la foule. Mais c’est Goya le plus audacieux, lui qui met en scène, avec un réalisme troublant, Saturne dévorant un de ses fils, un crime contre-nature perpétré par un dieu monstrueux et sanguinaire. Quels sont les différentes facettes de ces monstres et leurs rôles ?

L’étude des caractéristiques de ces créatures conduira à l’analyse de leurs ambiguïtés d’abord et des fonctions qu’ils remplissent pour terminer.

Le monstre se définit par des traits récurrents.

Tout d’abord, il se caractérise par son aspect physique repoussant. Sa laideur fait de lui un être littéralement extraordinaire. Si Aymes, Ruelle et Élodie Cassan se contentent d’affirmer que le monstre attire nos regards, Hugo et Goya vont beaucoup plus loin. Le portrait de Quasimodo est particulièrement chargé : le sonneur de Notre Dame est difforme, disgracieux, tordu, borgne, plus proche de la machine ou de l’animal que de l’humain. Son visage et son corps sont associés à une grimace. Quant au Dieu Saturne, chez Goya, il présente un corps déstructuré, des jambes difformes, un visage ahuri et terrorisé, des yeux exorbités. Ces deux portraits rejoignent les affirmations de Viegnes qui définit justement le monstre comme un être difficilement montrable, ce qui constitue une contradiction avec la notion même de monstruosité, désignant étymologiquement ce qui justement est montré. Cette inhumanité se double d’une disproportion : la peinture de Goya insiste tout particulièrement sur le gigantisme de Saturne, en créant un effet d’opposition avec le corps, minuscule, de sa victime. Sur le même registre, Hugo assimile Quasimodo à un géant, ce qui en souligne sa taille impressionnante.

En outre, la laideur physique du monstre se double d’une laideur morale. Si Viegnes souligne son aptitude à dégrader la réalité, le collectif d’auteurs affirme, quant à lui, que le monstre propage une forme de désagrégation générale. Dès lors le monstre apparaît bien comme celui qui subvertit irrémédiablement l’ordre et ce, de façon complètement délibérée. Le monstre est tellement autre, différent, qu’il incarne la barbarie. Le texte rejoint ici Goya : seul le peintre parvient à ce degré exceptionnel de cruauté sanguinaire, mettant en scène l’infanticide de Saturne, d’autant que les couleurs, où domine le brun, suggèrent, par connotation, le mal. Hugo, pour sa part, rappelle indirectement cette immoralité du monstre et s’il est qualifié de « méchant », c’est plus par habitude ou croyance populaire qui associe la beauté au bien et la laideur au mal. Les préjugés ont la vie dure et, au Moyen-Âge, beaucoup croient encore que le monstre est le diable.

Toutefois, la force du monstre est largement atténuée par le fait qu’il est renvoyé presqu’exclusivement à notre imaginaire. Goya représente un personnage tout droit sorti de la mythologie : Saturne n’existe que par les récits que l’on fait de son histoire. Le monstre est renvoyé dans une Antiquité rassurante. De même, Hugo dit avoir du mal à peindre avec justesse Quasimodo et termine sa description impossible en invitant son lecteur à rêver ce personnage, tant il semble invraisemblable. Viegnes cite Boileau pour nous inviter tout pareillement à imaginer de façon inoffensive le monstre et propose la médiation de l’art pour y parvenir sans danger. Mais c’est surtout le collectif d’auteurs qui renvoie le monstre au domaine artistique, au rêve, autrement dit à une existence surtout chimérique. Et si le monstre n’était que le produit de notre imagination féconde, comme certaines époques l’ont cru ?

Le monstre présente donc des caractéristiques assez attendues, mais est-il un être aussi simple qu’il y paraît ?

Par-delà des traits assez caricaturaux, la créature monstrueuse se définit aussi par un certain nombre de paradoxes.

En premier lieu, si le monstre semble souvent relégué dans notre imaginaire, il est aussi étrangement présent dans sa réalité, comme un être entre deux mondes. Ainsi, Saturne prend forme humaine, disproportionnée certes, mais reconnaissable. Son corps tordu rappelle son humanité, il possède un nom, est identifiable par un récit. De même, chez Hugo, Quasimodo est précisément nommé, reconnu par la foule assemblée, même s’il est l’objet de quolibets et autres moqueries, d’autant que pour parler du monstre, il faut tout de même utiliser des mots usités : même s’il est un être imaginaire, le monstre nécessite un vocabulaire bien réel pour être décrit. L’inédit use des mots de tous les jours, ce qui constitue d’ailleurs pour Viegnes une façon efficace pour apprivoiser l’image du monstre. Victor Hugo, de son côté, emploie de nombreuses comparaisons pour chercher un équivalent verbal à l’étrangeté de son personnage bossu. Autrement dit, le monstre imaginaire n’en requiert pas moins des mots bien réels pour être représenté.

Le second paradoxe de ce personnage énigmatique est qu’il oscille entre le bien et le mal. Ainsi, le personnage du bossu, par sa laideur, est immédiatement interprété par la populace comme un être malfaisant, répondant ainsi aux stéréotypes d’une époque qui associe la beauté avec le bien et donc la laideur avec le mal. Mais Hugo met en garde son lecteur contre ces préjugés, traitant son personnage de « pauvre diable », ce qui suscite plutôt la compassion que la méchanceté. La monstruosité tient à nos jugements et n’est pas inhérente aux formes diverses qui existent dans la nature, sans jugement quant à elle. Aymes, Ruelle et Élodie Cassan soulignent d’ailleurs que c’est l’interprétation humaine qui crée les monstres. Et l’homme actuel a tendance à voir des monstres dès qu’il se trouve confronté à un fait extraordinaire, dès lors que les catégories traditionnelles sont dépassées, que les normes ne sont plus respectées. Viegnes, lui aussi, souligne toute l’ambiguïté de cette créature, destinée à nous faire peur tout en

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