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Andromaque, acte V scène 1

Commentaire de texte : Andromaque, acte V scène 1. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  7 Novembre 2017  •  Commentaire de texte  •  2 127 Mots (9 Pages)  •  26 508 Vues

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Introduction :

          La passion est liée étroitement à l’amour-propre. La Rochefoucauld énonce dans  
Maxime : « Il y a dans la jalousie plus d’amour-propre que d’amour ». Hermione ne connaît pas le sacrifice. Au contraire, sa haine se nourrit de ses blessures d’amour-propre (voir vers 1409, par exemple). Chez les auteurs tragiques (comme ici Racine) le monologue est placé dans des moments de tension extrême lorsqu’un personnage, acculé, doit prendre une décision importante. Ici, le monologue d’Hermione a deux intérêts : un intérêt psychologique, car il permet d’approfondir la personnalité du personnage et d’étudier les effets de la passion malheureuse sur son esprit, et un intérêt dramatique, car on peut mesurer la solitude du personnage tragique confronté à une difficulté qu’il juge insurmontable et attendre que ce moment fasse rebondir l’action. À noter que ce monologue n’est pas ici une simple convention de théâtre. Il ne heurte pas la vraisemblance. Au contraire, l’état de très grand trouble dans lequel se trouve Hermione se traduit naturellement par un monologue à voix haute.

Jean Racine est l’un des grands dramaturges français du 17ème siècle. Andromaque date de 1667 et est une tragédie classique dans la ligné des tragédies antiques dont le thème principal est une chaîne amoureuse à sens unique : Oreste aime Hermione qui n’a d’yeux que pour Pyrrhus qui lui-même est épris d’Andromaque, encore amoureuse de son époux défunt, Hector. Dans cet extrait de l’acte V et donc du dénouement, écrit en vers et alexandrin, Hermione, qui vient d’envoyer Oreste assassiner Pyrrhus, se demande si elle a pris la bonne décision. On est donc face à un monologue délibératif.

La passion revêt différents caractères. En quoi est-elle vécue comme un désordre et une dépossession de soi ? Nous verrons donc comment la personnalité d’Hermione est possédée par des passions puis par ses doutes enfin elle illustre des sentiments exaltés.

I. Un personnage complexe.

1. Un personnage aux passions contradictoires.

_ Dans le monologue d’Hermione alternent les thèmes de l’amour et de la haine. Dégagez la structure de ce monologue en relevant les antithèses et en vous appuyant sur cette alternance de thèmes.

— v. 1393-1396, p. 111 : l’alternative est posée, au vers 1396, à travers la forte antithèse « j’aime/je hais ».

— v. 1397-1403, p. 111 : domination de la haine : Hermione confirme son projet.

— v. 1404-1406, p. 111 : domination de l’amour : Hermione renonce à son projet.

— v. 1407-1420, p. 111-112 : domination de la haine : elle confirme.

— v. 1421-1428, p. 112 : domination de l’amour : elle renonce… quand le récit de Cléone vient lui faire une dernière fois changer d’avis, à la scène suivante.

De nombreuses antithèses marquent le déchirement d’Hermione et les paradoxes de la passion amoureuse

: « Muet » / « soupirs », « tranquille » / « alarmes » (v. 1401, p. 111), « venger » / « grâce » (v. 1406,

p. 111), « vie » / « trépas » (v. 1416, p. 112), « mort » / « amour » (v. 1422, p. 112).

Hermione révèle, aux vers 1425-1426, que son amour pour Pyrrhus est né avant que leur famille n’ait songé à les réunir pour resserrer les liens entre les peuples alliés. Ainsi, Hermione nous informe qu’elle est la femme d’un seul amour et que cet amour a occupé toute sa jeune vie. C’est donc son rêve de toujours qui est en train d’être détruit. Enfin, on comprend quelle blessure a pu lui infliger Pyrrhus lorsque, voulant diminuer sa faute, il lui a rappelé qu’ils avaient été promis l’un à l’autre sans qu’ils le veuillent (acte IV, scène 5).

2. Pyrrhus, cible de ce déchirement.

         Tout au long de son monologue, Hermione évoque le dernier entretien qu’elle a eu avec Pyrrhus.

Montrez que ce qu’elle en dit ne correspond pas toujours à la réalité et expliquez ce décalage. Avant tout, contrairement à ce que dit Hermione au vers 1397, ce n’est pas Pyrrhus qui l’a « congédiée » (v. 1397, p. 111), mais l’inverse. De façon générale, elle peint celui qu’elle aime sous un jour plus noir que la réalité. Certes Pyrrhus a été maladroit et n’a guère manifesté d’émotion. Mais rien ne lui permet d’imaginer un Pyrrhus sadique triomphant et « se [riant] de [sa] rage » (v. 1409, p. 111). « Il pense voir »

(v. 1410, p. 111), « Il croit que » (v. 1411, p. 112), « Il juge encore de moi » (v. 1413, p. 112), « a bien d’autres pensées

» (v. 1414, p. 112) : Hermione croit lire dans les pensées de Pyrrhus, mais rien durant l’entretien de la scène 5 de l’acte IV ne peut être interprété en ce sens. Ce décalage peut s’expliquer par le fait que le discours d’Hermione, quand elle fait allusion à cet entretien, est alimenté par la haine (deuxième et quatrième mouvements du texte), qu’elle tente de se persuader elle-même que Pyrrhus mérite la mort. Mais ce décalage montre également qu’elle commence à perdre le contact avec la réalité et à plonger dans la folie amnésique et schizophrène.

II. Les atermoiements d’Hermione.

1. Une passion meurtrière.

Hermione vient de donner l’ordre de tuer Pyrrhus et elle se présente, quelques instants plus tard, contradictoirement « errante et sans dessein ». Hermione voit bien à quel point sa haine et son amour sont mêlés. Ces deux sentiments contradictoires sont réunis dans un même vers, soit sous forme d’une alternative ressentie comme un dilemme (« Ah ! Ne puis-je savoir si j’aime, ou si je hais ? », v. 1396), soit dans un parallélisme soulignant l’antithèse

(« Et prête à me venger, je lui fais déjà grâce ? », v. 1406), soit dans une tournure où l’amour se substituant à la haine entraîne paradoxalement les mêmes conséquences (« Sa mort sera l’effet de l’amour d’Hermione ? », v. 1422). Tous ces vers sont de type interrogatif et expriment non seulement un désir de clarifier des sentiments, mais aussi un grand étonnement face à un tel désordre. Le lien qui s’établit entre la principale et les subordonnées est un lien d’argumentation. « Puisque » introduit des arguments qui se donnent comme admis par tous et ne souffrant aucune contestation. Hermione s’estime donc dans son plein droit en décidant la mort de Pyrrhus.

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