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Etude de texte: Incendies

Étude de cas : Etude de texte: Incendies. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  25 Avril 2019  •  Étude de cas  •  1 661 Mots (7 Pages)  •  1 466 Vues

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I- Des identités brisées

A- La folie en héritage?

B- Ambivalence de Simon

II- Un tragique revisité

A- Le refus du pathos

B- L'oralité

I- Des identités brisées

A- La folie en héritage?

Au théâtre, pour un personnage, dire, c'est exister. Il est donc logique que les morts secaractérisent par le silence (même si dans Littoral, le père mort de Wilfrid est très bavard). MaisIncendies est placé sous le signe des dernières paroles de la mère. Derniers mots écrits(testament), qui témoignent de qqch (testament et témoignage = même origine). Mais avant de mourir, Nawal était silencieuse: elle a passé «Cinq ans sans parler» (l.22). Unsilence inexpliqué (« du jour au lendemain» l.21) et qui choque son fils, ce que souligne lagradation «Plus une parole, plus un son, plus rien ne sort de sa bouche!» (l.22-23). Ce silence estinterprété par S. comme un signe de folie: pour lui, Nawal n'est pas «quelqu'un qui a encore toutesa tête» (l.24). Mais le lecteur / spectateur, lui, suppose rapidement un traumatisme et imagineaisément une explication psychologique à ce silence soudain, notamment à cause de la mentiondes «procès sans fins de tordus, de vicieux et d'assassins de tous genres» (l.20-21) auxquels aassisté Nawal pendant 10 ans. silence traumatique? Mère qui met à distance ses enfants: refus de les nommer «mes enfants»; «fils» ou «fille»(l.9) Comme si elle refusait le lien filial qui les unit. Nawal écrit «La jumelle le jumeau, enfantssortis de mon ventre»(l.10): le possessif «mes» est remplacé par l'article («la jumeau») oul'absence d'article («enfants»). La dernière formulation est particulièrement dure: «sortis demon ventre»(l.10)comme si la naissance avait eu lieu malgré Nawal, contre la volonté, commesi son «ventre» n'était + une métonymie pour désigner sa maternité, mais une partie presqueautonome de son corps. Nawal confie à ses enfants, ds son testament, une dernière demande, requête qui est une quête:«Retrouve ton père et ton frère!» (l.6) Mais Simon se met en colère: «Pourquoi elle les a pasretrouvés elle-même si c'était si urgent!? Tabarnak!» (l.6-7) Citation des mots de la mère,reprise ironique. + la question, rhétorique mise en doute de la légitimité + véracité de la quête(donc de la tragédie, qui est constituée de la quête). Soupçon de mensonge.

« putain de testament» (l.8) insulte le dernier message de la mère. Grossièreté violencelangagière.

B- Ambivalence de Simon

«Pourquoi elle s'est pas un peu occupée de nous, la crisse, s'il lui fallait absolument un autre filsquelque part?! « (l.7-8) = jalousie fraternelle, si importante ds la tragédie (cf Eteocle et Polynice inAntigone) ou la culture judéo-chrétienne (Abel et Caîn). C'est selon Aristote un ressort essentiel dela «pitié» du public. L'adverbe «absolument» et le verbe impersonnel «il fallait» fatalité de la fraternité, bien loinde la réalité. Dans «L'incendie de Nawal» on apprend en effet que ce premier frère, trop tôtarrivé (Nawal n'avait que 14 ans, comme Juliette, et comme elle amoureuse en secret) n'était passpécialement désiré, qu'il était un accident. Au point qu'il a été abandonné. En termesdramaturgiques cependant, l'intuition de S. est juste: la naissance de ce 1° fils déclenche bien lemécanisme de la fatalité, de la tragédie, va déterminer toutes les péripéties suivantes. Simon se sent menacé par cet «autre» (l.7), lui qui croyait être le seul fils. «Pourquoi?!» (l.12) +tous les «pourquoi» (5) + la ponctuation violente incompréhension, confusion, interrogationdésespérée, colère. Face au refus de Nawal d'assumer le lien maternel qui l'unit à eux (marqué parle refus d'écrire «mes enfants»), Simon se drape dans l'hyperbole: «comme si on était un tas devomissure, un tas de merde qu'elle a été obligée de chier!» (l.11-12) Ubris.

