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Diriger c'est prévoir

Dissertation : Diriger c'est prévoir. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  16 Mai 2022  •  Dissertation  •  2 624 Mots (11 Pages)  •  463 Vues

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Les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu’elles concernent l’avenir » nous rappelle Pierre Dac, humoriste, comédien français mais aussi figure de la Résistance. Pourtant, prévoir est la question fondamentale au cœur de la politique, de l’économie, de la défense, du renseignement ou même de la diplomatie.  Pour diriger il faudrait donc prévoir.          Toutefois, la dernière décennie confirme cette réflexion du résistant de la première heure qui ne manque pas de bon sens. Aujourd’hui, l’histoire nous démontre que ’imprévisible se produit souvent. Se hasarder à envisager à l’avance des développements internationaux tels ceux que nous connaissons aujourd’hui semble utopique.  Le maintien et renforcement de Bachar Al-Asad en Syrie, la crise migratoire en Europe ou même la crise sanitaire que traverse le monde,  sont des phénomènes qu’aucun dirigeant n’aurait été en mesure de prévoir. Le bon dirigeant doit pourtant être capable d’anticiper l’avenir. Il ne doit pas « naviguer à vue ».  En effet, diriger du latin dirigere signifie orienter quelque chose, le placer dans une certaine direction mais aussi être le principal responsable de l'administration, de la gestion d'une entreprise, d'une institution, de la direction. Synonyme de gouverner, administrer, gérer. Prévoir du latin praevidere signifie voir, juger et éventuellement annoncer qu'une chose arrivera. Il parait donc indéniable que diriger et prévoir forme un lien indéfectible.

Ainsi, les hommes politiques comprennent rapidement le profit qu’ils peuvent tirer d’une démarche prospective pour les aider à diriger.

        Nous pouvons néanmoins nous demander dans quelle mesure est-ce que la prévoyance est-elle le prolongement nécessaire du pouvoir de direction ?          

Nous mettrons en exergue dans un premier temps le fait que « diriger » semble toujours primer, mais sans doute d’avantage comme principe que réalité (I) puis dans un second temps que nous étudierons le fait que prévoir traduit une peur de l’impuissance qu’il convient de juguler au plus vite (II)

I. « Diriger » semble toujours primer, mais sans doute davantage comme principe que réalité

Le pouvoir de diriger revient revient historiquement et naturellement à l’état, son héritage semble perdurer (A), mais ce dernier semble l’être d’avantage en principe qu’en réalité (B)

A. La localisation du pouvoir de diriger dans l’Etat : un héritage qui semble perdurer

Si Carl Schmitt considère qu’il n’existe pas d’Etats avant 1648 et les traités de Westphalie

qui mettent fin à la Guerre de Trente Ans, l’Etat tel que nous le connaissons est né en

Europe entre les XIVe et XVIe siècles après une longue gestation. Sa construction est

étroitement liée à l’évolution du droit et à la nécessité de contrôler la violence, d’où la

définition de Max Weber.

        La première étape de l’émergence de l’Etat se déroule à l’ouest de l’Europe entre le XIIIe

et le XVIIe siècle : la transformation des royaumes en vastes unités politiques qui facilitent

la centralisation du pouvoir. Les guerres féodales aboutissent à la concentration des

ressources militaires, fiscales et administratives. Le roi, premier d’entre les princes,

renforce ainsi progressivement son pouvoir. Il l’accroît aussi en augmentant ses

possessions par le mariage et la bonne utilisation des règles de succession et d’héritage.

Selon Foucault, cette étape est celle de l’Etat de justice car la justice est le principal

moyen utilisé par les monarques pour asseoir leur autorité sur les sujets de leurs vassaux.

Enfin, les rois finissent par se détacher de l’empereur : le roi est empereur en son

royaume. On passe ainsi insensiblement du principe de suzeraineté à celui de

        souveraineté.  L’étape suivante est l’œuvre de Machiavel. Dans ses deux ouvrages majeurs, Le prince et

les Discours sur la première décade de Tite-Live, le Florentin affirme l’autonomie du

politique, la séparation du politique et du religieux, la reconnaissance de la distinction

entre politique et social, enfin l’affirmation de la souveraineté de la cité face à l’empereur

et au pape. Le rôle du prince, au sens ici de celui qui gouverne, est de préserver l’Etat.

Il revient à Bodin, dans Les Six livres de la République (1576) de théoriser la

souveraineté : la souveraineté est la puissance absolue et perpétuelle d’une République

(ici au sens d’Etat). La puissance souveraine est à la fois absolue (au sens premier :

déliée des lois), c’est-à-dire indivisible et illimitée, et perpétuelle, c’est à dire continue et impersonnelle (l’Etat ne meurt jamais). Le souverain est celui qui dit la loi. Avec Bodin,

l’Etat devient désormais un lieu abstrait où est situé un bien universel supérieur à tous les

intérêts particuliers. Il est le lieu du politique, puisque c’est en lui que la multitude devient

Une.          Enfin, Thomas Hobbes dans son ouvrage principal, Léviathan, invente le mythe de l’état de nature, lieu de « la guerre de chacun contre chacun » car « l’homme est un loup pour l’homme ». Pour sortir de cette guerre perpétuelle, les hommes se donnent un pouvoir suffisamment fort pour se protéger les uns des autres. Le contrat ainsi passé est l’abandon par les hommes « de tout leur

pouvoir et de toute leur force » confiés désormais au souverain ou Léviathan.

B. Une localisation du pouvoir de diriger dans l’Etat qui relève davantage du principe que de la réalité

La première remise en cause est venue du courant néolibéral. Les différentes politiques

économiques ayant échoué à résoudre la crise consécutive aux deux chocs pétroliers de

1973 et 1979, Margaret Thatcher au Royaume-Uni et Ronald Reagan aux Etats-Unis se

sont convertis au néolibéralisme. Ronald Reagan a été élu président des Etats-Unis sur le programme : l’Etat n’est pas la solution, mais le problème. Cette nouvelle politique, dont la philosophie est résumée par la formule des trois « D » (décloisonnement, dérégulation, désintermédiation) se traduit par un désengagement de l’Etat dans les domaines économiques et sociaux, le marché étant censé se réguler entièrement seul et tout pouvant être considéré comme une marchandise : santé, éducation, sécurité et même la monnaie.

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