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Commentaire platon gorgias

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Par   •  22 Avril 2016  •  Commentaire de texte  •  3 404 Mots (14 Pages)  •  13 970 Vues

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  Introduction :

Ce texte est un extrait du Gorgias, discours philosophique écrit par Platon entre 494 et 493 avant J-C et qui examine les valeurs de la rhétorique. Ce passage met en scène Calliclès  et Socrate, un des plus grands philosophes de tous les temps, qui fut le maitre de Platon. Les deux protagonistes nous incitent à nous interroger sur le plaisir et le bonheur. Socrate nous offre un problème imagé, faut-il préférer un tonneau plein ou un tonneau qui nécessite d’être rempli sans cesse ? La modération de nos désirs ne vaut-elle pas mieux que le dérèglement ? D’autre part ce passage met en jeu le fait de savoir si le plaisir et le bonheur sont réellement indissociables. Dans un premier temps, nous étudierons la modération proposée selon Socrate avant d’étudier l’opposition de Calliclès à ce sujet. Enfin, on se demandera si une vie uniquement relative à l’ « avoir », comme le proposent les deux protagonistes peut être heureuse.

I La modération selon Socrate

Tout d’abord, dans la première partie du texte, Socrate utilise l’art de la rhétorique pour avancer sa thèse. Avant tout, il formule le problème, deux hommes possèdent chacun plusieurs tonneaux, « un grand nombre de tonneaux » qui sont destinés à être remplis de « vin, de miel, de lait ». Les deux hommes ne sont donc pas différents par leur possession. Ces mets rares et peu abondants correspondent à des mets de l’âge d’or, des mets de libations qui sont des offrandes en l’honneur des Dieux. Ils correspondent à une richesse dont l’Homme est toujours en quête.  Les « tonneaux » remplis peuvent être aussi la métaphore de la richesse liée au statut social, aux qualités innées ou à la réussite de l’Homme. Ces tonneaux remplis de richesses nous font également penser au paradis où rien ne manque et où l’on ne travaille pas. Un homme possède des tonneaux qui sont remplis, l’autre a des tonneaux percés et il doit sans cesse les remplir. Socrate fait donc s’opposer deux modes de vie : une vie de modération, tempérée où on se satisfait de ce qu’on possède et d’un autre côté une vie déréglée qui est dirigée par de nombreux désirs. Soit l’Homme est commandé par sa raison et elle-même contrôle les désirs soit,à l’inverse, les désirs contrôlent la raison de l’Homme. Après avoir posé le problème, Socrate grâce à la rhétorique nous expose sa thèse de la modération.

En effet pour Socrate, la modération de ses désirs ,donc avoir une vie tempérée, vaut mieux que vivre dans l’excès. Grâce à des questions rhétoriques comme : « En te racontant cela, est-ce que je te convaincs d’admettre que la vie tempérante vaut mieux que la vie déréglée ? », Socrate veut nous montrer qu’avoir une vie déréglée traduit un manque de sagesse. La thèse énoncée apparait donc comme épicurienne, il faut modérer ses désirs pour être heureux. Mais qu’est réellement le bonheur ? Chez les Stoïciens et les Epicuriens le bonheur est synonyme d’ataraxie, c’est à dire de la tranquillité de l’âme qui résulte de la modération et de l’harmonie de l’existence. L’ataraxie est une absence de troubles dans la vie d’un Homme. Apollon, qui est le dieu des arts a une vie modéré qui est en harmonie avec les Hommes et la nature contrairement à Dionysos qui vit dans l’excès des plaisirs. Apollon est plus susceptible d’être heureux que ce dernier car il sait modérer ses désirs et ses passions. Chercher le bonheur dans l’excès apparaît comme insensé et cela traduit le manque de clairvoyance de l’Homme. Il ne faut surtout pas dénigrer la stabilité mais plutôt profiter de celle-ci, comme le disait Epicure « Etre heureux, c’est savoir se contenter de peu ». Il faut se limiter à des désirs naturels et nécessaires, il ne faut donc pas de désir superflus. L’Homme a alors la conscience tranquille comme l’explique Socrate, « il n’a plus à reverser quoi que ce soit ni à s’occuper d’eux ; au contraire, quand il pense à ses tonneaux, il est tranquille ». Une vie modérée amène donc une vie sans accroc où le bonheur est possible.