II- Un tragique revisité

A- Le rejet de l'héritage

La notion d'héritage, d'hommage rendu aux morts, est essentielle ds la tragédie: Antigone chezSophocle (ou Anouilh) meurt justement pour avoir voulu rendre hommage, malgré les lois injustesdes hommes (du tyran), à son frère mort. Le respect dû aux morts, et surtout à ceux de sa famille,est assez important pour mériter son sacrifice... Dans la tragédie l'héritage, bien souvent, c'est la malédiction (voir Œdipe, et toute la famille desAtrides) le refus de l'héritage = refus de la malédiction familiale = refus de la tragédie. Or onverra par la suite que S. ne peut pas refuser la malédiction de Nawal, quoi qu'il fasse, il est sondescendant, il hérite de ses fautes / de ses tourments. Or: « C'est la meilleure, celle-là! Sesdernières volontés!» (l.5) ironise sur le testament = le refuse. «Je ne lui dois rien, à cettefemme-là!» (l.2-3) refus de la dette (« Je ne lui dois rien») + mise à distance avec ledémonstratif «cette» + «femme-là» = S. refuse, en cet instant, de dire «ma mère», parce qu'unetelle expression implique un rapport filial, un héritage. «J'en veux pas de son argent, j'en veux pasde son cahier...» (l.4) S. ne veut pas hériter de sa mère. Le possessif «son», répété 2 fois,insiste sur la mise à distance (S. ne s'approprie pas les objets qui lui reviennent).

B- Le refus du pathos

Alors que la mort est souvent l'horizon de la tragédie, ici, elle en est l'ouverture. La piècecommence ainsi avec l'annonce de la mort de la mère – comme Littoral commence avec l'annonce

burlesque de la mort du père, Forêts avec la condamnation de la mère à cause de son enfant. Ladisparition des parents, qui doivent céder la place à la génération suivante (thème de Ciels) estdonc centrale dans la tétralogie de Wajdi Mouawad. S. prend la mort de sa mère et son testament comme 1 offense perso: « Si elle pensem'émouvoir» (l.3-4) = il imagine qu'elle le manipule et cherche à provoquer son émotion, ce qu'ilrefuse. «Je vais pas pleurer! Je vous jure que je vais pas pleurer!» (l.1) + «Pas une larme, rien!»(l.3) le rejet des pleurs = refus de pleurer la morte, refus du pathos, par Simon mais aussi parl'auteur. L'attitude de S. en effet ne suscite pas notre pitié, alors que s'il était effondré et en larmescela provoquerait probablement notre compassion. «Elle est morte! Hey!» pas d'euphémisme(voir Mme de Chartres in LaPrincesse de Clèves) + interjection pas de pathos. «On s'en crisse-tuqu'elle soit morte!» (l.2) rejet violent de la tristesse du deuil, déni. On peut parler de déni,puisque la colère de S. est une expression de sa douleur. «On dira bien ce qu'on voudra! Que jen'ai pas pleuré à la mort de ma mère!» S. sait que ne pas pleurer sa mère = 1 crime. CfL’Étranger de Camus. Hermile essaie de compatir à la douleur de S.: «C'est pas tous les jours qu'on apprend que notrepère que l'on croyait mort est encore vivant et qu'on a un frère quelque part dans le monde!»(l.15-6) Les pronoms persos + le possessif montre qu'il partage sa peine, em-pathie. Mais rejetviolent par S. de la compassion d'Hermile: «Écoutez, je comprends! SIMON: Qu'est-ce que tupeux comprendre, tête de gland!» (l.13-14) = rejet de l'empathie (donc aussi de celle du public). C- L'oralitéComme Antigone, S. s'oppose à la loi des hommes (non pas un oukaze royal mais une décisionnotariale, XXe s oblige) et comme elle il veut obtenir pour qqn de sa famille un enterrementdécent: «On va l'enterrer et c'est tout!» (l.17). Mais ici le registre de langue (pronom «on» +expression très orale «c'est tout», comme un caprice) dégradation du motif tragique. +énumération qui suit: « on va acheter un cercueil, on va la mettre dans le cercueil, mettre lecercueil dans le trou, la terre dans le trou, une pierre sur la terre et son nom sur la pierre» (l.17-19) liste avec reprise du terme pré-cité on dirait une comptine. + conclusion qui semblegrossière: «et on décrisse toute la gang!» (l.19)«Putain! Câlisse d'hostie de crisse de fuck, de fuck, de fuck» (l.26) transgression quereprésentent des mots aussi grossiers sur 1 scène de théâtre + écho dans la réplique suivanted'Hermile Lebel (au «fuck» X 3 il répond «C'est sûr, c'est sûr, c'est sûr» l.27) comique.De + on a vu qu'Hermile = chœur antique. Il est aussi un oracle, qui rapporte les paroles de lamorte(«Et elle dit quoi? Elle dit» l.36), en souligne l'importance («C'est pas habituel commephrase!» l.38) Mais en répétant la phrase rapportée deux fois, il créé comme un hiatus, unbégaiement( «Maintenant que nous sommes ensemble ça va mieux.» «Maintenant que noussommes ensemble ça va mieux.» l.36-7). + il y ajoute une interjection («Hey!» l.41) + citationimaginaire de mots que la morte n'aurait pas prononcé: «Elle n'a pas dit: ''Coudonc! Jemangerais bien un hot-dog oignon, relish, moutarde'', ou bedon: ''Passez-moi le sel!''Non!»(l.38-9) prosaïse la citation. Le choeur essaie d'entraîner le lecteur / spectateur dans une compréhension commune de laphrase mystérieuse: «Vous le savez, je le sais, on le sait tous» (l.42) mais il conclut cet appel à

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