LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Analyse Eldorado

Commentaire de texte : Analyse Eldorado. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Mai 2020  •  Commentaire de texte  •  2 170 Mots (9 Pages)  •  455 Vues

Page 1 sur 9

LE DEVELOPPEMENT DU COMMENTAIRE

I] Une scène de rencontre mystérieuse

Le cadre:

Laurent Gaudé ancre son histoire et cette scène dans un lieu réaliste, authentique: Lampedusa est île italienne, située entre la Sicile et la Tunisie, réputée dans les médias pour être une porte d’entrée pour les migrants clandestins. Le lecteur averti peut tout à fait faire le lien avec l’actualité. C’est un lieu peu décrit, plutôt étrange, qui semble marqué par le déséquilibre: « La silhouette étrange de ces croix de guingois ». Les croix sont personnifiées, peuplant ainsi le cimetière de la figure de ceux et celles qui y sont enterrés. L'adjectif « étrange » ne met pas le lecteur vraiment en confiance. Le cimetière est visiblement le reflet concret d’une posture humaine, d’une absence d’humanité: « se demanda si l’hospitalité des gens de Lampedusa s’était usée »

2) Les personnages :

● Les premières lignes permettent également de rentrer en lien avec le personnage principal. On a appris que c’était un commandant de bord italien, un garde-côtes, un homme qui incarne la loi, l’autorité, et une forme d’inflexibilité. Pour autant, ce qui est curieux ici, c’est que cet homme semble déjà ne plus incarner sa figure titulaire, il a une faille, il doute. Cela se traduit par une double proposition subordonnée indirecte « se demanda si », la seconde n’était plus introduite par un verbe, elle dépend implicitement de la première (le verbe est sous –entendu): « Si lui aussi… »

Le champ lexical de l’usure dans la première strophe souligne un manque « s’était usée » asséchée », qu’il s’agisse de l’attitude des gens de l’île dont on souligne une forme d’indifférence pour les migrants, ou qu’il s'agisse de SP qui semble blasé par toute la misère  qu’il croise. Ici la métonymie « à trop croiser la misère » (au lieu de croiser des gens dans la misère) renforce la déshumanisation. Les migrants ne sont pas perçus comme des individus mais comme un tout « la misère ».

● L’inconnu:

son arrivée: elle est énigmatique et saisissante: « c’est alors qu’une voix le fit sortir de ses pensées ». Le choix de la phrase emphatique au présent crée une sorte de surgissement. Salvatore est surpris et le lecteur l’est avec lui. Le mot « surprise » est d’ailleurs répété deux fois (lignes 7 et 24).

- Les substituts lexicaux qui servent à parler de lui « une voix/ un homme/ l’inconnu/ l’intrus/ un simplet/ une sorte de reclus/ l’homme/ le petit homme / l'inconnu » maintiennent un mystère et ne permet pas au lecteur de connaître son identité. La présence de mots qui finissent en [u] créent une assonance qui discrédite ce personnage, comme si on le couvrait de huées!

- Une description rapide et antithétique accentue encore cet effet. Nous avons quelques indications sur son physique: « homme maigre au dos voûté [qui] avait qqch d’étrange dans sa façon de se tenir ». L’homme inspire la méfiance. Les termes sont péjoratifs « simplet » « reclus ». Sauf que l’extérieur ne semble pas en adéquation avec l’intériorité du personnage: « il parlait bien. Avec vivacité. » La vivacité de son esprit est également traduite par l’emploi de phrases très courtes, très rythmées pour le coup. il est une antithèse à lui tout seul : « sa voix contrastait avec son physique ».

=>  On comprend que la vision qui est donnée du personnage est celle du commandant. Nous voyons à travers ses yeux, et nous jugeons en fonction de son jugement à lui. Nous sommes bien dans une scène racontée selon un point de vue interne. Les traces de ce point de vue sont présentes également dans les verbes de perception, qui prouvent bien que c’est le ressenti du commandant qui prime: « entendit-il/ il ne l’avait pas entendu/ le contempla/ il observa » ou bien l’emploi du conditionnel «  on aurait dit » qui montre bien la subjectivité, l’opinion personnelle du commandant.

3) La rencontre en elle-même:

La rencontre se fait sous le double axe de la surprise et du rejet. Dans un premier temps, la surprise est accentuée par des effets de répétition « avec surprise » « immobile de surprise ». Le discours rapporté indirect libre permet d’accéder aux pensées du personnage principal où l’on découvre que la surprise se traduit en toute une série de questions rhétoriques: « le gardien du cimetière? Un homme venu se recueillir? » Et plus loin « qui était cet homme? Pourquoi lui avait-il dit tout cela? Avait-il assisté à la bagarre? » A ce sentiment de surprise se superpose un sentiment de rejet: « avec mauvaise humeur  », « Piracci n’avait pas envie de nourrir la moindre discussion »; « il espérait que son regard le ferait sentir. » La métaphore « n'avait pas envie de nourrir » montre que le commandant est un homme qui n’a rien à donner, il est vide, froid et sec.

De l’autre côté , l'homme n’est pas dans rejet mais plutôt la connivence et le rapprochement. Cela est notable dans l’emploi des pronoms: « vous et moi »  évoluent peu de temps après en « nous autres ».

🡺 Cette rencontre vécue de l’intérieur (point de vue interne) rend originale cette scène de rencontre. Là où la connaissance de personnage reste limitée, la connaissance du lecteur est également limitée. Le mystère reste entier. Nous pouvons même nous interroger sur la véracité de ce qui est dit… Ce personnage existe-t-il vraiment? Ne serait-il pas plutôt le produit de l’imaginaire de Piracci, victime quelque part de son isolement, de ce que le cimetière lui inspire avec tous ces morts autour de lui? D’ailleurs n’est-il pas écrit qu’il ne l’a « pas entendu s’approcher »? Comme s’il était sorti de nulle part, comme s’il était immatériel…

...

Télécharger au format  txt (13.6 Kb)   pdf (81 Kb)   docx (15.4 Kb)  
Voir 8 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com