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Commentaire - Cour de cassation, Chambre civile 1, 30 avril 2009, 08-11.093, B.

Commentaire d'arrêt : Commentaire - Cour de cassation, Chambre civile 1, 30 avril 2009, 08-11.093, B.. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  10 Mars 2023  •  Commentaire d'arrêt  •  2 534 Mots (11 Pages)  •  179 Vues

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Commentaire - Cour de cassation, Chambre civile 1, 30 avril 2009, 08-11.093, B.

         Le juriste et fiscaliste français, Maurice Cozian, écrivait à propos du consentement du créancier à la cession de dette de son débiteur, que celui-ci est « nécessaire pour que la cession de dette soit efficace à son égard, même si celle-ci a été convenue par le débiteur et le cessionnaire. En effet, le créancier est titulaire d'un droit personnel qui ne peut être transféré sans son accord. La cession de dette sans le consentement du créancier ne produit donc d'effets qu'entre le cédant et le cessionnaire. ». C’est ce qu’affirme précisément l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour régulatrice le 30 avril 2009.

         En l’espèce, un propriétaire d'un terrain a confié la construction d'une maison à une entreprise, qui a sous-traité les travaux à d'autres entreprises. Des malfaçons étant apparues, le propriétaire a assigné les constructeurs et leurs assureurs en responsabilité civile. L'entreprise qui avait sous-traité les travaux a cédé son fonds de commerce à une autre société, et demande à être exempté de toute responsabilité dans cette affaire. La cour d'appel a estimé que la société ayant cédé son fonds de commerce pouvait être mise hors de cause dans l'affaire, car le contrat de cession stipulait que toutes les dettes et créances de l'entreprise étaient transférées à l'acquéreur et que la cession a été consentie moyennant le prix symbolique de un euro. Le propriétaire du terrain a formé un pourvoi en cassation contre cette décision.

          La cession des dettes prévue lors de la cession d'un fonds de commerce peut-elle avoir un effet à l’égard du créancier du fond même s’il n’a pas consenti à cette cession ?  

          La première chambre civile de la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par les juges du fond au visa de l’article 1165 du Code civil. Elle rappelle que les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes et qu’elles ne nuisent pas au tiers en lui profitant que dans le cas prévu par l’article 1121 du Code civil. Elle en déduit « qu’une telle cession ne pouvait avoir effet à l’égard du créancier qui n’y avait pas consenti ».

         Premièrement, l’arrêt prévoit que la cession de dette est impossible sans le consentement du créancier à la réalisation de celle-ci (I) ; et fait par conséquent l’accord du créancier, la condition pour que la cession de dette du débiteur à un acquéreur soit valide (II).

  1. Une cession de dette ineffective sans l’agrément du créancier

         Dans son arrêt du 30 avril 2009, la Cour de cassation s’est d’abord fondée sur le principe de l’effet relatif des contrats (A) ; puis les juges semblent admettre implicitement la possible opération de cession de dette d’un débiteur à son acquéreur de fonds de commerce (B).

