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Thérèse Raquin /

Dissertation : Thérèse Raquin /. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  12 Décembre 2021  •  Dissertation  •  2 701 Mots (11 Pages)  •  2 093 Vues

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                                Dissertation sur Thérèse Raquin

Sujet : « Quand je lis un roman , je le condamne si l’auteur me paraît manquer du sens du réel » écrit Émile Zola dans son essai Le roman expérimenta. Pensez vous que la seule fonction d’un roman soit d’imiter le réel ? Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur votre lecture de Thérèse Raquin.

        Treize ans après avoir écrit Thérèse Raquin, sa première œuvre réaliste, Zola théorise l’esthétique naturaliste dans son essai treize ans après avoir écrit Thérèse Raquin, sa première œuvre réaliste, Zola théorise l'esthétique naturaliste dans son essai Le Roman Expérimental où il prône l'écriture d'une expérience humaine qui obéit aux lois biologiques de Phérédité et au déterminisme social. Il refuse donc l'idéalisation et l'imagination au point d'écrire : « Quand j'ai lu un roman, je le condamne, si l'auteur me parait manquer du sens du réel ». Toutefois s'il relisait son premier roman, Zola pourrait peut-être le « condamne(r )» dans la mesure où le « sens du réel » ne semble pas toujours être privilégié par le romancier, si bien qu’on peut se demander si l’imitation du réel est le seul objectif dans Thérèse Raquin. Dans un premier temps, on montrera que Zola a le soucis de l’imitation du réel a travers le prisme du naturalisme. Cependant. on verra que le romancier s’est aussi préoccupé d'élaborer une fiction susceptible d'intéresser le lecteur.

        Zola plonge le lecteur dans un univers réaliste, peuplé de personnages ordinaires influencés par leurs milieux et leur hérédité.
        Premièrement, Zola, fidèle à sa méthode d'écriture naturaliste, prend soin d'instaurer un contexte réaliste. En effet, par le biais de lieux existant dans la réalité tels que « la Rue Guénégaud » «le Passage du Pont Neuf» (chapitre 1), l'auteur va permettre au lecteur de se représenter le cadre du récit dès l'incipit. De plus, l'auteur évoque la rue Saint Victor (chapitre 6) où il a vécu en 1960. Cela contribue à accentuer la vraisemblance car Zola a le souci d'incorporer des lieux de son passé à son œuvre, favorisant l'ancrage dans le réel. Deuxièmement, la tournure impersonnelle « lorsqu'on vient des quais, on trouve le passage du Pont Neuf » ajoute un effet de présentation du lieu, le pronom personnel indéfini « on » suggérant le cheminement d'un passant qui nous ferait presque une visite guidée. Cette idée est soutenue par les adverbes de lieux « à droite » et « à gauche » aidant à la représentation spatiale et ne font que renforcer cette impression d'être guidé dans les étroites ruelles de Paris qu'a un jour fréquenté Zola. Troisièmement, le romancier naturaliste fait en sorte que le lecteur se représente la réalité grâce a des descriptions que certains pourraient qualifier de « putrides ». Ainsi, le passage où se trouve la boutique de Madame Raquin est « un véritable coupe-gorge [...] ; on dirait une galerie souterraine vaguement éclairée par trois lampes funéraires ». La métaphore « coupe-gorge » insiste sur le danger de cette rue ainsi que sur son caractère mal famé. La métaphore filée du tombeau donc de la mort, « galerie souterraine vaguement éclairée par trois lamps funéraires», illustre bien le caractère lugubre et sordide qui est donné à la description du passage, comme si les homes qui y habitaient croupissaient à la lumière mourante des chandelles. Ainsi, le lecteur conçoit le quartier où se déroulera l'essentiel du récit comme un mouroir, sentiment amené par une écriture naturaliste se souciant de retranscrire la réalité telle quelle, aussi rude soit elle.

        De même, afin de parfaire l'imitation du réel, Zola a décidé de mettre en scène des personnages ordinaires, en tout cas à première vue. Effectivement, on retrouve une situation familiale plutôt commune avec une vieille femme (Madame Raquin), sa nièce (Thérèse), l'époux de cette dernière (Laurent), son meilleur ami et collègue de bureau (Camille), et même un chat (François). Nous avons donc un petit foyer banal et pauvre dans une rue étroite de Paris.

