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Jean Genet, Les Bonnes

Commentaire de texte : Jean Genet, Les Bonnes. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Mars 2023  •  Commentaire de texte  •  2 292 Mots (10 Pages)  •  122 Vues

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 Commentaire linéaire Les Bonnes, p19-21 (début de la pièce)

  L’œuvre étudiée aujourd’hui est une pièce de théâtre intitulée Les Bonnes écrite par Jean Genet et représentée pour la première fois en 1947. Il s’agit d’une œuvre qui est un drame onirique plus que singulier puisqu’il ne possède pas de sous-titres et n’est découpé ni en acte, ni en scènes. On peut aisément s’imaginer que le dramaturge que rien ne destinait à écrire une telle pièce de théâtre s’est éventuellement inspiré d’un fait divers sordide : celui des sœurs Papin qui assassinèrent sauvagement leurs patronnes au Mans en 1933.
De ce fait, cette pièce présente l’histoire de deux bonnes, deux sœurs : Solange, l’aînée et Claire qui travaillent au service de Madame.
Dans la chambre de Madame, elles accomplissent en son absence une représentation, où Claire incarne Madame et Solange se transforme en sa propre sœur. Amour et haine à l'égard de Madame s'y mêlent dans ce jeu diabolique. Jeu de rôle que les bonnes reproduisent tous les soirs : peut donner l’impression d’un mouvement cyclique, cependant on peut constater une progression dans les différentes représentations et les bonnes sont capables d’adapter leur jeu à de nouvelles données. On passe d’un jeu sans effet à une « cérémonie » en ce qu’elle consacre un idéal dans la réalité.  L’extrait étudié correspond au début de la pièce juste après une scène d’exposition très paradoxale et bien avant que le réveille-matin ne sonne. De ce fait, cet extrait, met en scène les bonnes Claire et Solange qui sont toujours dans l’univers de leur représentation. Rappelons-le, Solange interprète Claire et Claire interprète Madame.
L’extrait se présente sous la forme d’un dialogue, où Claire qui joue le rôle de Madame semble emporté par son interprétation, le rythme semble s’accélérer et l’on comprend que le ton monte. Il est question du choix de la couleur de la robe de Madame et qui déclenche un moment important puisqu’il est question de Monsieur. Il a déjà rapidement été mentionné avant l’extrait étudié mais ici on obtient plus de précision. En effet, ce dernier est l’amant de Madame et l’on comprend qu’il est au bagne, et l’on comprend aussi les circonstances qui l’y ont mené.
On peut donc distinguer 2 mouvements dans cet extrait.
En effet, le premier mouvement débute par la réplique de Claire, qui installe une certaine ambigüité qui va se déployer jusqu’à la fin de l’extrait. Comme une impression qu’elle quitte son rôle et cela instaure une instabilité au niveau de son identité. Et puis il lui arrive de reprendre son rôle de Madame. Elle agence d’ailleurs le jeu à sa convenance : apparaît comme une metteuse en scène.
Dès lors, cela permet d’introduire le deuxième mouvement à partir de la tirade de Claire qui confirme ce que l’on supposait précédemment : elle révèle son identité de bonne et le rôle qu’elle a joué concernant l’emprisonnement de Monsieur mais elle reprend rapidement son rôle de Madame à la fin.
 
On peut donc se demander en quoi ce passage est révélateur d’une vraie ambigüité où dans ce jeu de rôle tout n’est pas simple, où la répartition des rôles n’est pas si évidente, ni même stable et où les identités s’interchangent ?

1er mouvement :
Le premier mouvement débute par Claire qui joue le rôle de Madame, sa réplique est dynamique et débute par une interjection « Ah ! » renforcé par la modalité exclamative. Elle semble exprimer ses émotions avec vivacité et intensité. C’est juste après cette interjection que l’on est plus très sûr de son identité. En effet, lorsque les deux sœurs sont en train d'interpréter le rôle de Madame ou de la bonne, elles utilisent le pronom « vous ». Il est important d’être attentif à ces variations énonciatives dans le texte, car elles nous permettent de saisir l'instabilité de l'identité des deux bonnes dans les scénarios. Lorsqu' elles ne sont pas dans leur jeu de rôles, Claire et Solange se tutoient.
Mais ce tutoiement permet surtout d’installer un doute constant qui doit saisir le spectateur et par conséquent il ne sait jamais si le jeu est totalement sérieux. Cela crée une vraie continuité avec la scène dite d’exposition qui posait déjà les bases que l’on vient tout juste d’énoncer. Claire emploi donc ici la deuxième personne du singulier. De plus, elle interpelle sa sœur par son vrai prénom : « Solange » On peut notifier que c’est la première fois que cela se produit, qui fait comme une allusion à la réalité. Mais une réalité qui se mélange constamment avec le contexte de la représentation. Elle emplois également des impératifs, un peu comme si elle se sentait menacée
On peut supposer dans un premier temps que Claire sort donc de son rôle et s’adresse à sa sœur.
De plus, on a comme une impression que Claire se plait en prenant le rôle de Madame, en interprétant le rôle de cette femme puissante. On a également une impression qu’elle se plaît à prendre ce rôle pour s’adresser à sa sœur. Elle n’hésite pas à l’interpeller par un adjectif péjoratif et rabaissant : « Sotte », c’est également un terme que Madame aurait pu prononcer.
Solange, dans le cadre du jeu de rôles avec Claire, occupe une posture de retrait. La didascalie précise cette supposition puisqu’elle se révèle « pitoyable » Elle parle le moins, le dialogue est assez déséquilibré. Claire, pour sa part, en jouant Madame, devient celle qui domine

Ce qui favorise ce déséquilibre est qu’elles n’avancent pas à la même allure. Comme une impression que Claire s’emporte et va trop vite. Elles ne s’engagent d’ailleurs pas de la même façon dans le jeu et dans l’action. Claire ne respecte peut-être pas totalement les règles et les étapes de la représentation. En effet, elle l’affirme elle-même en disant « ce n’est pas l’instant de le rappeler »
les propos de Solange le confirme puisqu’elle affirme que « Ce n’est pas le moment d’exhumer… ». On peut remarquer un choix de verbe particulier, le terme exhumer signifie tirer un cadavre de sa sépulture, ou encore retirer quelque chose du sol. Ici, il est possible de l’adapter au contexte : ici Claire l’interprète comme retirer quelque chose de soi : elle interrompt donc sa sœur sans ménagement et s’emporte de plus belle : et parle « d’infamie ». Ce terme est répété 2 fois placé de façon anaphorique, ce qui crée vraiment un effet d’insistance et de théâtralité : on peut supposer que dans cette réplique elle reprend le rôle de Madame.

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