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Seance sur le dommage

Commentaire d'arrêt : Seance sur le dommage. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Novembre 2015  •  Commentaire d'arrêt  •  5 442 Mots (22 Pages)  •  1 775 Vues

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2ÈME SÉANCE  –  LE DOMMAGE

I – Premier thème : le dommage réparable.

Document 1 : Civ. 2ème, 22 février 2007                   

Dans un arrêt rendu en date du 22 février 2007 de la 2 ème cour civile de cassation portant sur la perte de rémunérations illicites

  • Faits : Un amateur de jeux demande, en 1991, à être interdit de jeux afin de se libérer de son addiction. Malgré cette interdiction, le joueur persiste à aller joueur au casino et obtient le gain de 4000€ le 12 avril 2005. Afin de ne pas se faire repérer par la société gérante du casino, il tente d'encaisser son gain par l'intermédiaire d'un tiers, cependant, la société refuse de le payer. Le joueur assigne donc la société du casino en paiement de cette somme.

  • Procédure : Dans un jugement du 1er juillet 2005, la juridiction de proximité condamne la société du casino au paiement de dommages-intérêts, et ce au motif que le joueur avait séjourné plusieurs fois dans la ville où se situait le casino ces dernières années, que sa présence dans la salle de jeux ainsi que le fait qu'il ait pu jouer avant même de gagner sont révélateurs d'une faute de la société, celle-ci n'ayant pas respecter l'obligation d'interdiction de jeux qui pesait sur le joueur. Ainsi, le contrat de jeux liant le joueur à la société devient nul, et la victime obtiendra des dommages-intérêts. La juridiction de proximité choisit donc de trancher le litige sur le terrain de la responsabilité contractuelle, dont le principe n'est pas la réparation intégrale, mais la compensation de la faute résultant de l'inexécution d'une obligation.
  • Question de droit : Une victime peut-elle obtenir réparation du préjudice résultant de la perte de ses rémunérations si celles-ci sont illicites ?
  • Solution 2ème civ. Ccass : La 2ème chambre civile de la Cour de cassation répond au problème par l'affirmative. En effet, elle confirme que le contrat de jeux qui liait le joueur à la société est nul car celle-ci a commis une faute, c'est donc sur le terrain délictuel que se réglera le litige, ce qu'elle affirme en visant l'article 1382 du Code civil. La cour casse la décision de la juridiction de proximité car celle-ci n'aurait pas dû débouter la victime de sa demande en paiement de ses rémunérations, mêmes illicites. Se faisant, la Cour prend position pour la victime, qui peut obtenir réparation du préjudice subi par la perte de ses rémunérations, qui correspondent au paiement non effectué par la société, même si celles ci sont illicites car obtenues dans le cadre d'une situation illégale.

        Dans un arrêt 2ème civ., 24 janvier 2002, la Cour de cassation avait refusé d'indemniser la perte de revenus tirés d'un travail au noir. Le travail au noir n'est pas un intérêt légitime juridiquement protégé dans la mesure où ces revenus ne sont pas reconnus par le droit.

Document 2 : Ass. plén., 17 novembre 2000, arrêt « Perruche ».

Fiche d'arrêt :

Dans un arrêt rendu le 17 novembre 2000 en assemblée plénière portant sur l’absence de d’une interruption volontaire de grossesse du à un handicap d’un enfant du fait d’une erreur d’analyse.

  • Faits : En l’espèce, une femme enceinte effectue un test médical en laboratoire afin de savoir si elle est atteinte de la rubéole, ce qui pourrait avoir des conséquences graves pour l'enfant à naitre selon le consensus scientifique. Le diagnostic du médecin et du laboratoire est clair, il n'y a pas de présence d'anti-corps rubéoliques dans le sang de la future mère. Cependant, l'enfant a développé de graves séquelles consécutives à une atteinte in utero par la rubéole, et est nait handicapé. La mère demande réparation de son propre préjudice subi par la perte d'une chance d'avoir pu choisir entre effectuer une IVG ou mener la grossesse à son terme en risquant de graves séquelles pour l'enfant à naitre; mais aussi du préjudice de l'enfant du fait de naître handicapé.

