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Système des personnages

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Par   •  27 Avril 2020  •  Cours  •  3 103 Mots (13 Pages)  •  455 Vues

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LE SYSTEME DES PERSONNAGES DANS HERNANI

Les personnages de la pièce s’intègrent dans un mécanisme de substitution assez systématique pour être signifiant et dans un effet miroir qui joue du parallélisme ou de l’inversion.

-L’étude de la présence des personnages d’Hernani et Don Carlos sur scène le démontre. Don Carlos apparaît I, sc 1, II,1, IV,1, quand Hernani apparaît I,2, II,3, IV,3 ; D C est donc le premier sur scène. Inversion : Don Carlos apparition tardive acte III,3 quand H. apparaît III,2. En revanche, Hernani clôt les actes I (monologue), II, III, et V alors que Don Carlos est absent de ces dernières scènes et qu’il achève dans un monologue l’acte IV. Dans ces dernières scènes les paroles ou l’action d’Hernani annonce l’acte suivant ou prépare inconsciemment le dénouement tragique.

Hernani, personnage principal et éponyme n’apparait qu’en 2nd : ce n’est pas une pratique nouvelle dans la littérature, cf Ulysse ne faisant son apparition qu’au chant V de l’Odyssée, Tartuffe à l’acte III de la pièce éponyme de Molière. Accorde plus d’importance au personnage, dont on parle dans les scènes précédentes. C’est bien le cas pour Hernani, acte I et II. Bien plus, Don Carlos usurpe sa place auprès de Dona Sol dans ces deux scènes, il usurpe l’action d’un brigand et non un pouvoir politique qu’il possède déjà (renversement moral). Effet de substitution accentué par le costume, chapeau rabattu, ample manteau noir qui participe à la confusion de l’identité, qui participe au travestissement. Effet de miroir inversé qui joue du clair-obscur, qui incarne d’une certains manière un oxymore : un roi vil, veule, un roi brigand qui remplace un sublime brigand. Effet de plein et de vide. Absence d’Hernani remplie par Don Carlos. Etrange usurpation dans le crime qui est analogique d’une usurpation de pouvoir. Un personnage qui appartient à la sphère du pouvoir, du collectif, se comporte en brigand dans la sphère morale et privée. Ce mécanisme intervient dans l’intrigue amoureuse et fait de ces personnages des personnages de vaudeville. C’est presque une caricature de vaudeville, une farce : il ne s’agit pas seulement d’un amant mais de deux amants rivaux pour l’amour de Dona Sol, chez un futur époux. (mélange des registres, satire du pouvoir à travers la figure bouffonne du roi).

Renversement encore acte II : Don Carlos joue les ravisseurs de jeune fille, les corrupteurs, accompagné de ses conseillers, tous nobles devenus à leur tour des brigands comme la troupe commandée par Hernani, et celui-ci joue le rôle du héros sauveur. Don Carlos ajoute à la veulerie, à l’immoralité la tyrannie lorsqu’il use des instruments de son pouvoir royal pour poursuivre Hernani à la fin de l’acte comme fugitif. Il reprend son statut de roi pour servir une vengeance personnelle, quand Hernani sert une vengeance d’ordre familiale et politique et incarne le défenseur moral d’une jeune fille (n’oublions pas cependant qu’il est amant et non époux). A Hernani la grandeur, l’honneur et le sublime, à Don Carlos la vilénie, l’immoralité. Il est incapable de se maîtriser (contrairement à la figure du pouvoir incarnée par Auguste dans Cinna de Corneille). On penserait plutôt à la figure de Néron dans Britannicus de Racine.

La question du nom est fondamentale : système d’opposition, de renversements encore. Don Carlos ne révèle son nom I,3 que pour s’extirper d’une situation gênante et ridicule, pour éviter la vengeance d’un époux et reprendre son rôle de roi. Il prend alors le prétexte d’un événement politique majeur : la mort de Maximilien, empereur d’Allemagne, source de l’intrigue politique de la pièce. Renversement de la hiérarchie des intrigues : l’intrigue politique au service de l’assouvissement du désir de Don Carlos pour Dona Sol. (contrairement au choix du Cid chez Corneille).

