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CE Assemblée 16 décembre 2005: L’abrogation d’une disposition législative au profit d’une disposition constitutionnelle postérieure peut-elle être constatée par le juge administratif ?

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Par   •  6 Décembre 2011  •  2 014 Mots (9 Pages)  •  4 802 Vues

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Il s’agit ici d’un arrêt d’assemblée du conseil d’état rendu le 16 décembre 2005. Il est intéressant de préciser qu’il est question d’un arrêt d’assemblée, car cela montre toute son importance ainsi que la portée non négligeable que va avoir sa décision.

En l’espèce, il est question de la légalité d’une décision ministérielle rendu le 5 juillet 2000 qui reconnaissait au syndicat national des huissiers de justice « un caractère représentatif au plan national pour participer aux négociations collectives intéressant cette profession ». La chambre nationale des huissiers de justice forme un recours pour excès de pouvoir au sujet de cette décision devant le tribunal administratif de Paris sur le fondement de l’ordonnance du 2 novembre 1945 qui dispose que cette attribution est de la compétence de la chambre nationale des huissiers de justice. Or, il se trouve que le sixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 dispose que tout syndicat régulièrement constitué peut participer à des négociations collectives. Il y a donc une opposition entre ces deux textes. Cependant, le tribunal administratif de Paris fait droit à la demande de la chambre nationale des huissiers de justice et annule la décision ministérielle sur le fondement du non respect des dispositions de l’ordonnance du 2 novembre 1945. Un appel est interjeté et la cour administrative d’appel confirme cette décision. L’annulation de cet arrêt est donc demandée devant le conseil d’état. L’abrogation d’une disposition législative au profit d’une disposition constitutionnelle postérieure peut-elle être constatée par le juge administratif ?

Le conseil d’état se déclare compétent pour constater l’abrogation d’un acte administratif en cas de non-conformité à une disposition constitutionnelle antérieure. En l’espèce, le conseil d’état déclare qu’un acte administratif non conforme à une disposition postérieure est implicitement abrogé : la disposition de l’ordonnance de 1945 est donc implicitement abrogé au profit de la disposition constitutionnelle de 1946. De ce fait, le conseil d’état annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris puisqu’il considère que c’est la disposition constitutionnelle qui prime. La décision ministérielle est donc légale puisque conforme à la constitution.

Il convient de voir dans un premier temps la compétence du Conseil d’état pour l’abrogation implicite d’un acte administratif (I) et dans un deuxième temps l’affirmation d’un critère unique à l’abrogation implicite (II).

I. Compétence du Conseil d’état pour l’abrogation implicite d’un acte administratif.

Il convient de voir dans un premier temps la notion d’abrogation implicite (A) pour voir ensuite que si le conseil d’état se déclare compétent pour la constater, en revanche il se déclare incompétent pour contrôler la constitutionnalité d’un acte administratif (B).

A. La notion d’abrogation implicite.

Pour comprendre la notion d’abrogation implicite, il faut d’abord la définir (1) et ensuite voir l’importance que le conseil d’état attache à l’entrée en vigueur des normes dans le temps pour constater ou non une abrogation implicite (2).

1/ Définition.

Le conseil d’état, dans un arrêt d’assemblée du 13 mai 1949 « Sieur Bourgoin » affirme le principe de pérennité des textes législatifs et règlementaires. En effet, ces derniers disposent pour l’avenir, sans limitation de durée et restent en vigueur lorsqu’ils n’ont pas été abrogés implicitement ou explicitement par des dispositions législatives. L’abrogation est donc le fait de supprimer une loi pour l’avenir. Elle peut être expresse, c'est-à-dire directement supprimée par une disposition législative ou alors implicite, ce qui signifie qu’une disposition législative postérieure vient la contredire. En l’espèce, il s’agit d’une ordonnance de 1945 qui dispose que le syndicat des huissiers de justice ne peut exercer aucune attribution en matière de négociation collective : c’est la prérogative de la chambre nationale. Cependant, le préambule de la constitution de 1946 dispose que tout syndicat régulièrement constitué a le droit de participer à des négociations collectives. Ces deux dispositions sont donc contradictoires, il faut donc déterminer laquelle va prévaloir sur l’autre. C’est pourquoi le juge administratif est saisi dans cette affaire dans laquelle il va constater l’abrogation implicite de l’ordonnance. Mais il attache une importance toute particulière au fait de savoir laquelle est entrée en vigueur après l’autre.

2/ L’importance donnée à l’entrée en vigueur dans le temps de la norme.

En l’espèce, des dispositions législatives ont été implicitement abrogées par des dispositions constitutionnelles postérieures avec lesquelles elles sont inconciliables. Le conseil d’état se déclare donc compétent pour juger de cette affaire en raison du fait que la norme constitutionnelle est entrée en vigueur après la disposition législative. Il constate donc l’abrogation implicite de l’ordonnance seulement parce que cette dernière était incompatible avec la norme constitutionnelle entrée en vigueur après sa promulgation. Cela signifie donc qu’en cas d’incompatibilité entre deux normes, c’est la norme postérieure qui prévaut sur la norme antérieure. En outre, l’analyse de cette décision montre que le juge administratif se serait déclaré incompétent si l’ordonnance avait été postérieure au préambule de la constitution de 1946 et ce parce qu’il se déclare incompétent pour contrôler la constitutionnalité.

B. Incompétence du conseil d’état pour contrôler la constitutionnalité d’un acte.

En effet, par cette décision le conseil d’état réaffirme son incompétence (1) et la distinction entre abrogation et inconstitutionnalité est mise en exergue (2).

1/ Une incompétence réaffirmée.

Le conseil d’état dans l’arrêt Arrighi du 6 novembre 1936 avait affirmé son incompétence pour apprécier la conformité de la loi aux dispositions constitutionnelles en vigueur à la date de la promulgation. Le juge administratif est en effet juge de la légalité des actes administratifs et non de la constitutionnalité des lois. De ce fait, il refuse de se prononcer sur la conformité d’une loi à la constitution alors même que de cette question dépend la conformité d’un acte administratif

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