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Le Parnasse

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Par   •  7 Avril 2014  •  2 725 Mots (11 Pages)  •  2 363 Vues

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e mont Parnasse est, dans la mythologie grecque, le lieu de résidence d'Apollon et des neuf Muses. L'usage métonymique de ce nom pour désigner une assemblée de poètes est déjà ancien lorsque l'éditeur Alphonse Lemerre publie à partir de 1866 une anthologie de poésie moderne qui prend le nom de Parnasse contemporain. Le mot désigne tout de suite ces poètes qui se reconnaissent dans leur réaction contre le Romantisme. D'abord groupés autour de Théophile Gautier, il se réunissent le samedi soir chez Leconte de Lisle ou José-Maria de Hérédia : Banville, Villiers de l’Isle-Adam, Sully Prudhomme, François Coppée apparaissent comme les plus représentatifs. À l'épanchement personnel, les Parnassiens opposent un souci d'impersonnalité qui leur fait fuir les facilités du lyrisme. Leurs métaphores, constamment empruntées au domaine de la sculpture, prônent le travail poétique, résolument asservi au culte d'une forme parfaite. Loin de l'engagement social des Romantiques, ils se prononcent enfin pour une retraite hautaine, tout entière vouée à la célébration d'une Beauté divinisée. Ces tendances se prolongeront dans le Symbolisme.

1. Le Beau.

Profondément déçus dans leurs aspirations révolutionnaires, les Parnassiens ont manifesté le souci de sortir l'Art de l'arène politique et, plus généralement, des visées sociales que lui assignait le Romantisme. Leur célébration du Beau trouva dès lors un équivalent acceptable dans la beauté plastique de la statuaire hellénique, dont la chaste perfection, alliée au gage que lui donne la durée temporelle, s'oppose aux contingences de l'Histoire. Pour exprimer ce «rêve de pierre», les images et les symboles deviennent systématiques : cygnes immaculés, statues impassibles, pics neigeux, saltimbanques amoureux des étoiles.

Charles Baudelaire (1821-1867)

La Beauté (Les Fleurs du Mal, 1857)

Sans appartenir au Parnasse, dont il condamnera le culte excessif de la forme, Baudelaire poursuit une méditation esthétique où s'exprime une mystique de l'Art et de la Beauté. Ce culte austère prend même la forme d'une véritable morale, la création poétique constituant à ses yeux « le meilleur témoignage que nous puissions donner de notre dignité » (Les Phares).

Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre

Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour,

Est fait pour inspirer au poète un amour

Éternel et muet ainsi que la matière.

Je trône dans l'azur comme un sphinx incompris ;

J'unis un cœur de neige à la blancheur des cygnes ;

Je hais le mouvement qui déplace les lignes,

Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.

Les poètes, devant mes grandes attitudes,

Que j'ai l'air d'emprunter aux plus fiers monuments,

Consumeront leurs jours en d'austères études ;

Car j'ai, pour fasciner ces dociles amants,

De purs miroirs qui font toutes choses plus belles :

Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles !

Questions :

Montrez comment ce sonnet condense les aspirations essentielles du Parnasse (divinisation du Beau, rigueur du travail poétique, refus du lyrisme) et réunit les images qui les exprimeront le plus fréquemment.

Du fait de la dimension religieuse qu'il donne à l'Art, la création artistique apparaît souvent chez Baudelaire comme un véritable combat. «L’étude du beau est un duel où l’artiste crie de frayeur avant d’être vaincu», note-t-il dans Le Confiteor de l'artiste (Petits poèmes en prose). Tiré de ce même recueil, l'apologue ci-dessous vous permettra de caractériser la hauteur de l'enjeu mis sur la création poétique :

Le Fou et la Vénus

Quelle admirable journée ! Le vaste parc se pâme sous l’œil brûlant du soleil, comme la jeunesse sous la domination de l’amour. L’extase universelle des choses ne s’exprime par aucun bruit; les eaux elles-mêmes sont comme endormies. Bien différentes des fêtes humaines, c'est ici une orgie silencieuse. On dirait qu'une lumière toujours croissante fait de plus en plus étinceler les objets ; que les fleurs excitées brûlent du désir de rivaliser avec l’azur du ciel par l’énergie de leurs couleurs, et que la chaleur, rendant visibles les parfums, les fait monter vers l’astre, comme des fumées. Cependant, dans cette jouissance universelle, j'ai aperçu un être affligé. Aux pieds d’une colossale Vénus, un de ces fous artificiels, un de ces bouffons volontaires chargés de faire rire les rois quand le remords ou l’ennui les obsède, affublé d’un costume éclatant et ridicule, coiffé de cornes et de sornettes, tout ramassé contre le piédestal, lève des yeux pleins de larmes vers l’immortelle déesse. Et ses yeux disent : "Je suis le dernier et le plus solitaire des humains, privé d’amour et d’amitié, et bien inférieur en cela au plus imparfait des animaux. Cependant je suis fait, moi aussi, pour comprendre et sentir l’immortelle beauté ! Ah ! déesse ! Ayez pitié de ma tristesse et de mon délire." Mais l’implacable Vénus regarde au loin je ne sais quoi avec ses yeux de marbre.

2. Le travail poétique.

La recherche d'une Beauté idéale et la place donnée au poète dans la société ne pouvaient manquer de générer une conception nouvelle du travail poétique. Celui-ci est assimilé par les Parnassiens à un effort acharné pour extraire de la matière la plus dure une forme impérissable, «comme un divin métal au moule harmonieux» (Leconte de Lisle). Le poète devient ainsi sculpteur ou ciseleur, préoccupé par la plastique plus que par l'Esprit, et c'est sur ce point que les Symbolistes feront porter leurs objections.

Théodore de Banville (1823-1891)

à Théophile Gautier (1856)

Ce poème fut publié

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