  1. L’application du principe de l’effet relatif du contrat pour la cession de dette

        Dans sa décision, la Cour de cassation rappelle avec force que l’obligé principal à une dette n’est pas en mesure d’imposer à son créancier contractuel, au moyen d’une convention passée avec un tiers à laquelle le contractant originaire n’a pas consenti, une substitution de ce tiers dans le lien passif d’obligation, afin de se prétendre libéré du poids de sa dette. En l’espèce, la Cour d'appel avait exonéré le premier constructeur de toute responsabilité en invoquant une clause de l'acte de cession de son fonds de commerce qui planifiait expressément que « les créances et la totalité des dettes générées par l'activité du cédant sont transmises à l'acquéreur ». Cependant, la Cour de cassation au visa de l'article 1165 en vigueur antérieurement à l’ordonnance de 2016 révisant le Code civil, qui prévoyait que « les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'elles ne nuisent point au tiers et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 du code civil », a jugé qu'une telle cession ne pouvait avoir effet à l'égard du créancier qui n'y avait pas consenti. En outre, elle précise que cette clause ne pouvait être opposée au créancier du fond, qui n'avait pas donné son consentement à la cession de dette, en application du principe de l’effet relatif du contrat institué par l’ancien article 1165 du Code de 1804. Effectivement, le consentement du créancier était essentiel car, il est la base de ce principe, qui permet de déterminer les parties liées par un contrat et les obligations qui en découlent. C’est-à-dire que les tiers qui n'ont pas donné leur consentement ne peuvent pas être liés par un contrat, même s'ils sont indirectement ou directement affectés par ses effets, comme le créancier par la cession de dette en l’espèce. Donc en l’espèce, le consentement de celui-ci était nécessaire pour que la cession de dette lui soit opposable, puisque la dette est une obligation qui naît entre le débiteur, qui doit payer la dette, et le créancier qui lui a le droit de recevoir le paiement. Ainsi, si le débiteur souhaite céder sa dette à un tiers, il est par conséquent logique qu’il  ne peut le faire sans l'accord du créancier, car c'est ce dernier qui est le destinataire de l'obligation de paiement. La cassation au visa de l’ancien article 1165 du Code civil s’imposait parce que le créancier étant étrangé à la convention de cession de dette, une telle opération ne saurait avoir pour effet  de modifier ses droits au paiement de sa créance. En outre, la formule « ne pouvait avoir effet à l’égard du créancier » suggère en creux que celui-ci n’acquiert aucun droit contre le cessionnaire du seul fait de la stipulation litigieuse, même si celle-ci concevait qu’était transférées « les créances et la totalité des dettes générées par l'activité du cédant sont transmises à l'acquéreur ». L’arrêt sous-entend également que la procédure de cession d’une dette est admis en droit français, en cas de consentement du créancier à la réalisation de celle-ci.

B.        Un acte sous-entendu possible en cas de consentement du créancier

        En arrière-plan de cette solution, les juges laissent entrevoir sur la cession de dette, une position flexible quant à son admission. En l’espèce, l’arrêt reconnaît la validité de la cession de dette, mais ne l'admet pas directement. La Cour de cassation a jugé que dans le cas présent, la cession de fonds de commerce du débiteur à l’acquéreur ne pouvait pas avoir d'effet sur le propriétaire du terrain, car celui-ci n'avait pas donné son consentement conformément à l’ancien article 1165 du Code civil, qui énonce que les conventions ne sont opposables qu'aux parties contractantes et qu'elles ne peuvent pas être imposées aux tiers sans leur consentement. Cependant, la solution de l'arrêt indique également que si le propriétaire avait donné son consentement à la cession des dettes de son premier constructeur, la cession aurait pu être admise et l’acquéreur du fonds de commerce aurait pu se voir transférer les dettes liées à la construction de la maison. Ainsi, la Cour de cassation ne se prononce pas directement sur la question de savoir si la cession de dette est valable ou non en droit français, mais elle admet la cession de dette en cas de consentement en précisant en dans son dispositif  « qu'une telle cession ne pouvait avoir effet à l'égard du créancier qui n'y avait pas consenti » en application de l’ancien article 1121 du Code civil qui lui dispose que « on peut pareillement stipuler au profit d'un tiers lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on fait pour soi-même ou d'une donation que l'on fait à un autre. Celui qui a fait cette stipulation ne peut plus la révoquer si le tiers a déclaré vouloir en profiter ».  Effectivement, ce n'était pas le sujet central dans cette affaire puisque la question posée aux juges de la Cour de cassation était de déterminer si la clause de cession de dette contenue dans l'acte de cession de fonds de commerce produisait des effets à l'égard du créancier qui n'y avait pas consenti. Elle s'est contentée de dire que le consentement du créancier est nécessaire pour que la cession de dette soit valable. Donc, la Cour de cassation paraît implicitement subordonner la pleine efficacité d’une cession de dette, en l’espèce accessoire à la vente d’un fonds de commerce, sous réserve que le créancier y consente expressément, sans toutefois en préciser les effets.

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