        Deuxièmement, même l'entourage de cette famille est tout à fait commun. En effet, lors des « soirées du jeudi » (chapitre 4) nous assistons à l'arrivée de trois nouveaux personnages dont le nom et le métier n'ont rien d'extraordinaire (le commissaire de police Michaud, Olivier, commis principal, et Grivet, collègue de travail de Camille). De plus, Zola choisit de ne pas idéaliser les personnages qu'il crée : « le vieil ami (de Madame Raquin], le commissaire de police […]étalait une face blafarde, tachée de plaques rouges », son fils Olivier « un grand garçon de trente ans , sec et maigre, qui avait épousé une toute petite femme lente et maladive» sont affectées d'une description rebutante, établie par les adjectifs qualificatifs péjoratifs . De ce fait, nous sommes bien loin d'un profil de héros ,souvent attribué aux personnages principaux d' un roman, Troisièmement, le fait que tout de cercle d’ amis se réunisse le jeudi renforce l’idée de banalité car on note la présence d'une routine dans laquelle ils s'enferment (au grand dam de Thérèse pour qui « les soirées du jeudi étaient un supplice»; Par ailleurs, le récit qui en est fait n'établit pas un cadre plaisant car, en plus des descriptions péjoratives des personnages, leurs activités se bornent à jouer aux dominos dans une ambiance sordide : « Après chaque partie, les joueurs se querell(en]t pendant deux ou trois minutes, puis le silence retomb(e], morne, coupé de bruits secs.» L'adjectif « morne » nous indique bien que l’atmosphère régnant chez les Raquin lors de ces soirées est assez pesante. De plus, il y a cette idée de silence qui vient accentuer le caractère sans ambiance des parties. Ainsi, nous avons des personnages en tous points ordinaires obéissant à une routine et s'adonnant à des activités simples. Zola va ainsi pouvoir les faire vivre en les confrontant les uns aux autres comme de vulgaires produits chimiques qui révéleront alors progressivement leurs tempéraments violent, déterminés par la Passion.
        Afin d'imiter le réel. Zola part du principe que les agissements des personnages sont conditionnés par leur passé et leur environnement. Thérèse en est une excellente démonstration. Elle « (est) née à Oran [en Algérie) et [..] avait pour mère une femme indigène d'une grande beauté » (chapitre 2). Ainsi, par hérédité, coule dans ses veines du sang africain qui la rend forte de telle sorte que « lorsqu'elle avance un pied, on sent) en elle des souplesses félines, des muscles courts et puissants »., Par conséquent, la métaphore « souplesses félines » et les adjectifs qualifiant ses muscles de « courts et puissants »laissent penser que Thérèse a une condition physique affûtée et qu' elle serait faite pour mener une vie active. Cependant, Zola va créer comme une cage dans laquelle contenir la nature bouillonnante de Thérèse en la confrontant à un milieu calme, more et routinier. En effet, « Thérèse grandit.. sous les tièdes tendresses de sa tante ». comme étouffée par la vie doucereuse que lui faisait mener madame Raquin. Effectivement, l'adjectif péjoratif « tiède » témoigne du caractère écœurant des bontés de la tante. Zola montre également que Thérèse est influencée par un autre milieu : le passage du pont Neuf. En effet, la boutique miteuse de la rue Guénégaud métamorphose Thérèse en achevant de refouler ses instincts, allant même jusqu'à transformer ses envies puisqu' « elle préfèr(e) demeurer oisive, les yeux fixes, la pensée flottante et perdue ». La voilà ainsi apathique, presque déshumanisée, comparable à une statue, d'une « humeur égale et facile », « toute sa volonté tend[ant) à faire de son être un instrument passif ». Zola cherche à illustrer l'idée naturaliste selon laquelle les êtres humains sont impactés par leur environnement, aussi bien physiquement que moralement. Pour finir, c'est au contact de Laurent que Thérèse va également réagir, cette fois d'une façon totalement différente. Lors des rendez-vous où elle retrouve Laurent la passion ressurgit du fond de son être et se déverse telle de la lave: « On eût dit que (...] des flammes s'échappaient de sa chair. Et, autour d'elle, son sang qui brûlait, ses nerfs qui se tendaient, jetaient ainsi des effluves chauds. » (chapitre 7). Cette métaphore filée autour du feu montre bien le tempérament torride er instable de Thérèse qui libérée entre les bras de son amant, retrouve la fougue de son atavisme indigène. Ainsi, s'établit le déterminisme zolien, caractérisé par un milieu où un réactif, ici Laurent, agit sur Thérèse et conditionne ses actes.
        Nous avons jusqu'alors démontré les aspects naturalistes de l'œuvre en nous appuyant sur l'illusion du réel et la création de personnages ordinaires, déterminés par leurs milieux et leur hérédité. Toutefois le plaisir du lecteur ne se limite pas à la dimension réaliste, il se nourrit aussi de la construction d’un faux roman policier, de l’apparition du fantastique ainsi que de la dimension tragique.
        Zola met en œuvre des procédés narratifs visant à soutenir l’intérêt du lecteur: une intrigue dotée de suspense, des éléments pouvant être interprétés de deux façons différentes , et des personnages suscitant l’effroi et la pitié du lecteur.