  • Procédure :
  • Dans un arrêt rendu le 17 décembre 1993, la Cour d'appel de Paris a jugé que le médecin et le laboratoire avait commis une faute contractuelle dans la recherche d'anti-corps rubéoliques, que cette faute avait entrainé pour la mère un préjudice qui doit être réparé, préjudice résidant dans le fait qu'elle a cru, ne pas être atteinte de la maladie, ce sans quoi elle aurait décidé de recourir à une IVG; mais aussi un préjudice qui ne doit pas être réparé, celui de l'enfant d'être né handicapé, car il n’y a pas de lien de causalité avec les fautes commises.
  • Cet arrêt est cassé, et la Cour d'appel de renvoi d'Orléans, dans un arrêt du 17 mars 1999, juge sensiblement la même chose qu'en appel, l'enfant n'a pas subi un préjudice indemnisable car seule la maladie est la cause directe de son handicap, et non les fautes commises par le médecin dans la recherche d'anti-corps, qu'elle juge comme trop indirectement liées à la survenance du préjudice. Ainsi elle juge que « l'enfant ne peut se prévaloir de la décision de ses parents quant à une interruption de grossesse ». L'affaire se retrouve devant la Cour de cassation qui statue en Assemblée plénière.
  • Question de droit : Un enfant atteint de la rubéole, en raison d'une exposition in utero à cette maladie, peut-il obtenir réparation du préjudice résultant pour lui de sa naissance handicapée en raison de l'absence de détection de cette maladie due aux fautes commises par un médecin et un laboratoire de biologie médicale, et à l'absence de choix quant à la réalisation d'une IVG ?
  • Solution de l'Assemblée Plénière de la Ccass : L'Assemblée plénière de la Cour de cassation répond dans un arrêt rendu le 17 novembre 2000 L'enfant peut demander réparation du préjudice causé indirectement par les fautes du médecin et du laboratoire dans l'exécution des contrats formés avec le parent, ce qui lui avait empêché de choisir entre poursuivre ou interrompre sa grossesse. La Cour de cassation casse ainsi l'arrêt de la Cour de renvoi, qui n'avait pas admis que le lien de causalité indirect entre les fautes du médecin et du laboratoire, et le préjudice de l'enfant d'être né handicapé suffise pour que l'enfant puisse demander à être indemnisé.

Document  3 : Art. 1er, I, de la loi du 4 mars 2002, devenu l’art. L. 114-5 du Code de l’action sociale et des familles. 

  • Un dommage certain et direct n’est pas réparable lorsqu’il n’est pas légitime ; ainsi la naissance ne peut pas en tant que telle constituer un dommage dont il peut être demandé réparation. Le dommage de vie n’est pas légitime pour le vivant lui-même, parce qu’il s’agirait là d’une atteinte à la dignité humaine et d’une solution génératrice, à terme, de conséquences incalculables. Pour déterminer la légitimité de ce préjudice, les auteurs ont confronté le préjudice de vie au principe du respect de la personne humaine. En effet, la principale critique qui est formulée à l’encontre de la reconnaissance d’un tel préjudice est que l’on dévalorise le « prix » de la vie. Un autre argument est encore avancé, selon lequel le fait de reconnaître que la naissance d’un enfant handicapé peut constituer un préjudice, reviendrait à établir une hiérarchie entre les vies.

Document 4 : Civ. 1ère, 24 janvier 2006

  • Faits : les faits de cette espèce sont similaires à ceux de l'arrêt Perruche du 17 novembre 2000, une femme met au monde un enfant atteint d'une déformation de la colonne vertébrale. Ce handicap n'a pas été détecté par le gynéchologue-obstétricien lors des échographies, ce qui constitue une faute contractuelle selon la demanderesse car de telles malformations auraient dû être décelées, ce qui lui aurait permis de choisir entre interrompre ou poursuivre sa grossesse. Les parents demandent donc à être indemniser du préjudice de son enfant d'être né handicapé.

  • Procédure : La Cour d'appel a jugé que le médecin n'était pas responsable du préjudice de l'enfant, retenant ainsi que ses fautes n'étaient pas la cause directe des malformations et donc que lien de causalité n'était pas établi. Les parents de l'enfant victime de ce handicap forme alors un pourvoi en cassation, estimant qu'en l'état actuel de la jurisprudence depuis l'affaire Perruche, sa demande en indemnisation du préjudice subi par son enfant sera reçu positivement.
  • Question de droit : Un enfant atteint d'un handicap à la naissance peut-il demander réparation du préjudice d'être né handicapé suite d’erreurs d’analyses commises par le gynécologue au motif que sa mère aurait pu recourir à une IVG ?
  • Solution de la 1ère chambre civile de la Ccass : La 1ère chambre civile de la Cour de cassation doit statuer sur le même problème de droit que celui de l'arrêt rendu par l'Assemblée plénière le 17 novembre 2000. Depuis lors, le législateur était intervenu dans une loi du 4 mars 2002, déclarant que nul ne pouvait se prévaloir du préjudice issu du seul fait de sa naissance, et se faisant, mettait un terme à la jurisprudence Perruche en déclarant ces dispositions applicables aux instances en cours. La Cour d'appel avait donc respecté le droit positif alors en vigueur et refusé l'indemnisation du préjudice de l'enfant d'être né handicapé. Mais la Cour de cassation va casser cette décision au visa du protocole n°1 de la CEDH. En effet, la Cour estime que l'intervention du législateur sur les instances en cours rompait

« le juste équilibre entre les exigences de l’intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect des biens », car dès lors que « la loi susvisée, en prohibant l’action de l’enfant et en excluant du préjudice des parents les charges particulières découlant du handicap de l’enfant tout au long de la vie, a institué un mécanisme de compensation forfaitaire du handicap, sans rapport raisonnable avec une créance de réparation intégrale, quand Mme X... et M. Y... pouvaient en l’état de la jurisprudence, applicable  avant l’entrée en vigueur de cette loi, légitimement espérer que leur fille serait indemnisée au titre du préjudice résultant de son handicap ». La Cour résiste donc au législateur en se référant à la Cour Européenne des Droits de l'Homme et de sauvegarde des libertés fondamentales pour casser le refus de la juridiction d'appel d'indemniser l'enfant du préjudice résultant de naitre handicapé.

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