Madame Bovary, Flaubert

Le personnage de roman du XVIIème siècle à nos jours.

Texte 1 : extrait de Madame Bovary, Gustave FLAUBERT, 1857

• INTRODUCTION :

        Flaubert est un auteur du XIXème siècle qui a d'abord écrit des fictions fantastiques, baroques et exotiques faisant preuve d'excentricité et de fantaisie. Il a par exemple écrit des contes et des nouvelles (ex : Salammbô). Puis, finalement, il rechercha une écriture plus maîtrisée, influencée par le réalisme. Au  XIXème siècle, on recherche une approche plus rationnelle des personnages. Il façonne son texte mot par mot : ce qui donne une écriture très soignée ; qu'il teste ensuite dans son « gueuloir ». Avec cette écriture, il décide d'observer les comportements des individus et de la société avec détachement et ironie.

        Il écrit Madame Bovary sur les conseils d'un ami à partir d'un fait divers. Ce roman raconte l'histoire d'une femme de médecin qui devient dépressive et qui finit par se suicider en mangeant de la mort au rats. Avec Madame Bovary, il observe la vie d'une femme en détail : de sa jeunesse à sa mort. Il montre Emma, fille d'un fermier aisé, qui fréquente un internat de filles riches. Elle y rencontre Monsieur Charles Bovary, un médecin riche ; ils se marient, et là, commence... l'ennuie !  Madame Bovary est un roman de l'ennuie et de la désillusion. Il a été jugé immoral et a valut à Flaubert un procès, qu'il a fini par gagner.

        Ce passage se situe juste après le mariage de Charles et Emma. Il est fondamental parce qu'il décrit le désenchantement d'Emma alors qu'il devrait être un moment de changement.

        Nous allons étudier comment le personnage d'Emma Bovary s'isole dans sa propre vie. D'une part, nous verrons que sa vie et une vie rêvée qui l'isole, et d'autre part, nous verrons que son quotidien banal l'a rend malheureuse.

• ANALYSE :

1. Une vie rêvée qui isole le personnage.

        L'extrait est marqué par le sceau du rêve puisque le premier mot est le verbe songer. Il s'en suit alors dès la deuxième ligne l'évocation de ses fantasmes avec d'abord l'utilisation du subjonctif l.2 « il eût fallu » qui introduit un irréel passé qui lui-même admet une note désespérée et qui coupe le rêve d'une réalité possible.

        Le texte se poursuit alors avec l'utilisation du présent, ce qui permet de figer le personnage comme une scène. Le lecteur vit le rêve du personnage en temps réel, cela souligne l'importance du rêve dans la vie d'Emma. Dans cette évocation des rêves on retrouve différents champs lexicaux qui sont significatifs : le champ lexical de la volupté, c'est-à-dire le plaisir physique (l.1 « lune de miel » ; l.2 « douceur » ; l.3 « suaves paresses » ; l.7 « doigts confondus ; l.8 « bonheur ») qui s'ajoute à celui de la beauté de la nature  (l.5 « montagne » ; l.6 « soleil se couche », « parfum des citronniers » ; l.7 « étoiles ») et celui de la richesse (l.2 « ces pays à nom sonore » ; l.4 « stores de soie bleue » ; l.5 « postillon »). La présence de ces champs lexicaux montre que le personnage accorde une grande importance aux conditions matérielles et aux apparences, qui selon elle, sont les conditions indispensables à l'épanouissement de ses sentiments.

        Les pensées d'Emma consistent en une accumulation de lieux communs (l.5 « la montagne » possède « des chèvres à clochette » et une « cascade » ; l.6 « le bord des golfes » possède «  des citronniers » et un « coucher de soleil »). Il en est de même pour l'évocation de l'homme idéal (l.25 « Un homme, au contraire, ne devait-il pas, tout connaître, exceller en des activités multiples, vous initier aux énergies de la passion, aux raffinements de la vie, à tous les mystères ? »). Cette phrase est construite en accumulation et montre l'exigence du personnage féminin. On peut d'ailleurs noter l'utilisation d'une hyperbole avec l.25 « tout connaître » ou encore des contradictions entre à la fois : l'énergie de la passion, la spontanéité et le raffinement de la vie. On peut également constater que dans cette phrase, seul l'homme accomplit des actions, la femme est absente. Le lecteur comprend ainsi qu'Emma refuse l'action pour s'enfermer dans des rêves stériles.

        Ce sentiment d'échec et de défaitisme est particulièrement visible dans les deuxième et troisième paragraphes avec la présence de phrases exclamatives et interrogatives. L'évocation de sa tristesse est en quelque sorte magnifiée, donc acceptée comme quelque chose de stylisé et artistique.

        Dans la suite du texte, le personnage apparaît sans réactions extérieures. On ne la voit pas réagir. La multiplication des sens est réservée au début du texte. Elle est montrée dans trois activités : la lecture, le piano et le dessin. Ces activités montrent l'éducation et le raffinement du personnage mais elles l'isolent et offrent à Charles le simple rôle de spectateur.

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