        Bien que le caractère réaliste du roman donne l'illusion du vrai, le récit n'en est pas moins une fiction destinée à plaire au lecteur. En effet, on retrouve des éléments attractifs, caractéristiques du roman policier. Tout d'abord les meurtriers et leur victime, qui forment le triangle classique mari, femme et amant, offrant ainsi le mobile du crime : l'adultère. Il y a également le décor, dans lequel les protagonistes vont évoluer tout au long du récit, en l'occurrence un cadre urbain, sombre et tortueux se révélant propice au crime : « des boutiques obscures, basses, écartées, laissant échanger des souffles froids de caveaux. » Cela témoigne bien du caractère malfamé et dangereux du quartier ou un meurtre n'étonnerait pas. Zola met ainsi en œuvre tous ces éléments pour constituer la base d’une intrigue policière, donc typique de la fiction. Évidemment, pour que le récit puisse ressembler à un roman policier il faut un crime. Ici, il s'agit de celui de Camille par Laurent, mais ce meurtre est bien particulier, n'ayant pas de témoin ll est considéré comme parfait. Or, ce genre d'événement est extrêmement rare surtout dans le cas d'une noyade sur la Seine qui, en principe présenterait au moins un témoin. Cette situation plutôt improbable a quelque chose de romancé. Enfin vient un autre élément indispensable au roman policier : les policiers. Dans le cas de notre œuvre, ils ne jouent pas un rôle valorisant ou décisif étant donné l'absence d’enquête. On peut même les percevoir comme particulièrement incompétents lors de la scène ou Madame Raquin, presque paralysée intégralement, essaye d'écrire sur la table avec son doigt le nom des meurtriers. En effet.: « Grivet (.) affirma que [madame Raquin) ne pouvait le regarder sans qu'il comprit sur-le-champ ce qu'elle désirait. » Cependant « à chaque fois il se trompait » (chapitre 26) « Ainsi, je comprends : elle dit que je fais bien de poser le double-six. » Cela prouve bien l'ironie avec laquelle Zola met en scène les policiers puisque ceux qui devaient initialement trouver les criminels empêchent la vérité d'éclater. Ainsi, le lecteur peut se laisser prendre à cette scène qui présente humour et suspense.
        Par ailleurs, pour élaborer une fiction susceptible d'être appréciée par le lecteur, Zola ménage chez ce dernier une hésitation entre l'interprétation surnaturelle et rationnelle. Ainsi l'apparition du «spectre de Camille (qui] vient) de s’asseoir entre les nouveaux époux » lors de la nuit de noce(chapitre 21), effraie le lecteur et lui fait penser qu'un revenant est réellement dans la chambre, cet univers clos et nocturne qui renforce le sentiment de terreur. D autant que le portrait semble s'animer. Toutefois, plutôt que de croire à cette interprétation irrationnelle, le lecteur est porté à penser que le personnage souffre d'une hallucination, dans la mesure où il n'est pas dans son état normal et que sa vision est faussée par sa défaillance psychologique qui altère sa perception des chose. Cette possibilité que les événements soient interprétables de deux façons différentes témoigne bien de la présence du fantastique, élément spécifique à une fiction dans laquelle le lecteur va trouver un intérêt divertissant. De plus, Zola veille à maintenir le lecteur en haleine avec la tension créée par l'alternance entre des scènes fortement surnaturelles et des scènes plus réalistes. Ainsi, le meurtre de Camille pressente une dimension intensément fantastique du fait de la morsure sur le cou de Laurent qui fait sonner à celle d’un vampire , d’autant plus qu’elle ne guérit jamais, fessant ainsi penser à la marque de caïn, le premier meurtrier dans la Bible. Mais cette scène contraste avec celle de Laurent qui se bourre de gâteaux le soir même du crime pendant que le vieux Michaud va annoncer la nouvelle à Madame Raquin. Par conséquent, les oscillations fantastiques nourrissent la fiction et entretiennent l'imaginaire et l'intérêt du lecteur.
        Mais le fantastique se double de tragique, tout au long des étapes du schéma narratif, typique du roman. En effet, on retrouve premièrement, une situation initiale avec un triangle amoureux inspirant de la pitié du fait de l'apparence délabrée de Camille ainsi qu'un cadre effrayant : boutique miteuse et rues sales. Ensuite, l'élément déclencheur qu'est le crime odieux provoque un effroi typique du tragique chez le lecteur. Puis viennent les péripéties qui regorgent d'éléments pouvant susciter l'horreur comme par exemple la description de la morgue ou encore la scène d'hallucination avec le portrait de Camille. Pour finir, le dénouement se présente comme un dilemme où les personnages hésitent entre s’entre-tuer ou se donner la mort. Le dilemme se résout par le double suicide des protagonistes, ce qui procure chez le lecteur à la fois de l'horreur car il s'agit d'une scène témoignant d'une suprême crise de nerf, et de la pitié vu qu'on comprend que toutes leurs manigances n’ont abouti qu’à un funeste destin. En effet, le roman se conclut sur le sort fatidique des protagonistes qui purgent leurs passions, trouvant le réconfort dans la mort, cette dernière envisagée comme la seule échappatoire aux remords qui les hantent depuis leur crime. Ainsi on note la présence de la catharsis, traduite par l'idée de purgation des passions, qui, une fois encore est un élément propre au tragique. Par ailleurs, le tragique de ce roman tient également à la représentation pessimiste que Zola fait de la nature humaine. En effet, au travers des personnages, sont mis en lumière les travers et les vices de l'Homme. Ainsi, Thérèse semble incarner la luxure avec ses envies bestiales dues à son hérédité et Laurent la paresse dans la mesure où il profite des Raquin pour être logé et nourri. Par conséquent le lecteur retrouve dans ce roman des éléments typiques de la tragédie.

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