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Bérénice, acte 1

Fiche : Bérénice, acte 1. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  19 Février 2019  •  Fiche  •  2 004 Mots (9 Pages)  •  865 Vues

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1/ Un tableau mais aussi un poème d’amour :

          L'apothéose de Vespasien et la cérémonie nocturne célébrée à cette occasion exaltent Bérénice au point qu'elle superpose l'image de son amant à celle des fastes qui ont entouré cette célébration.  Par un retournement significatif de la passion de la reine c'est Titus qui sera comparé à un dieu et dès le début,   Bérénice lui prête l'omnipotence divine : " il peut tout".
         Dans cette tirade, racine a construit ce qu'on appelle en rhétorique Une hypotypose, c'est-à-dire un tableau pourvu de qualités de vie remarquables (figure destinée à rendre particulièrement vivant et comme présent un récit ou une description)
l'évocation du couronnement de Titus comporte un aspect pictural qui rend la scène passer particulièrement vivante. La description émerveillée à laquelle se laisse aller Bérénice constitue un somptueux tableau que Racine aime brosser au cœur de ses tragédies. Elle commence par une mise en condition de Phénice.
         " De cette nuit, Phénice, as-tu vu la splendeur ?

          Tes yeux ne sont-ils pas tout plein de sa grandeur ? " (vers301-302)
     
Elle invite sa confidente à partager avec elle l'évocation de la lumière irradiante qui l'incendie et embrasse son cœur et ses sens éblouis. Le tableau prend une consistance particulièrement nette grâce à l'abondance d'expression dénotant couleur et lumière "pourpre», "l'or" amènent une luminosité et  un éclat qu'augmente  le lexique de la lumière. Celui-ci prend une ampleur étonnante  notamment dans la gradation du vers 303 : " ce flambeau, ce bûcher, cette nuit enflammée ". Les antithèses  opposant obscurité et Lumière donne avoir un tableau en  clair-obscur où Titus apparaît tel un rayonnement.  Bérénice parle de la splendeur de "cette nuit",  de la "nuit enflammée". Le ton exalté de la reine qui reconstitue ce spectacle exprime en fait la passion qui l'habite : la présence des flammes et de la lumière il y a une valeur métaphorique et témoigne autant de l'embrasse mon du cœur de l'héroïne que de la beauté du spectacle nocturne dans les vers qui suivent, racine donne toute la mesure de son art en multipliant les procédés de rhétorique (répétitions, anaphores , oppositions)  ainsi que les effets de sonorité : 
                   Des phrases réduites aux seuls noms : 
                             "Ces Flambeaux , ce bûcher,  cette nuit enflammée ,

                               Ces aigles, ces faisceaux, ce peuple, cette armée,                                                                                             

                               Cette foule de rois, ces consuls, ce sénat."
ne constituent pas une simple énumération. Ils suivent le regard enthousiasmé de Bérénice et emporte l'auditoire (ou le lecteur) vers les lieux mêmes du couronnement par leur pouvoir suggestif.  De même que la répétition de démonstratifs anaphorique permettent de montrer l'émerveillement de la reine, sa passion manifeste et son exaltation.
                             Le vers 306 : " Qui tous de mon amant empruntaient leur éclat "  permet de faire de Titus le point de convergence de tous les regards,  d'en faire le centre du tableau.  Tout se passe comme si la reine ne parvenait pas à s'arracher à ce spectacle grandiose,  Fascinée par l'éclat de son amant. La syntaxe contribue à cet effet car elle est chargée d'une vive émotion : les tournures exclamative des vers 312 et 313 en témoignent.

                              Du vers 306 au vers 313, Bérénice focalise ses regards uniquement sur Titus. La cérémonie de déification est oubliée :

           " comme un astre le nouvel empereur se détache sur le ciel de la nuit

                    Ce port majestueux cette douce présence

                    Ciel !  Avec quel respect et quelle complaisance

                    Tous les cœurs en secret l'assuraient de leur foi ! " 


Le cœur de ce tableau se situe au point de convergence des mille et un regards "avides" fixés sur Titus, ainsi désigné comme centre emblématique de la scène et, partant de l'univers.
         L'éclat de Titus n'est pas seulement lié à son ascension au pouvoir suprême : il est inné. Fût-il d'origines plus "obscures" (vers 315)-termes antithétiques de ceux exaltant l'éclat de Titus - que son ascendant sur le monde eut été immédiatement évident.

                     " Le monde en le voyant eut reconnu son maître "

          Ce vers sera d'ailleurs appliqué à Louis XIV le Roi Soleil et l'assimilation est aisée, la force du pouvoir de droit divin tient pour une bonne part dans le spectacle qu'il donne de sa puissance, tout le tableau créé par Bérénice va dans ce sens.  La lumière qui émane de Titus,  et qui s'oppose littéralement à l'obscurité, trouve son reflet dans les flambeaux et les bûchers qui l’entourent.  Le caractère religieux de la Scène et sa nature politique " ce peuple, cette armée,  cette foule de rois, de consuls, ce sénat " ne font qu'un.  Le mot " Foi " (vers 313) a beau ne signifier ici que fidélité, on doit rappeler que la cérémonie et celle d'une déification de Vespasien et que Titus est auréolé de la gloire céleste de son père.
  
         Plus qu'une description, cette évocation tient de la vision : Bérénice revit intérieurement un moment magique et s'enchante de sa remémoration extasiée. Dans ses analyses parfois novatrices de Bérénice, l’écrivain Roland Barthes qualifie ce genre de tableau de " Fantasme racinien" .Il est de fait que la scène est moins vue que rêvée, moins restituée qu'interprétée dans le sens d'un moment de jouissance sublimée.
         La musique des mots est ici le substitut et à la fois de la vision et de ce plaisir incantatoire qu’elle fait naître au fil de l'évocation.   On a pu assimiler cette scène au développement harmonieux d'un thème musical centrale : la splendeur de cette nuit, développée comme une page symphonique par le procédé d'accumulation et la rythmique du vers.

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