Par conséquent, pour Socrate la vie tempérée est intrinsèquement liée au bonheur. Selon lui c’est le moyen le plus facile pour accéder au bonheur. Les tonneaux sont pleins, il n’a pas de crainte de  perdre les denrées rares, l’Homme a donc atteint un état de satiété, de plénitude. L’homme n’est pas gêné dans sa quête du bonheur par des désirs illimités qui ne peuvent jamais être assouvis. La tempérance vaut mieux que le dérèglement car l’Homme déréglé n’atteint jamais le bonheur, il court sans cesse derrière le désir qui se renouvelle. De plus, Socrate dénonce les paradoxes de l’homme déréglé qui doit s’infliger « les plus pénibles peines » pour remplir ses tonneaux. Se faire du mal pour espérer atteindre le bonheur correspond donc bien à un état paradoxal. On pourrait qualifier ces désirs de pathologiques, ils sont à l’opposé d’un principe stoïcien, l’apathéia qui traduit un état dépourvu de toutes souffrances. Or ici, l’homme qui doit remplir sans cesse ses tonneaux souffre, il peine à les remplir ce qui ne fait pas de lui un homme heureux selon Socrate. Cependant le désir est contradictoire, par sa nature même il ne peut être pleinement satisfait, il est illimité, insatiable. Dans ce sens Calliclès nous apporte une autre thèse qui s’oppose à celle de Socrate.

II La thèse de Calliclès

        En opposition, Calliclès nous propose une autre thèse qui s’oppose à celle de Socrate. Pour lui le plaisir, donc par conséquent le bonheur, ne peut être atteint seulement grâce à des désirs illimités. Sa réplique est en contradiction avec celle de Socrate, « Tu ne me convaincs pas, Socrate ». Pour lui le désir est illimité, insatiable on ne donc pas atteindre un état de satiété, de plénitude comme le propose Socrate. Il s’appuie sur une doctrine épicurienne, l’hédonisme qui fait de la recherche du plaisir et de son intensité le fondement de la morale et le but de la vie humaine. Dans ce cas, le désir est un engrenage sans cesse renouvelé qui permet d’éprouver du plaisir et donc d’être heureux. Cette dynamique qu’il faut sans cesse renouveler quitte à percer les tonneaux, Calliclès propose de « verse[r] et reverse[r] autant qu’on peut dans son tonneau » afin de maintenir en vie le désir et donc permettre l’occasion de plaisir. Sans désir sans cesse renouvelé, le bonheur n’est plus possible, c’est pourquoi on peut percer le tonneau pour maintenir le désir intact. Cette vie marqué par de nombreux plaisirs, qu’on peut qualifier même excessifs, nous évoque Dionysos qui, au contraire d’Apollon, mène une vie de débauche, une vie festive, excessive marquée par la démesure.         Ce désir tel qu’il est dépeint par Platon est pathologique. Cette image renvoie au mythe des tonneaux des Danaïdes. Dans ce mythe, les Danaïdes sont jugées et précipitées dans le Tartare, condamnées à remplir éternellement des jarres percées. En effet, cette image vise dans la mythologie à mettre en lumière une activité absurde. Comment trouver du « sens » au fait de remplir de façon continue un tonneau troué ? Peut-être la réponse que propose Albert Camus, même s’il s’agit de l’interprétation d’un autre mythe, à savoir le « Mythe de Sisyphe », peut-elle alimenter notre réflexion ? « Il faut imaginer Sisyphe heureux ». Il nous paraît pertinent de rapprocher cette interprétation du texte de Platon dans la mesure où le fait de s’acharner à percer le tonneau permet de maintenir une dynamique vitale qu’on peut imaginer heureuse.

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