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Phèdre Acte II scène 5

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Par   •  16 Juillet 2017  •  Commentaire de texte  •  1 906 Mots (8 Pages)  •  5 352 Vues

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Phèdre Acte II scène 5 (v 631 à 664)

Dates de Racine : 1639-1699

Période clé dans la carrière de Racine : pièce qui a été concurrencée par celle de Pradon, et a suscité cabales et critiques. Racine renonce ensuite pour plusieurs années au théâtre pour se marier et être historiographe du Roi avec Boileau, son ami. Réconciliation avec les maîtres de Port-Royal. Dernières pièces: religieuses. Production théâtrale en majorité entre 1670 et 1691 (Athalie, sa dernière pièce) pour Madame de Maintenon et les jeunes filles de Saint Cyr). Pièce présentée le 1er janvier 1677 à l’hôtel de Bourgogne (même année que la Princesse de Clèves). Tragédie en cinq actes et en alexandrins.

Avant d’être mise en valeur par les tragédies d’Euripide et de Sophocle en premier lieu, puis par d’autres auteurs dramatiques, la Phèdre de la mythologie n’est qu’une héroïne secondaire d’un des nombreux épisodes de Thésée. Fille de Minos, roi de Crète, et de Pasiphaé, sœur d’Ariane et du Minotaure, épousée par Thésée après l’abandon d’Ariane sur l’île de Naxos. Elle lui donne deux fils, Acamas et Démophon. Tombée amoureuse d’Hippolyte, fils de l’union de Thésée avec Antiope, reine des Amazones, elle se suicide. Phaedra : la brillante, la rayonnante,  car petite-fille du Soleil. Moins important chez Euripide, le personnage prend une place majeure chez Sénèque, et primordiale chez Racine, même si celui-ci dans sa préface se réclame d’Euripide.

La pièce se situe dans le port de Trézène, dans le Péloponnèse.

Passage se situe à l’acte II scène V. Suite à la rumeur de la mort de Thésée dans l’acte précédent,  les langues se délient : Hippolyte avoue son amour à Aricie et lui propose le trône d’Athènes (enjeu politique de l’intrigue), amour qui semble réciproque, mais scène interrompue par la demande d’entretien de Phèdre à Hippolyte puis c’est le tour de Phèdre d’avouer son amour à Hippolyte, d’abord indirectement dans cette tirade, puis directement dans la tirade qui va suivre.

I) Substitution des personnages.

        A) Une fidélité apparente.

  1. choix des verbes « languir »=absence d’activité du à la mélancolie, s’applique à Th. Et « brûler » s’applique à Hippolyte : termes réalistes qui révèlent une sensualité très vive. V4 et qui opposent deux attitudes qui sont de part et d’autre de la césure.
  2. Passage de « seigneur » v4 et 25 à « prince » x 2 qui est + doux et moins cérémonieux
  3. Présence forte du pronom personnel de la première personne dans la première partie de la tirade. En apparence, c’est bien Thésée qu’elle aime v 5. Le verbe « aime » suivi d’une longue phrase emphatique avec un parallélisme de construction « non pas tel »… « mais »… v 8 et 3* « mais » suggère l’éloquence de l’amour.

        B) Glissement du père vers le fils.

Transformation d’une évocation brève et défavorable du père en un portrait idéal du fils.

1) Perception défavorable du père : -voc dépréciatif v 6 « volage adorateur de mille objets divers » doublé d’une hyperbole.

        -métonymie dépréciative v.7 « du Dieu des morts déshonorer la couche » : couche=époux eux-mêmes.

        -rythme rapide et fuyant v.6-7 = se hâte d’enlever une image déplaisante, au profit d’Hippolyte.

2) Perception favorable des vertus du fils : - rythme + lent = « mais » fois 2 : rupture du rythme = s’attarde avec complaisance et marque une opposition latente v 8 et 9 et coupes.

        - allitération en « f » avec « fidèle, fier, farouche » rythme ternaire au v.9  avec du voc mélioratif, et une allégorie hyperbolique : image de la perfection masculine.

Glissement s’opère au v 10, avec le « ou » et la comparaison flatteuse entre Hippolyte et les dieux + parallélisme de construction.

        C) Substitution de Ph. à Ariane.

1)  Allusion à sa sœur sans la nommer v 14 à 33, présence d’une négation mise en valeur d’où rupture du rythme v 23+ position en tête de vers. Elle se substitue avec force à sa soeur

2) Enonciation « je,ma, moi » et répétition de « c’est moi » =insistance, imposition. v 24 et 25

3)La syntaxe : le mot « prince » pris entre les 2 « c’est moi » comme si elle le prenait dans ses bras.

  1. Elle réunit leur destin. Système d’énonciation = renforcement des lien entre H. et elle :-v6 « votre amante »

        -v. 30 et sq« dvt vous j’aurais »

        - « Ph. avec vous »

        -« avec vous réprouvé ». Phèdre.  se nomme v.27 « et Phèdre au labyrinthe » = engagement total de la personne de Phèdre. Importance des prépositions « devant » et « avec » et « du fil du labyrinthe »=lien Ph. et H renforcée par l’harmonie des assonances douces en « ou » et « u » v 31 et 32.

