LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Tristan Et Yseult

Commentaire d'oeuvre : Tristan Et Yseult. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  3 Mai 2015  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 769 Mots (12 Pages)  •  964 Vues

Page 1 sur 12

Léa Kramer avril 2014

<< Marc notamment, n’est pas le simple cocu de la farce. (...) Il

est l’élément essentiel de l’ambiguïté qu’est la marque de ce

roman. Oscillant entre le ridicule et la grandeur, il renvoie à

l’indécision fondamentale entre vérité et mensonge, culpabilité et

innocence. >> - Bénédicte Milland-Bove, Tristan et Iseut, Petits classiques Larousse, Larousse, 1974, p. 161

<< Ambigu : Dont le caractère, la conduite sont complexes et se laissent malaisément

défini

Selon la définition du dictionnaire Larousse

).

roman de Tristan et Iseut de Bédier nous prouve le contraire ! Une des caractéristiques principales de ce livre est, en effet, son ambiguïté constante à plusieurs égards et sous plusieurs angles. Les personnages principaux, le roi Marc, en particulier porte la trace de cet aspect distinctif ; Bénédicte Milland-Bove, maitre de conférences à l’université Paris III Sorbonne Nouvelle le souligne dans son commentaire : << Marc notamment, n’est pas le simple cocu de la farce. (...) Il est l’élément essentiel de l’ambiguïté qu’est la marque de ce roman. Oscillant entre le ridicule et la grandeur, il renvoie à l’indécision fondamentale entre vérité et mensonge, culpabilité et innocence. >>

Vérifions en quoi ce commentaire se justifie, en cernant la personne équivoque du roi Marc, en mettant en évidence les jeux de mensonges et de vérité, avant d’aborder l’enjeu principal de ce livre : les amants sont-ils coupables ou non ? En définitive pouvons-nous dire que le message de ce roman est clair ?

Dans le roman de Tristan et Iseut, à l’apogée de l’ambiguïté « règne » le roi Marc.

Marc est un roi très atypique, ambigu jusqu’à même dans sa qualité de roi. On retrouve en effet en lui des défauts impropres à un souverain, tel qu’un manque d’autorité ou un esprit très influençable : malgré qu’il tente de s’en défendre il croit aveuglement ses barons sans autres preuves réelles que leurs paroles . Il confesse que : « (...) leurs discours maléfiques ont troublé mon cœur (...)» (p.47, 10-11) et suit tout de même les recommandations du nain

r. >> (

Peut-on faire de cette propriété un ingrédient indispensable à la réussite d’un bon récit ? Cela semble improbable. Portant le

1

Frocin, « contre son cœur » (p.50, 28) en se fiant à la divination hasardeuse de ce dernier. Tout comme il croit volontiers les mensonges des deux amants tout au long du récit, et se laisse duper à chaque occasion, parfois grossièrement, alors qu’il croit avoir l’avantage. l’épisode du pin illustre ce point : les deux amants découvre la présence de Marc dans l’arbre, grâce à son ombre reflétée dans la fontaine « à la clarté de la lune » (p.51, 22) avant même que l’action ne se déroule. C’est d’ailleurs cette crédulité effarante qui permet au jeu de mensonge de s’installer tout au long de l’histoire.

Son autorité de monarque, comme de mari est constamment mise en échec, ce qui est en parfaite opposition avec son statut. Ses barons n’ont que faire de ses décisions et semblent lui dicter eux-mêmes des ordres, comme par exemple en l’obligeant à prendre femme.

Tristan ne suit pas non plus ses ordres et n’hésite pas à lui voler sa femme et à fuir dans la forêt, loin de ses obligations chevaleresques. Même son peuple semble prêt à contredire ses faits et gestes, notamment lorsque Marc décide de mettre à mort les amants, « Riches bourgeois et petites gens, tous pleurent.»(p.60, 3-4) et tentent de convaincre le roi « courant tous au palais » (p.60-61, 18-19) de les épargner. Voici deux aspects de sa personnalité qui font de lui un personnage ambigu, par le fait qu’en tant que roi il ne peut se permettre ces défauts, qui sont en opposition constante avec ses autres qualités, comme son esprit stratège pour la guerre (il possède sous son blason de très bons chevaliers), sa générosité ou encore sa capacité à se faire aimer, atouts qui lui permettent de rester à la tête de son royaume.

Mais le roi Marc ne limite pas son ambivalence à des faits passifs, ses actes sont parfois complètement décousus de sens entre eux. Il fait preuve de cruauté diabolique, par exemple, lorsque en guise de punition il offre Iseut aux lépreux. Quand le lépreux Yvain lui propose un châtiment pire que la mort pour la reine, le roi répond : « oui, la vie pour elle, mais à grand déshonneur et pire que la mort (...) » (p.66, 24), avant de la livrer lui-même aux lépreux. Nous pouvons aussi citer sa nuit de noces ou il ne reconnaît pas que c’est la servante Brangien qui « afin de cacher le déshonneur de la reine et pour la sauver de la mort, prit la place d’Iseut dans le lit nuptial ». (p.40, 15-16) Pourtant Marc sait aussi faire preuve de clémence et d’un pardon digne des plus illustres, magnifiquement représenté par l’épisode de la forêt, lorsque il surprend les amants assoupis, l’épée de Tristan entre leurs deux corps. Mais plutôt que de venger son honneur dans le sang, il choisit de les épargner, attendri par l’image pudique et platonique qu’offre la scène. Et c’est ainsi qu’il laisse aux amants des objets symboliques de sa venue, pour « qu’a leur réveil ils sachent (qu’il les a) trouvés endormis, (qu’il n’a) pas

2

voulu leur mort, et que Dieu les a pris en pitié. » (p.77, 13-15) Il reconquiert ainsi l’amour et l’admiration de son neveu comme de sa femme.

Ainsi Marc peut faire preuve de grandeur comme de bassesse. L’abbé Prévost écrit à propos de l’ambiguïté : << Un caractère ambigu, un mélange de vertus et de vices. >>, définition parfaitement applicable au roi Marc

Il n’en est pourtant pas décrédibilisé et sujet au dédains des lecteurs, car ceux-ci peuvent s’identifier au personnage. Tout comme lui, ils ne savent pas trancher sur cet amour. Une ambiguïté du livre au cœur même du subconscient du lecteur.

Il y a d’autres aspects de cette ambiguïté caractéristique du roman de Tristan et Iseut, comme l’indécision qu’il y a entre vérité et mensonge.

Les meilleurs mensonges contiennent une part de vérité.

...

Télécharger au format  txt (16.6 Kb)   pdf (166.9 Kb)   docx (15.2 Kb)  
Voir 11 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com