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Paul Eluard, La Dame De Carreau

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Par   •  13 Mai 2013  •  1 821 Mots (8 Pages)  •  2 606 Vues

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Introduction :

Membre essentiel du mouvement surréaliste, fondé en 1924 par André Breton, Paul Eluard (de son vrai nom Paul Grindel) a accordé toute son attention aux manifestations de l’inconscient, aux rêves, aux rencontres hasardeuses, aux coïncidences. Ses oeuvres poétiques, outre ses engagements politiques importants (par exemple pendant la Seconde Guerre Mondiale, avec le très célèbre poème “Liberté”), sont souvent inspirés par les femmes aimées, Gala et surtout Nusch, qu’il a épousée en 1934 et dont la mort en 1946 le frappe très durement. Ce poème est extrait du recueil Donner à voir, publié en 1939. Si Eluard reprend ici le même thème que Verlaine (le rêve qui fait surgir la figure de la femme idéale), on se rend compte que le rêve prend ici plus d’importance: dans quelle mesure le rêve devient-il ici essentiel à l’activité poétique elle-même ?

Photographie représentant André Breton (à gauche), Paul Eluard (en haut), Tristan Tzara (en bas), et Benjamin Perret (à droite).

I La toute-puissance du rêve

1) Le rêve, domaine privilégié du poète

L’importance accordée par Eluard au rêve se traduit par la place accordée à la description de ces propres rêves : 8 paragraphes leur sont consacrés. Les deux premiers paragraphes constituent une présentation que le poète fait de lui-même, dans une vocation à la fois amoureuse et poétique, tandis que le dernier réaffirme sa vocation amoureuse, totalement inspirée par la femme qu’il voit dans ses rêves.

Dans le début du texte, Eluard affirme le lien qui l’unit au rêve, en opposant lumière et obscurité : « en vérité, la lumière m’éblouit ». Son domaine va donc être celui de l’obscurité et de la nuit: « j’en garde assez en moi pour regarder la nuit, toute la nuit, toutes les nuits ». On note ici le mouvement ternaire qui élargit le regard du poète, ainsi que le jeu de mots garder /regarder, qui présente le poète comme un être lumineux apte à percer l’obscur mystère du rêve.

2) La vraie vie ?

A la différence de Verlaine, Eluard évoque chacun des rêves ou figure la femme aimée par des images très précises :

• « A l’école »

• « Ailleurs, elle me quitte. Elle monte sur un bateau. »

• « Ou bien, quand elle est malade »

• « Je cours d’autant plus vite à ses rendez-vous »

• « Une fois, le monde allait finir…»

Cependant les catégories temporelles sont ici remplacées par les compléments de lieux : « Ailleurs », « A l’école» : le poète parcourt des espaces du rêve, à chaque lieu, à chaque rêve est associé à un moment de l’amour.

Les indications de temps: « ses rendez-vous », « quand elle est malade » et les temps verbaux (présent itératif) indiquent la répétition des mêmes scènes : le rêve détruit le principe de la linéarité chronologique ; il permet de dépasser les cadres de la pensée rationnelle. L’écriture cherche à rendre cette impression de totale évidence du rêve, alors même qu’il n’obéit à aucune logique.

Mais cette présentation finit malgré tout par suggérer une sorte de biographie, depuis l’enfance (l’école, les maladies) jusqu’à la fin des temps (« Le monde allait finir»), en passant par les moments traditionnelles de la vie amoureuse, la séparation (« elle me quitte »), les rendez-vous, le coup de foudre « l’innocence de ses yeux me confond», le baiser (« Elle a cherché mes lèvres »). Le rêve se substitue à la réalité: c’est en lui que s’accomplit réellement la vie, même si de toute évidence le personnage féminin relève de l’idéalisation propre au songe.

Gala Eluard (1924), peinture de Max Ernst réalisée à partir d’une photographie de Man Ray

II L’idéalisation de la femme aimée : l’alliance des contraires

1) Une et multiple

Présentée comme à la fois une et multiple : cette opposition est sensible dès le début du texte avec l’opposition :

« Toutes les vierges sont différentes. Je rêve toujours d’une vierge » : la femme aimée réunit à elle seule la multiplicité des possibles.

Cette même opposition se retrouve à la fin du texte, ou l’adjectif « même » sert à qualifier à la fois la ressemblance et la différence :

Forme affirmative : « même » répété 6 fois, employé avec l’adverbe « toujours ». Caractérisant des éléments particuliers, qui semblent décomposer la personne en différentes parties (aveu, jeunesse, yeux purs, geste, caresse, révélation).

Forme négative : « même » utilisé une seule fois, associé à l’adverbe « jamais ».Caractérisant la personne entière : « femme ».

2) Pureté et sensualité

Personnage qui est fois évoqué avant tout par sa jeunesse, d’abord explicitement mentionnée : « sa jeunesse est si grande » ; « la même jeunesse ». Mais aussi suggérée par les images choisies : « au banc devant moi, en tablier noir » (l’école), « quand elle est malade » (ce qui suggère la fragilité, les maladies « enfantines »).

Le champ sémantique de la pureté est également très présent, souvent associé au regard : « vierge » « l’innocence de ses yeux », « les mêmes yeux purs », « le même geste ingénu ».

Mais en même temps, elle reste associée à des images de sensualité : « elle passe ses bras autour de mon cou », « son baiser », « elle a cherché mes lèvres avec des mouvements de tête lents et caressants », « ses bras autour de

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