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La télévision

Dissertation : La télévision. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  19 Janvier 2023  •  Dissertation  •  3 329 Mots (14 Pages)  •  198 Vues

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La télévision défraie régulièrement la chronique. Elle est l’objet de polémiques dans les autres médias. Elle semble à la recherche d’un statut, parfois d’une honorabilité. Elle subit actuellement les feux croisés des accusateurs qui se scandalisent de sa volonté de puissance, la controverse conduite par le sociologue Pierre Bourdieu l’oblige à justifier ses buts et ses méthodes au nom des intérêts des téléspectateurs.

Or, qu’attend le téléspectateur ? Sans doute qu’elle remplisse au mieux ses tâches traditionnelles qui sont la diffusion d’informations objectives pour qu’il puisse se forger une juste opinion de la marche de son pays, du monde et de sa région, d’émissions culturelles et de divertissements. Mais, le monde changeant, les techniques évoluant, il paraîtrait que cette mission soit de plus en plus difficile à remplir de façon satisfaisante et que le public soit fondé à se demander si, par la conjonction de divers effets pervers, la télévision ne trahit pas sa mission et même, disent certains, ne met pas en péril les valeurs de liberté de nos démocraties, en nous privant d’une base de réflexion solide pour comprendre le monde dans lequel nous vivons, voire en nous manipulant.

Les accusations étant graves, il convient de les examiner de près afin de déterminer de quelle façon la télévision use de son pouvoir, car il serait naïf de dénier qu’elle en a, et de réfléchir à la manière de nous prémunir contre d’éventuels excès.

La télévision est accusée de bâtir sa puissance en s’appuyant plus ou moins consciemment sur une double stratégie : elle dénature l’information et abêtit le public. information tronquée, réflexion indigente, médiocrité des programmes, ainsi s’expriment les griefs virulents auxquels s’expose ce média.

Tout d’abord, l’insatisfaction naît du manque de qualité de ce qui est proposé. En effet, l’information est calibrée pour satisfaire le plus grand nombre possible de téléspectateurs regroupés sous la notion contestable de « téléspectateur moyen ». Elle s’inscrit dans un moule horaire rigoureux, celui de la durée du journal télévisé, lui-même tronçonné en rubriques, ce qui impartit un temps très réduit à chaque thème. Rien n’est analysé. De plus, les journalistes puisent toutes leurs informations aux mêmes sources, essentiellement à l’Agence France Presse (AFP). Ils doivent choisir celles qu’ils vont retenir. Cela pose deux problèmes : celui du choix (un choix suppose une échelle de valeurs (selon quels critères font-ils ces choix ?) et celui de la diversité. On s’aperçoit que malgré l’abondance des dépêches que propose l’AFP, les journaux télévisés obéissent de façon quasi caricaturale au même plan, offrent les mêmes images, abordent les mêmes thèmes. Sur quels critères de sélection se fonde une telle uniformité ? C’est une question troublante. D’ailleurs, l’uniformité est de règle. Les grilles de programmes des différentes chaînes proposent souvent en parallèle des émissions de nature comparable. Les commentateurs (journalistes ou invités divers) sont toujours les mêmes ou presque. Philosophes, sociologues, spécialistes de tel ou tel domaine, hommes politiques sont régulièrement représentés par les mêmes personnalités ; leurs opinions ne sont donc pas représentatives des réflexions contradictoires conduites dans le pays.

C’est un appauvrissement et aussi un mensonge puisqu'il prive les téléspectateurs d’éléments de comparaison essentiels pour qu’ils se forgent une opinion éclairée. C’est aussi le résultat de la concurrence entre les chaînes qui rivalisent pour s’attacher le public. Au lieu de rechercher ce qui va les différencier, ce qui assurerait aux consommateurs des choix variés, elles s’imitent. Il en résulte un certain ennui. C’est un effet pervers du système entretenu par la crainte de perdre de l’audience, donc des crédits.

Cependant, il y a plus grave : ce peu de souci de la qualité et de la diversité a pour conséquence que la réflexion est indigente et la pensée artificielle. L’efficacité marchande prime sur la vérité : pour mieux vendre un fait, on altère son exactitude en le présentant de façon à retenir l’attention, on le dramatise par exemple. On donne de l’importance aux titres, aux « scoops » destinés à relancer l’information, à apporter une variété artificielle. On fait appel à l’émotion du téléspectateur plutôt qu’à sa réflexion. On se garde de solliciter son jugement, son esprit critique. Peu d’émissions proposent d’analyser véritablement un problème. Les débats organisés doivent composer avec le spectacle ; il y a une rotation rapide des intervenants par souci de ne pas lasser le téléspectateur (qui est supposé être ennuyé par un discours structuré) si bien que leur pensée n’a pas le temps de se déployer ; or argumenter pour convaincre suppose qu’on ait le temps de soigner et de mettre en valeur les liens logiques qui unissent les idées entre elles. Ces débats portent la marque du présentateur y compris par la censure qu’il exerce : parole coupée, accordée aux uns, pas aux autres, ton condescendant, irrespectueux, etc. Cette parodie d’analyse est aggravée par les jeux d’illusion sur lesquels, aussi, s’établit le pouvoir de la télévision, puisque cela lui permet de présenter comme réalité un artifice. Ce sont les procédés qui imbriquent le vrai et le faux au point qu’ils en deviennent méconnaissables : jeux combinés du direct et du différé, du montage, des images auxquelles on peut faire dire ce que l’on veut, etc.

Face à ces artifices et à ce manque de tenue intellectuelle, le téléspectateur est contraint à la passivité en ce sens qu’il ne peut donner son avis. Il reçoit des messages mais il n’y a pas de retour véritable et cela d’autant moins que bien souvent la télévision use d’un langage qui relève d’une stratégie de séduction. On essaye de faire rêver ou d’attendrir ou de révolter le téléspectateur sur des sujets prédéterminés. « The Voice » ou « Danse avec les Stars » n’ont jamais autant attiré de personnes pour les castings. Les événements en Ukraine et en Crimée ou les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis n’ont jamais fait autant parler les journalistes.

À ces constats qui font apparaître que la télévision propose souvent une perception du monde altérée sur laquelle elle plaque volontiers un discours qui ne permet pas un suivi intellectuel des problèmes, s’ajoute un dernier reproche qui englobe tous les autres ; sa relation de dépendance par rapport aux mondes politique et économique. Que ce soit face à l’État ou aux

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