Lecture analytique sur "L'albatros" des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire

Lecture analytique n°3 : Charles Baudelaire – « L’Albatros » - Les Fleurs du mal, 1859

          Né en 1821 à Paris, Charles Baudelaire est un poète français. Il est influencé par le romantisme lyrique et il est le précurseur du symbolisme qui apparaît en 1860, avec Verlaine et Rimbaud notamment. Charles Baudelaire a connu une enfance relativement difficile de part le décès de son père suivi du remariage de sa mère, avec un beau-père qu’il n’accepte pas. Son idéal est le ciel, connoté à la liberté et à l’échappatoire de la terre, qui, quant à elle, est synonyme d’enfer pour le poète. Toute sa vie, il tentera de la quitter pour rejoindre le ciel. Selon lui, la consommation de drogue permettrait aux hommes de se faire transcender vers l’idéal. Ses œuvres notables sont Le Spleen de Paris, Les Paradis artificiels et Les Fleurs du mal. Dans « L’albatros », extrait de ce recueil, Baudelaire évoque son voyage à l’Île Bourbon (actuelle Réunion). Il y a gardé un très bon souvenir de part la mer qui semble mener à son idéal. Le poème en question est écrit à la suite d’une scène vécue, où Baudelaire serait intervenu avec violence contre des matelots qui auraient pris des albatros pour leur brûler les yeux. De ce fait, le poème est publié en 1859 avec trois strophes à l’origine, puis une quatrième strophe sur la suggestion d’un ami du poète.

          Comment Baudelaire décrit-il les poètes dans son texte?

          En quoi ce poème est-il une analogie entre le poète et l’albatros?

          Plan : Un univers maritime qui oppose deux espaces ; Le récit d’une capture ; Un récit allégorique : une parabole

I/ Un univers maritime qui oppose deux espaces

A/ Un univers maritime

1. V2 et 4 : rimes « oiseaux des mers » / « gouffres amers »  → jeu de construction par le mot « mer »

• Présentation d’emblée comme la narration d’une scène de la vie en mer.

1. Champ lexical maritime : « hommes d’équipage », « albatros », « oiseaux des mers », « le navire », « les planches », « avirons », « la tempête »

Il est cependant à noter que cet univers est scindé en deux parties totalement opposées : le ciel et le sol.

B/ Les marins

1. V1 Déterminants pluriel : « les hommes »

De plus V11-12 : « L’un… / L’autre… »

• généralisation de l’auteur

1. v11 : terme péjoratif et vulgaire : « brûle-gueule » → la pipe, caractérisant les hommes du poème

C’est l’esquisse d’un monde trivial, rude, grossier et sans issue possible, à l’inverse du ciel.

C/ Le ciel → l’albatros

1. Succession de périphrases

V2 : « vastes oiseaux des mers » et « indolents compagnons de voyage »

V3 : « rois de l’azur »

V6 : « voyageur ailé »

V9 : « Prince des nuées »

• Pas moins de 4 syllabes → importance de l’albatros
• Connotation de l’idée de majesté, (« prince », « roi »), d’ouverture (« azur », « voyage »)
• Symbiose entre l’albatros et son milieu (la même idée de liberté, de l’idéal)

1. Rythme et sonorités → l’harmonie du vol et son déploiement

• Effet d’allongement ← prononciation des « e » muets :

V1 : « les hom/mes »

V2 : « le navi/re »

V3 : « vas/tes oiseaux »

Allitération en « s » et en « v » → trajectoire fluide et continue de l’albatros

Allitération nasale → ton monotone du poète 

Prédominance des consonnes continues :

 - sifflantes (s/z)

- liquides (l/r)

→ fluidité de l’air et de l’eau

Il est décrit un espace ouvert, infini et surtout vertical comme Baudelaire les aime. Voici maintenant la seconde facette de l’albatros lors de la capture. Elle s’avère beaucoup moins majestueuse.

II/ Le récit d’une capture

A/ L’emprisonnement de l’albatros

1. Changement de lieu

1er quatrain : albatros suivant le navire en volant → 2ème quatrain : albatros sur les planches

•  plan d’ensemble privilégiant la vision céleste → plan rapproché
• EMPRISONNEMENT AU SOL DE L’ALBATROS

1. La capture, une torture physique et morale

Physique : V11 : voix passive « bec brûlé par une pipe »

Morale : V9-10-12 : exclamatives [citer]

Ici, il s’avère flagrant de noter le contraste entre la perception de l’albatros dans le ciel (sa majesté, sa liberté, son élégance) et sur le sol (emprisonné et victime de moqueries). Il s’agit d’un renversement de situation.

B/ La déchéance de l’albatros

1. Termes de sens contraire : « roi de l’azur » → être « gauche »

« Prince des nuées » → « maladroit » et ridicule

• Renversement de situation, une fois sur le sol

1. Jeux d’opposition :

V7 : « ailes » qualifiées des deux épithètes « grandes » et « blanches » → comparaison à des « avirons » V8.

Antithèses : « rois de l’azur » → « maladroits et honteux » V6

« beau » → « laid V10

« voyageur ailé » → « gauche et veule » V9

Oxymore « infirme qui volait » V12

• Inadaptation tragique de l’oiseau au sol

L’albatros perd l’intégralité de ses moyens en se posant sur le sol. De plus, une fois à terre, il lui est impossible de rejoindre le ciel. C’est pourquoi sa chute est dramatisée.

C/ La dramatisation de la chute

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