LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Étude littéraire sur Le Funambule, Jean GENET

Commentaire d'oeuvre : Étude littéraire sur Le Funambule, Jean GENET. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  11 Décembre 2019  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 093 Mots (9 Pages)  •  940 Vues

Page 1 sur 9

« Ce sont de vains, de maladroits conseils que je t’adresse. Personne ne saurait suivre. Mais je ne voulais pas autre chose : qu’écrire à propos de cet art un poème dont la chaleur montera à tes joues. Il s’agissait de t’enflammer, non de t’enseigner ». C’est en ces mots que Jean Genet clôture sont oeuvre Le Funambule, écrit en 1958 pour son ami Abdallah Bentaga, jeune acrobate. L’histoire est dramatique : Genet rencontre Abdallah puis se lie d’amitié et fait de lui un funambule reconnu. Malheureusement, il chute de son fil au Koweit, puis plonge dans une dépression et se suicide quelques années plus tard, entouré de livres de Jean Genet. C’est à lui que l’auteur adresse son livre, un récit en quelque sorte doublé puisqu’il est composé de parties en italique, retranscrivant ses pensées en monologue, et de parties en oblique, exposant ses conseils au funambule. Nous nous demanderons quelle est la quête du funambule, lui qui reçoit autant d’indications de la part de Jean Genet. Dans un premier temps, nous analyserons la relation particulière entre le funambule et son fil. Ensuite, nous verrons comment l’artistisme est sublimé. Enfin, nous aborderons le thème de la solitude, une « solitude mortelle » selon Genet.

I. LA RELATION PARTICULIÈRE ENTRE LE FUNAMBULE ET SON FIL

A. LE FIL PERSONNIFIÉ

D’emblée on observe une relation particulière entre le funambule et son fil. En effet, on peut parler de véritable « relation », et cette relation est d’ailleurs amoureuse : d’entrée, à la première page du livre, cet amour est explicité par Genet : « cet amour - mais presque désespéré, mais chargé de tendresse - que tu dois montrer à ton fil, il aura autant de force qu’en montre le fil de fer pour te porter ». Cet amour est d’abord platonique, amical, le fil étant son accompagnateur : « Salue-le, remercie-le », « Demande lui de te supporter », « Apprivoise-le plutôt ». Puis, cet amour devient plus puissant, le fil en devient un véritable compagnon, un amour aussi intense qu’il en est renaissant : « Le fil était mort - ou si tu veux muet, aveugle - te voici : il va vivre et parler ». Et de cet amour intense, il en devient essentiellement physique, le fil devenant son amant : « Tu l’aimeras, et d’un amour presque charnel », « Va lui donner un baiser », « Va le voir, caresse-le », « pose, gentiment, ta joue contre la sienne ».

Ainsi, le fil est personnifié en accompagnateur fidèle au funambule, et plus encore : le funambule n’est rien sans son fil, et le fil n’est rien sans son funambule.

B. LE FUNAMBULE DANS L’OMBRE DE SON FIL

La réciprocité entre le fil et le funambule est telle que le fil ombrage le funambule, comme si ce dernier n’était pas l’artiste. En effet, le fil, par son mérite, son talent et sa gloire (« Comme il t’en saura gré si tu es parfait dans tes attitudes non pour ta gloire mais la sienne »), passe devant l’artiste, il l’éclipse et le laisse dans l’ombre. Ce n’est plus le funambule qui danse, mais le fil : « Ce n’est pas toi qui danseras, c’est le fil » ; ce n’est plus le funambule que l’on applaudit, mais le fil : « Que le public émerveillé l’applaudisse : Quel fil étonnant ! Comme il soutient son danseur et comme il l’aime ! » ; et si jamais on admire le funambule, et bien c’est grâce au fil : « À son tour le fil fera de toi le plus merveilleux danseur ».

II. L’ARTISTISME SUBLIMÉ

A. MISE EN VALEUR DE L’ACROBATE

On comprend durant la lecture de ce livre que l’auteur est émerveillé par le funambule: « Qu’au premier de tes bonds - préparé dans la coulisse - l’on sache déjà qu’on ira de merveilles en merveilles », qu’il le fascine : « tu ne viens pas divertir le public mais le fasciner ». Jean Genet commence son oeuvre, dans l’incipit, par associer l’or à l’acrobate puisqu’il dit, en parlant de « paillette d’or », qu’« il en reste quelquefois une ou deux accrochées dans les boucles d’un acrobate ». L’or est un métal précieux, et en l’alliant au funambule, il fait de lui un être d’une très grande importance, il le dit d’ailleurs explicitement plus loin : « Toi, il faut que tu saches danser d’une façon si belle, avoir des gestes si purs afin d’apparaître précieux et rare », « Les spectateurs t’acclament car ton adresse vient de préserver d’une mort impudique un très précieux danseur » . Plus encore, ce n’est pas tant la personne qui a cette valeur extreme, mais bien sa profession, c’est la technique de son travail qui est sublimé par l’auteur : « Cette exactitude sera la beauté de ta danse » en parlant du danger qui oblige les muscles a réussir parfaitement les bons gestes. Plus qu’une technique, Genet évoque même l’idée que cet technicité serait une bénédiction accordé par Dieu, une grâce, qualifiant le funambule de gracieux : « Quand tu tu te prépareras à faire le saut périlleux le public s’inquiétera, s’indignera presque qu’un être si gracieux risque la mort ». Mais cette mise en valeur de l’acrobate, cette fascination que le narrateur porte au funambule est nuancée. En effet, Genet parle de monstruosité : « Homme ou femme ? Monstre à coup sûr. », et évoque le funambule en ces termes : « ce monstre aux paupières mauves ». Une telle monstruosité qu’elle inspirerait même le dégoût : « Fardé, somptueusement, jusqu’à provoquer, dès son apparition, la nausée ».

B. FRONTIÈRES INDÉCISES ENTRE LE FUNAMBULE ET L’AUTEUR

La tâche du funambule et du poète semble être la même, si bien que le récit de Jean Genet parle du funambule et de l’écrivain en même temps, le funambule représentant une partie de l’écrivaine et l’écrivain représentant une partie du funambule. Quant l’auteur adresse ses conseils au funambule, à l’artiste, il les adresse comme s’ils les adressait à un poète, à lui même donc : « comme au poète, je parlais à l’artiste seul ». Idem pour l’évocation de l’activité de ces deux artistes, du funambule et du poète, qui sont liées dans une même phrase interrogative par l’auteur : « Qui, s’il est normal et bien pensant, marche sur un fil ou s’exprime en vers ?».

III. UNE SOLITUDE MORTELLE

A. FASCINATION DE LA MORT

Il est interessant de constater que la fascination

...

Télécharger au format  txt (13 Kb)   pdf (45.5 Kb)   docx (12.4 Kb)  
Voir 8 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com