Salut La Famille

La mort fait de même pour Ruy Blas, le valet. Son empoisonnement le fait changer de condition. La reine le prend dans ses bras, l'appelle par son nom et lui dit son amour. Cette mort le transcende (le transforme complètement) aux yeux de la reine et du public. Elle en fait une figure digne d'admiration.

On pourrait dire des choses analogues pour Cyrano. Voir plus haut le résumé de la pièce.

Si l'on réfléchit à la fin de Dom Juan de Molière, on peut avancer, sans trop de risques, que le personnage principal jusque là provocateur, cynique et jouisseur acquiert, par sa mort, un statut respectable, voire héroïque. Il fait preuve d'un courage surprenant (plus d'hypocrisie) et s'offre une "belle mort" en marchant sans trembler vers l'Enfer qui l'attend. Est-ce qu'a voulu Molière ? Paradoxale morale. Voir plus haut le commentaire composé.

Dans Rhinocéros (1960), Ionesco finit la pièce en mettant en scène un personnage, nommé Bérenger, qui, seul, est prêt à affronter la mort; Il veut résister et ne pas devenir un rhinocéros comme les autres. Un héros est en train de naître : « Je suis le dernier homme, je le resterai jusqu'au bout ! Je ne capitule pas ! » Ce sont ses dernières paroles.

On pourrait terminer en citant encore une pièce de Ionesco, Le Roi se meurt, 1962. Le roi Bérenger à qui on annonce sa mort pour la fin du spectacle n'est guère héroïque. Il a peur, il refuse de voir la vérité. Il n'a rien du guerrier grec réclamant une belle mort. Mais, à la fin de la pièce, il finit par accepter sa mort, il se laisse guider et finit serein et apaisé. Il devient alors une sorte de sage tibétain. La mort l'a en quelque sorte "héroïsé" mais c'est un nouveau type de héros que nous avons là, plus proche du sage oriental que du guerrier grec.

...