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BONNE FOI ET LOYAUTÉ EN DROIT DES CONTRATS.

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Par   •  14 Avril 2020  •  Dissertation  •  5 131 Mots (21 Pages)  •  878 Vues

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BONNE FOI ET LOYAUTÉ EN DROIT DES CONTRATS.

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Par François Campagnola, Juriste.

- VENDREDI 16 SEPTEMBRE 2016

Historiquement, le principe de bonne foi est né de la nécessité de faire contrepoids à la toute puissance du formalisme juridique qui caractérisait alors le contrat de droit romain. A l’autre bout du spectre, l’émergence de la théorie de l’autonomie de la volonté au début du XIXème siècle signifia un temps le glas juridique du principe de bonne foi. Entre les deux périodes, le principe de bonne foi trouva matières à consolidation au Moyen-Age et à l’époque moderne avant de resurgir à nouveau dans les années 1980. Sans en surestimer l’impact, le principe de bonne foi constitue un phénomène particulièrement prégnant du droit des contrats.

Dernière mise à jour : 29 juin 2018

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Au plan substantiel, il en a résulté un certain nombre d’innovations juridiques comme l’obligation précontractuelle de négociation, la nullité des clauses abusives et la théorie générale de l’imprévision. Codifiant les avancées de la jurisprudence française en la matière, la réforme en cours du droit des contrats s’inscrit dans cette tendance. L’article 1134 du Code civil cantonnait encore la bonne foi au seul domaine de l’exécution des contrats. Il disposait dans son alinéa 3 que les conventions légalement formées « doivent être exécutées de bonne foi ». Dans le prolongement des avancées du droit prétorien, le nouvel article 1104 en élargit aujourd’hui le périmètre d’action en disposant que « les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public ».

Sur la base de ces apports, nous traiterons les questions successivement du renvoi à l’obligation de bonne foi contractuelle, de la situation au regard des différentes branches du droit français, de l’étendue du champ d’application de l’obligation de bonne foi, de la protection juridique du rapport de confiance contractuelle qu’elle induit, de la diversification possible des fonctions de la bonne foi et de la portée du statut juridique de l’obligation de bonne foi. Il résulte de l’ensemble que, pour élastique qu’elle soit et outre l’accès au contrat qu’elle donne au juge, la bonne foi a une double fonction propre d’effectivité normative et de contrepoids à l’exclusivité de la volonté dans le processus contractuel.

I) La prégnance du principe de bonne foi en droit contemporain des contrats.

Après une longue éclipse contemporaine de l’emprise du pouvoir exclusif de la volonté sur le contrat, le principe de bonne foi innerve très largement le droit contractuel contemporain. Il en est ainsi tant en interne qu’à l’international ainsi que dans leurs différentes branches. Ses champs d’application y sont en sus relativement étendus.

1) La multiplicité des renvois à l’obligation de bonne foi contractuelle.

Au-delà des nuances qui les distinguent, la bonne foi et la loyauté sont aujourd’hui des principes structurants de l’ensemble du droit contractuel contemporain. Ils en irriguent en effet les différentes branches tant en droits internes qu’à l’international. Le principe de bonne foi renforce tout d’abord l’édifice normatif du droit international public qui est un droit éminemment contractuel. Le caractère traditionnellement lacunaire de ce droit et l’emprise qu’y exerce la norme coutumière créent un véritable besoin de recourir aux notions d’équité et de la bonne foi applicables aux rapports internationaux. Le développement de la coopération internationale requiert également des standards de confiance qui se nourrissent du principe de bonne foi. Le besoin d’unité du droit international public trouve enfin matière à réalisation dans les principes généraux du droit dont relève très certainement l’obligation de bonne foi.

Les normes fondamentales que sont le Pacta sunt servanda, l’interdiction de l’abus de droit et l’interdiction de la perfidie dans le droit de la guerre puisent donc dans le principe de l’obligation de bonne foi leurs racines juridiques. De même en est-il également de la primauté de l’esprit sur la lettre dans l’interprétation des traités, de l’interdiction de priver une transaction de son objet et de son but, du principe selon lequel nul ne peut profiter de son propre tort, de la théorie de l’apparence, de l’estoppel, de la théorie des obligations pré-conventionnelles, du caractère obligatoire des actes juridiques unilatéraux et de la doctrine de l’acquiescement normatif.

De son côté, la lex mercatoria donne au principe de bonne foi un rôle particulièrement dynamique au sein de son corpus normatif tandis que le droit de la renégociation du contrat international y puise une grande partie de sa matière. Au-delà, la propension des arbitres du commerce international à recourir au principe de bonne foi est également notoire. Le phénomène tient pour une part dans la tendance des arbitres à donner à l’équité une place non négligeable dans leurs décisions. Il en résulte donc une interprétation extensive des droits nationaux relatifs à la bonne foi.

Les tribunaux arbitraux se sont ainsi prononcés sur l’admission de la théorie de l’imprévision en la déduisant du principe général de bonne foi. La règle de la responsabilité pour faute a été rattachée au principe de bonne foi par une sentence arbitrale de 1979. Celle-ci visait le cas particulier de la responsabilité contractuelle dans des termes suffisamment généraux qu’ils permirent sa transposition dans le domaine de la responsabilité délictuelle. Il a également été jugé en 1990 qu’en application de la lex mercatoria« la notion générale de bonne foi en affaires et les usages du commerce international » permettent d’étendre au dirigeant d’une société la responsabilité des engagements de celle-ci.

En droit interne, la théorie de la bonne foi a été moins poussée dans les ordres juridiques anglo-saxons que dans les ordres juridiques continentaux. On la retrouve en effet en bonne place dans les concepts italien d’affidamento et allemand de Vertrauensschutz. C’est d’ailleurs en Allemagne que la doctrine a eu ses développements les plus substantiels. En France, elle fait depuis plus de deux siècles l’objet d’un article 1134-3 du Code civil applicable au domaine de l’exécution des contrats et, tout récemment, d’un projet d’article 1104 qui, dans le prolongement du droit prétorien, en étend le principe au domaine de la négociation et de la formation du contrat. Bien que le droit législatif ne définisse enfin véritablement pas la notion, on la retrouve ainsi dans un grand nombre de branches de droit privé et à la base de nombreuses solutions jurisprudentielles.

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