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Servitude et soumission

Dissertation : Servitude et soumission. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  24 Avril 2017  •  Dissertation  •  2 587 Mots (11 Pages)  •  558 Vues

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La révolte peut être à la fois un sentiment, un acte et une attitude qui s’opposent ouvertement à l’autorité établie , il s’agit d’un refus d’obéir dont l’origine est généralement une violente indignation. Ainsi la révolte commence dès lors qu’un individu refuse d’accepter une situation qu’il considère, à tort ou à raison, comme injuste. Or dans son oeuvre L’ homme révolté , Albert Camus écrit « Dans l'épreuve quotidienne qui est la nôtre, la révolte joue le même rôle que le cogito dans l'ordre de la pensée : elle est la première évidence. », en faisant référence à Descartes par le biais d’une analogie avec le terme « cogito », Camus affirme qu’une certaine connaissance du réel et de soi-même conditionne la révolte. En effet pour Descartes, la recherche de la vérité ne peut se faire que dans les sciences, c’est donc les connaissances qui permettent la compréhension du réel et ainsi une existence intellectuelle de l’individu. Camus écrit aussi que « Mais cette évidence tire l'individu de sa solitude. Elle est un lien commun qui fonde sur tous les hommes la première valeur. », il montre que la révolte permet aussi en retour un renforcement de la liberté et une meilleure prise de conscience individuelle mais aussi à l’échelle collective. Enfin, il finit par attester « Je me révolte, donc nous sommes. » c’est à dire que d’une révolte individuelle peut naître une conscience collective. Mais dans ce cas, la révolte est-elle inséparable d’une connaissance réflexive du monde et de soi-même ? En effet, la révolte permet et renforce l’individu face à ce qui peut causer son aliénation mais il existe des formes de révoltes inconscientes et réciproquement des prises de consciences qui ne conduisent pas à des révoltes.

Grâce à l’oeuvre de La Boétie Discours de la servitude volontaire , le roman Les Lettres persanes de Montesquieu et la pièce de théâtre Une maison de poupée d'Ibsen, nous montrerons en quoi la révolte et la prise de consciences sont inséparables puis pourquoi il existe des situations où l’une existe et pas l’autre et enfin dans quelle mesure la révolte est un phénomène rare chez les peuples par rapport à celui de la soumission qui semble bien plus présent dans l’Histoire ?

Tout d’abord, la prise de conscience et la révolte sont inséparables l’une de l’autre. En effet la conscience peut être à l’origine de la révolte. La révolte consiste à refuser une situation jugée inadmissible. Alors, il semble logique que la révolte soit rendue possible par une prise de conscience. Ainsi les souffrances ou humiliations physiques qui sont infligées ne peuvent pas être oublier car elles marquent à la fois le corps et l’esprit. Dans le cas de Nora, la prise de conscience est un déclencheur de la révolte et se produit précisément au moment où Helmer, après avoir découvert son emprunt et sa fraude dans une lettre de Krogstad, lui demande : « Comprends-tu ce que tu as fait ? ».Elle répond « Oui, je commence à le comprendre parfaitement », c’est une réponse ambivalente, Nora ne veut pas dire qu'elle a pris conscience de sa faute présente, mais de sa soumission passée. Elle constate qu’elle a toujours été considéré comme une femme-poupée. Elle se rend compte que l'état de soumission dans lequel elle a toujours vécu,« j'ai vécu ici comme une pauvresse » lui a enlevé une part de son humanité. Elle veut donc chercher à devenir un être humain, en s’affranchissant du pouvoir de son mari responsable de son aliénation.

Dans Les Lettres Persanes , le premier eunuque noir veut castrer un esclave et celui-ci refuse « il se mit à hurler comme si on avait voulu l'écorcher et fit tant qu'il échappa de nos mains et évita le fatal couteau ». Il s’adresse même directement à son maître par une lettre en affirmant que pour lui c’est « mille fois plus cruelle que la mort » car il a conscience de ce qu’il risque de perdre par rapport aux autres esclavages qui n’ont jamais connu rien d’autre. Effectivement la castration pour lui n'est pas un état « naturel », et c'est pour cela qu’il se révolte. Il en est de même pour les femmes du sérail qui se révoltent , à la fin du roman, profitant de l'absence d’Usbek, cela leur fait prendre conscience de leur condition de vie aliénante et de la possibilité d’une meilleure qui s’ouvrent à elles, « tes femmes se sont imaginées que ton départ leur laissait une impunité entière ». Ces femmes en profitent alors pour voir d'autres hommes en cachette et braver les interdits. De plus la mort du vieil eunuque précipite la chute du sérail ce qui donne naissance à une double prise de conscience à ces femmes, celle des mauvais traitements subis, une « humiliation extrême, un châtiment qui ramène pour ainsi dire à l'enfance » témoigne Zachi mais aussi celle d’une force collective qui les unies dans le malheur comme l’écrit Roxanne « nous n'avons plus rien de libre que les pleurs ».

De même La Boétie démontre qu'une prise d’armes n’est pas nécéssaire, c'est d'une prise de conscience que le peuple a besoin pour se libérer de l'emprise du tyran lorsqu’il affirme « soyez décidés à ne plus servir et vous voilà libres ». Il s’agit d’un travail et d’un apprentissage pour ces peuples, la connaissance est donc la condition préliminaire à toute révolte.

Ainsi qu’il s’agissent de la conscience de soi, de l'injustice ou de la faiblesse des autres, voire même de la ressemblance avec nos semblables, la révolte est à chaque fois le témoignage d'une prise de conscience proprement humaine. C’est le premier mouvement de l’individu pour sortir d’une condition aliénante.

Mais en retour la révolte augmente la conscience. Le fait de s'insurger contre l'ordre établi peut offrir un élan de liberté à celui qui se révolte, il faut certes que cette personne soit déjà conscient pour commencer à se libérer. C’est le cas pour Nora qui parle de son futur à la fin de la pièce lorsqu’elle détruit le lien de dépendance qui la liait à Torvald pour enfin devenir elle-même « Ne te sens plus lié à rien, d'aucune façon, tout comme moi. Liberté entière de part et d'autre » Ce passage à l’acte finit de la libérer, lui permet de s'affirmer de manière définitive « je dois faire ma propre éducation », ce qui signifie « penser par moi-même et tâcher d'y voir clair ». Elle peut désormais se considérer non plus comme une épouse ou une mère, mais comme un être humain libre et autonome. Ainsi, le travail de prise de conscience et de libération n'est pas terminé et se poursuit au-delà

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