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La chanson de Roland

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Par   •  22 Février 2015  •  Analyse sectorielle  •  6 832 Mots (28 Pages)  •  820 Vues

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La chanson de Roland

I. – Avant-Propos et Dédicace

À tous ceux qui ignorent notre vieille poésie nationale, à tous ceux qui ont souci de la connaître, nous dédions ces quelques pages.

La France, qui est la plus épique de toutes les nations modernes, a jadis possédé deux cents Poëmes populaires. consacrés à des héros chrétiens, à des héros français.

Ces poëmes étaient chantés, et se rattachaient par leur sujet à certaines familles héroïques, à certaines gestes. De là leur nom de « Chansons de geste ».

Imaginez de longs récits poétiques où plusieurs milliers de vers sont inégalement distribués en un certain nombre de tirades ou laisses. Et figurez-vous, dans chacun de ces couplets, tous les vers terminés à l’origine par les mêmes assonances, et, plus tard, par les mêmes rimes. Telles sont les Chansons de geste ; tels sont ces chants épiques de la France que toute l’Europe a connus, imités et traduits, et qui ont fait le tour du monde avec nos traditions et notre gloire.

Or, la plus antique, la plus célèbre, la plus belle de toutes les Chansons de geste, c’est la Chanson de Roland.

Nous allons parler de la Chanson de Roland.

Notre vœu le plus cher, c’est qu’après nous avoir entendu, les femmes même et les enfants connaissent, admirent et respectent le plus beau monument, le type le plus achevé de l’Épopée française.

C’est notre vœu, parce qu’on ne saurait aimer le Roland sans aimer plus vivement la France.

II. – L’Histoire

Le 15 août 778 [1], au fond d’une petite vallée des Pyrénées qui est encore aujourd’hui connue sous le nom de Roncevaux, il se passa un drame terrible, dont le retentissement devait être incomparable, et qui allait, durant plusieurs siècles, inspirer les poëtes de toutes les nations chrétiennes.

Le roi des Francs, Charles, revenait de cette expédition d’Espagne où il n’avait été qu’à moitié vainqueur. Attiré là-bas par les divisions des princes musulmans, il s’était généreusement proposé de délivrer l’église du joug des Sarrasins ; mais il n’avait rien fait au delà de l’Èbre. Il avait réussi devant Pampelune, mais échoué devant Saragosse. Et il s’en revenait assez tristement, ayant mille projets en tête.

Dans son arrière-garde se trouvaient Roland, le préfet de la Marche de Bretagne ; Anselme, le comte du palais ; Eggihard, le « prévôt de la table royale » ; toute l’élite de sa cour, tous les chefs de son armée.

La grande armée avait passé sans encombre.

Mais tout à coup, au moment où l’arrière-garde arrivait en ce passage étroit de la montagne qu’indique la petite chapelle d’Ibagneta, un bruit formidable se fit entendre dans les bois épais dont cette partie des Pyrénées est encore couverte. Des milliers d’hommes en sortirent et se jetèrent sur les soldats de Charles. Ces agresseurs inattendus, c’étaient les Gascons, que tentait l’espoir d’un gros butin, et qui, d’ailleurs, – comme tous les montagnards, – n’aimaient pas que l’on violât ainsi leurs montagnes. Ils précipitèrent les Francs dans le petit vallon qui est là tout près, afin de se donner la joie de les égorger tout à leur aise. Et de fait, ils les égorgèrent jusqu’au dernier.

C’est ainsi que mourut Roland.

L’histoire ajoute que les Gascons se dispersèrent, que leur crime demeura impuni, et que Charles en ressentit une longue et cruelle douleur.

Tel est le fait que raconte Éginhard au chapitre neuvième de sa Vie de Charlemagne. On en trouve également le récit dans les célèbres Annales qui ont été si longtemps attribuées à ce même Éginhard, comme aussi dans les vers du poëte saxon et dans la chronique de l’astronome limousin [2].

Malgré les réticences de tous ces narrateurs, il est aisé de voir que ce désastre fut considérable. L’intensité de la légende prouve assez clairement que les historiens ont atténué l’importance de la défaite ; un simple accident d’arrière-garde n’aurait jamais produit un tel dégagement de poésie.

Quoi qu’il en soit, voilà le fait QUI A DONNÉ LIEU À TOUTE NOTRE LÉGENDE ; voilà le fait QUI EN A ÉTÉ LE GERME.

Car toute légende a rigoureusement besoin d’un germe historique ;

Et la légende de Roland est sortie tout entière de ces huit mots d’Eginhard : In quo prœlio Hruodlandus, limitis Britannici prœfectus, interficitur. Ô petits commencements d’une grande chose !

III. – La Légende

Dès le lendemain de la catastrophe de Roncevaux, la Légende, – cette infatigable travailleuse et qui ne reste jamais les bras croisés, – se mit à travailler sur ce fait profondément épique. Et nous allons assister d’un œil curieux à ce long et multiple labeur.

Elle commença tout d’abord par exagérer les proportions de la défaite. Le souvenir de la grande invasion des Sarrasins en 792 et des deux révoltes des Gascons en 812 et 824 se mêlèrent vaguement, dans la mémoire du peuple, aux souvenirs de Roncevaux et accrurent l’importance du combat, déjà célèbre, où Roland avait succombé.

En second lieu, la Légende établit des rapports de parenté entre Charlemagne et ce Roland, dont elle fit décidément le centre de tout ce récit et le héros de tout ce drame.

Faisant alors un nouvel effort d’imagination, elle supposa que les Français avaient été trahis par un des leurs, et inventa un traître auquel fut un jour attaché le nom de Ganelon.

Ensuite elle perdit de vue les véritables vainqueurs, qui étaient les Gascons, pour mettre uniquement cette victoire sur le compte des Sarrasins, qui étaient peu à peu devenus les plus grands ennemis du nom chrétien.

Et enfin, ne pouvant s’imaginer qu’un tel crime fût demeuré impuni, la Légende raconta tour à tour les représailles de Charles contre les Sarrasins et contre Ganelon. Car, dans toute Épopée comme dans tout drame, il faut, de toute nécessité, que l’innocence soit récompensée et le vice puni.

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