II Un discours irrationnel

  1. Glissement du présent au passé

  • Changement de temps au v 11 où débute l’emploi de l’imparfait et des passés simples. Phèdre convoque ses souvenirs en même temps que ceux d’Ariane.
  • Formules interrogatives se pressent, traduisant le regret v15.
  • A partir du v19, le passé n’est plus seulement évoqué. Il est recomposé. Fréquence des irréels du passé (on en relève dix en quatorze vers). Forme conditionnelle (« par vous aurait péri ») (« l’amour l’en eût d’abord inspiré », v24). Construction de la trame d’une histoire d’amour imaginaire. En imagination, Phèdre a quitté Trézène pour retourner en Crète.
  1. Fonction symbolique du Labyrinthe
  • Rappel implicite de la victoire de Thésée sur le Minotaure. Terme mentionné deux fois par Phèdre, à la même position dans le vers, sous forme d’inversion. Evoqué ici, ambiguïté du mythe v 26 à 31.
  • Le « fil fatal » v29 à 31 disparaît au profit de la présence de Phèdre elle-même. Dans la tradition, Thésée seul avec le fil. Ici recomposition du mythe. Elle devient « compagne », et même initiatrice « moi-même devant vous j’aurais voulu marcher » (cf ordre des mots v 30). Labyrinthe symbolise plutôt les méandres de la passion amoureuse.
  1. Une vision idéale de la femme
  • Femme guide et protectrice :  champ lexical du soin et de l’enseignement : « enseigner les détours » v 26 ; « l’utile secours » v 25 ; « que de soins » v 27 et exclamative
  • Dimension héroïque de l’amour : amour = bouclier pour le combattant. « vous » à l’abri de deux pronoms de la première personne « moi-même » v 60
  • Dimension sacrificielle de l’amour. cf dernier vers de sa tirade avec // de construction (« ou retrouvée ou perdue » et rapprochement des deux pronoms)

III Le tragique du passage

  1. Une incantation amoureuse/ les délires de la passion

  • Rythme, sonorités et vocabulaire donnent à la tirade une sorte de sensualité envoûtante.

Frémissement de la passion perceptible au vers 634 où les groupes ternaires scandent un aveu déguisé : « Oui, Prince, je languis, je brûle pour Thésée » rythme croissant.

  • Envol de l’imagination suggéré par la vigueur et la variété des coupes. Vers 645 à 648.Rejet harmonieux du vers 648 qui s’attarde sur une vision heureuse

«  Entrer dans le vaisseau qui le mit sur nos bords ? »

  • Après les dix premiers vers, constante modulation joue sur les voyelles aiguës en « i » et « u ». Echo subtil au nom d’Hippolyte prononcé au vers 645.

  1. Un aveu imprudent
  • Mots de plus en plus révélateurs : détails qui expriment la séduction physique exercée par Hippolyte « votre port, vos yeux, votre langage » v 11 et « votre tête charmante » v 627 (sens très fort de l’adjectif au XVIIème)
  • Evocation directe de l’amour v 24 et v 28, perdant ainsi toute prudence
  •  Réaction d’Hippolyte dépeinte comme une didascalie la honte qui s’imprime sur son visage. Mais question indignée avec sonorités dures en « c », et // de construction qui souligne l’horreur de la situation (inceste et adultère) :  extérieur au texte
  1. Le tragique : l’hybris, le piège
  • Utilisation constante de l’irréel du passé évoque l’échec assuré d’un tel aveu. Réalisation impossible. « Pourquoi ? » v 15 et 17
  • Evoque également par ses propos l’impossibilité du langage à substituer fantasme à la réalité. Force des propos et de son aveu implicite provoque une tension dramatique forte qui culminera dans le passage suivant où l’aveu éclate avec violence et signe le début de la catastrophe tragique pour les deux personnages, Phèdre pour avoir fait cet aveu, et Hippolyte pour l’avoir écouté, ce qui provoquera des calomnies contre Thésée et le mènera à sa mort.
  • Hybris : comparaison au dieu v 10.

Scène d’une importance dramatique capitale dans la pièce, parce qu’elle va provoquer une véritable catastrophe à l’acte III lorsque Thésée finalement vivant apprendra ce qui s’est passé. Il s’agira bien alors de l’acmè de la pièce. Pièce dont l’intérêt majeur consiste dans une succession d’aveux qui emprisonnent un peu plus leurs personnages dans leur sort tragique. Ici la fatalité tragique portée majoritairement par ce que les Grecs appellent l’hybris, la démesure des passions des personnages (Phèdre passion coupable, Thésée la colère et une forme de tyrannie, Oenone le mensonge et les mauvais conseils etc…) Un peu différemment Dom Juan s’enferme lui-aussi dans la démesure de son libertinage, et même s’il n’est pas un personnage tragique il présente ce même aspect qui, bien que dans une comédie, le condamne inéluctablement à la mort.

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