Importance du costume : ouvrir son manteau ou s’en défaire matérialise la révélation : geste théâtral. A l’inverse, dans cette scène Hernani ne se dévoile pas au duc. Il reste caché. Son manteau ne cache pas un habit royal mais les oripeaux d’un brigand. Cependant, il est révélé au roi qui connaît son nom. Renversement acte II, Hernani se révèle au roi pour sauver Dona Sol. Acte III, c’est au tour d’Hernani de se présenter travesti sous l’habit d’un pèlerin scène 2 (on ne peut s’empêcher de penser à l’apparition d’Ulysse en mendiant auprès des prétendants) et se révèle ensuite au duc car il croit son amour trahi auprès de Dona Sol sc.3. A son tour, il donne son nom au duc. Dans cet acte III, Don Carlos n’est pas travesti.

L’opposition travestissement- révélation, plein-vide, enferment-jaillissement trouve encore sa matérialisation théâtrale dans le décor : Don Carlos se cache dans une armoire où il étouffe (de fait, cette armoire n’est pas digne de son rang, n’est pas un espace pour la grandeur royale, comme le rôle d’amant brigand ne lui convient pas. Il y a là quelque chose du méta-langage : il ne joue pas le rôle qui lui est dévolu dans le théâtre classique = volonté « révolutionnaire » de Victor Hugo, dans son renversement de l’esthétique classique). Il jaillit littéralement de l’armoire d’où il entend mal : comique de situation, incongruité du rôle, Don Carlos ne manque pas d’humour sur lui-même (c’est le propre aussi de la figure satanique). II,3, Hernani surgit de l’ombre. Mais le renversement entre les deux personnages est très clair III,5 : le duc cache Hernani dans un réduit derrière son propre portrait. Hernani n’en jaillit pas car il s’agit de son salut, mais lorsque le duc l’en sort, c’est pour prononcer un serment de vengeance et de mort. Armoire pour Don Carlos, cachette derrière un portrait pour Hernani, auxquels succède le tombeau de Charlemagne pour Don Carlos. L’acte IV constitue une élévation pour lui ; un tombeau d’empereur sied mieux à sa grandeur royale, mais c’est encore pour s’y cacher afin d’en jaillir pour mieux surprendre et condamner les conjurés qui cherchent à attenter à sa vie.

Importance de la posture très théâtrale aussi des bras croisés, d’un regard flamboyant ou fixe qui participe encore à l’effet miroir des deux personnages. Posture noble et royale dont se sert Carlos pour rappeler sa souveraineté : on ne discute pas ses ordres, on ne conteste pas ses ordres, on ne le questionne pas. Posture qu’Hernani peut prendre soit pour se révéler l’ennemi vengeur de Don Carlos (I,3), soit pour laisser paraître l’origine noble de son sang.

Si, dans l ‘acte III, Hernani remplace de façon dramaturgique le roi dans un réduit, il est notable que le portrait qui le dissimule soit celui du vieux duc. Dans cette « danse », ce jeu de mouvement, de déplacement scénique qui unit théâtralement les personnages de Don Carlos et Hernani, Don Ruy Gomez les rejoint. La substitution est évidente à travers le motif de l’amant et de l’époux (promis). L’amant (H comme DC) usurpe le duc auprès de Dona Sol. A ce motif se superpose celui du lien noué par un serment explicite ou implicite. Ainsi, le duc doit-il allégeance et fidélité à son roi : I,3, III, 6 alors que ce même roi le trahit (système d’oppositions). Hernani trahit Le vieux duc à travers son amour pour Dona Sol, acte I comme brigand, dans son rôle d’hôte acte III, mais noue avec lui un pacte de vengeance contre Don Carlos assorti d’un serment de mort. C’est une alliance sous condition, vouée tragiquement à une issue fatale puisqu’après avoir sauvé Hernani du roi, le duc lui réclame compensation de sa trahison. Hernani lui accorde sa vie sans combat, se sacrifiant pour se venger du roi par amour de Dona Sol .

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