Analyse linéaire de la première strophe de « L’Ennemi » de Baudelaire

Au premier vers, on observe différents éléments qui comment une métaphore filée du temps qui passe en intempéries : par exemple, le temps du verbe conjugué (« fut ») est le passé simple : ce temps montre que le poète nous parle d’un passé bien fini et éloigné dans le temps. L’idée d’intempéries est amenée par le terme de « ténébreux orage » ; l’adjectif « ténébreux », à valeur péjorative, donne au temps une image mauvaise, et aussi énigmatique : on ne comprend pas le temps. La métaphore est en outre bien ancrée par une négation restrictive qui délimite la jeunesse de l’auteur à cet orage. Ensuite, le second vers souligne d’une part l’impuissance face au temps : en effet, on relève une voix passive non-verbale avec « traversé », qui montre la passivité de l’homme devant ce temps. D’autre part, il poursuit sa métaphore filée, avec « de brillants soleils », ce qui installe de plus une notion de variation dans la vie du fait du mélioratif de « brillant » : le temps, météorologique comme chronologique, décide seul des joies et des malheurs. Aux troisième et quatrième vers, le poète nous montre la conséquence du temps : une fois l’environnement et l’image bien installés, le changement de phase est marqué par le point-virgule. La conséquence du temps est marquée par une subordonnée corrélative, qui installe par définition une relation corrélative : « un tel ravage qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils ». Le temps, ici encore marqué par « le tonnerre et la pluie », provoque un ravage qui détruit le jardin, qui peut être vu comme une métaphore de la vie. Le terme « vermeil » peut suggérer le raisin, qui est symbole de bien-être, de santé, et même de pléthore, comme dans Le renard et les raisins d’Ésope, où un renard se refuse à des raisins car il ne les trouve pas assez mûrs. L’adjectif « peu » peut donc signifier cette absence de bien-être dans une vie qui a été ravagée par le temps.

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