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L’invocabilité des dispositions constitutionnelles devant le juge administratif

Dissertation : L’invocabilité des dispositions constitutionnelles devant le juge administratif. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  16 Novembre 2022  •  Dissertation  •  3 136 Mots (13 Pages)  •  397 Vues

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Ayoub El Maddahi                                                                        L2 Droit Section 1

L’invocabilité des dispositions constitutionnelles devant le juge administratif

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        « La Constitution est la base nécessaire des règles dont l'ensemble compose le droit administratif ». Cette citation du doyen Vedel est tirée de son article sur les bases constitutionnelles du droit administratif datant de 1954. Elle illustre, selon lui, ce qu'est la Constitution et surtout le lien qui existe entre cette dernière et le droit administratif.

        Le droit administratif est exercé par les magistrats administratifs et notamment le juge administratif. Il est chargé de trancher les conflits entre les usagers et l’administration et détient également un pouvoir de contrôle de légalité des actes pris par l’administration. Dans cette étude, il sera également question de l’invocabilité des dispositions du bloc de constitutionnalité. Ces dispositions concernent l’ensemble des articles et des normes qui sont présentes dans la Constitution ou qui ont une valeur constitutionnelle. L’invocabilité concerne la possibilité d’employer, tant par le justiciable que par le juge, une disposition dans le but d’appuyer respectivement son recours ou sa décision.

        S’agissant de cette étude, l’ordre juridique français sera de mise et plus particulièrement le juge administratif ainsi que le Conseil constitutionnel étant donné qu’il convient d’étudier le lien entre la Constitution et le droit administratif. La Constitution en question concerne celle de la Vème République soit celle de 1958 même si des éléments peuvent se rapporter à des normes juridiques antérieures comme la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ou le préambule de la Constitution de la IVème République.

        Depuis 1958, le Conseil constitutionnel est compétent pour connaître des litiges concernant la constitutionnalité des lois. Cependant, la question des actes administratifs a souvent été trouble. En effet, le Conseil d’Etat s’est toujours refusé historiquement à statuer sur la constitutionnalité des actes administratifs à l’image de la décision de section du 6 novembre 1936 dit Arrighi. En conséquence, la question de la compétence s’est ainsi posée.

        Ce problème historique a suscité de nombreux intérêts quant à la compétence du juge administratif en matière constitutionnelle. Pourtant, les sources du droit administratif ont intégré bon nombre de normes constitutionnelles au fil du temps malgré le refus des juridictions administratives d’en faire application. La question de savoir quelle est la place de la Constitution pour le juge administratif est à se poser. De la même manière, il sera aussi question de savoir si le justiciable, dans le cadre d’un recours, peut invoquer des dispositions de nature constitutionnelle.

        Ces interrogations peuvent se résumer en la problématique suivante : Dans quelle mesure le juge administratif, tant pour lui-même que pour le justiciable, peut-il appliquer des normes de valeur constitutionnelle ?

        Historiquement, il est vrai que le juge administratif s’est montré et se montre encore, par principe, réticent quant à l’emploi des dispositions constitutionnelles par peur éventuelle d’heurter le principe de séparation des pouvoirs (I). Cependant, notamment par le développement des sources constitutionnelles du droit administratif, le juge administratif a pu se libérer partiellement au cours du temps grâce à divers moyens afin de pouvoir s’ériger en tant que protecteur des droits et libertés fondamentaux (II).

I. Une réticence justifiée du juge administratif en faveur de la séparation des pouvoirs

        Le juge administratif se refuse, dans la majorité des cas, à contrôler la constitutionnalité d’actes administratifs par souci du respect de la séparation des pouvoirs. Cela se traduit notamment par l’existence de l’écran législatif qui bloque le juge administratif dans ce domaine (B). De plus, il se peut que des normes constitutionnelles se révèlent être inapplicables tout simplement par ce qu’il ne peut les appliquer faute d’effet direct (A).

        A. L’effet direct des normes constitutionnelles, une question de premier ordre

        C’est un grand paradoxe de l’ordonnancement juridique français : Plus une norme est élevée dans la hiérarchie des normes, moins elle sera susceptible d’être invoquée par le juge pour le contrôle des actes. Le fait qu’un droit ou une liberté ait une valeur constitutionnelle ne garantit pas sa pleine invocabilité pour les justiciables car le juge administratif peut considérer que la disposition invoquée, compte tenu de son énoncé, soit dépourvue d’effet direct ou d’applicabilité directe.

        L’effet direct est un attribut que possède en principe toute norme contraignante que le juge pourra lire pour en tirer les conséquences de droit. Pour les normes du bloc de constitutionnalité, la question est plus épineuse. En effet, des dispositions peuvent énoncer des principes de droit sans pour autant être claires, précises et inconditionnelles les rendant ainsi inapplicables à un cas d’espèce. L’exemple le plus courant est l’alinéa 12 du préambule de la Constitution de 1946 qui dispose que la Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales. C’est une disposition dépourvue d’effet direct quand bien même elle fait partie du bloc de constitutionnalité car dans une décision de 1962 dite Société indochinoise de construction électrique, le Conseil d’Etat va considérer qu’il n’y a pas de valeur juridique et qu’elle n’est pas suffisamment claire ou précise.

        L’absence d’effet direct a un impact direct sur le justiciable puisque cela le prive d’invoquer la norme constitutionnelle, il faut passer par une loi qui la concrétiserait. Il s’agit des renvois constitutionnels à la loi. Le constituant peut faire en sorte que des dispositions soient garanties par l’intermédiaire d’une loi et que ce sera par le biais de cette loi invoquée devant le juge administratif que la disposition constitutionnelle sera garantie. C’est le cas des articles 3, 4 et 7 de la charte de l’environnement par exemple. Il faut bien sûr préciser que ce n’est pas le cas de toutes les dispositions constitutionnelles. En effet, l’alinéa 10 du préambule de la Constitution de 1946 qui dispose que la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement a été considéré comme étant doté d’effet direct dans la décision d’assemblée du Conseil d’Etat datant de 1978 dit G.I.S.T.I.

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