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Le principe de non-ingérence en droit bancaire

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Par   •  17 Décembre 2017  •  Dissertation  •  3 383 Mots (14 Pages)  •  1 363 Vues

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Dissertation : Le principe de non-ingérence

Introduction

         « La banque, comme activité, n’est pas celle d’un confesseur, ni celle d’un psychiatre, ni même celle d’un administrateur ou d’un tuteur ». L’établissement de crédit (ETC) n’a-t-elle à s’ingérer ni dans les motivations ni dans les intérêts de ses clients : ce qui s’exprime, en un principe majeur de son office, en disant qu’elle n’a pas à s’immiscer dans leurs affaires. Une parallèle, certes improbable, peut être dressée avec l’injonction lancée par le président turc Recep Tayyip Erdogan, suite aux critiques émises par l’Occident dans la gestion des retombés du coup d’Etat manqué « certains nous donnent des conseils, ils se disent inquiets. Mêlez-vous de vos affaires ! ». En revanche, en droit bancaire, le banquier semble être le principal bénéficiaire de la non-ingérence puisqu’elle réduit drastiquement la surveillance des comptes et l’immunise face aux tentatives d’actions en responsabilité civile des clients (ou tiers lésés) pour les dommages occasionnés par une gestion maladroite des fonds possédés ou plus communément par une escroquerie ou un détournement de fonds.

        Le principe de non-ingérence (également connu sous l’appellation « non-immixtion ») est défini par Cornu comme étant au sens large «  toute intervention sans titre dans les affaires d’autrui, se traduisant par l’accomplissement d’un acte ».

En droit bancaire, elle se décompose en deux propositions : 1° le banquier est désintéressé des actes accomplies par le client c’est-à-dire il n’est pas obligé d’intervenir pour empêcher un client d’accomplir un acte irrégulier, dangereux susceptible de nuire à son client (cette solution a été dégagée par le Cour de cassation en 1930 « le banquier ne saurait être astreint à exercer pour le compte des tiers un contrôle sur les mouvements de fonds », donc il peut être opposé aussi bien au clients qu’aux tiers) 2° il est assujetti à une obligation de ne pas faire c’est-à-dire il n’est pas en droit de refuser, théoriquement, l’exécution d’instruction du client au motif qu’elles ne lui paraîtraient pas judicieuses. Toutefois, le désintéressement du banquier dans la gestion du client trouve un tempérament jurisprudentiel dans l’obligation de vigilance. Pour autant, son champ d’application reste vaste et revêt en pratique une importance considérable puisqu’elle permet de 1° réduire l’intensité de cette obligation de vigilance au noyau dure de la détection des anomalies apparentes, d’où le défaut s’apparente à la commission d’une faute lourde 2° permet de limiter la responsabilité du banquier.

        Cette dissertation vise à définir les contours du principe de vigilance par une analyse approfondie des évolutions jurisprudentielles et législatives enclenchées par l’émergence de considérations nouvelles, notamment par la pénétration du droit de l’UE de la consommation et la mise en place d’un dispositif légal de lutte contre le blanchiment d’argent. Ainsi, l’analyse va s’articuler sur la problématique suivante : un principe de non-ingérence nécessaire et vital pour les banques, mais une protection renouvelé des intérêts du client, ainsi qu’une protection des intérêts collectifs.

Il est opportun d’expliciter les justifications qui ont motivé l’existence d’un tel principe, ainsi que l’articulation que la Jurisprudence a opéré pour la conciliation des intérêts contradictoires des parties aux contrat (I) pour permettre par la suite de constater que des nouvelles sources du droit ont influencé les contours de cette obligation, qui est devenu foncièrement relatif à certains égards (II).

 

  1. Un principe quasi-absolu tempéré par une obligation de vigilance jurisprudentielle passive

Avant d’étudier le contenu de l’obligation de vigilance (B), il est nécessaire d’expliciter les différentes justifications pour l’existence d’un devoir de non-immixtion (A).

  1. Les justifications du principe de non-ingérence : l’articulation des intérêts des parties contractants favorables au banquier

        Ce principe a été pour la 1ère fois consacré par un arrêt du 28 janvier 1930 de la Cour de cassation qui a jugé « qu’aucune règle de droit ne met à la charge du dépositaire l’obligation de procéder spontanément à la vérification de l’identité du déposants ou des droits de celui-ci sur l’objet déposé, par plus lors du dépôt que lors de la restitution ». A l’instar de cet arrêt,  les tribunaux attachent plus d’importance aux effets qu’au fondement du principe de non-immixtion, et laisse à la charge de la doctrine le soin d’y pallier.

  1. Les justifications de la doctrine

        La majorité des auteurs s’accordent sur le fondement principal du principe de non-immixtion : le secret des affaires. Selon ces auteurs, les entreprises ont besoin d’une certaine confidentialité pour développer leur activité dans les meilleures conditions.  Pour Virassamy, cette discrétion constitue un intérêt vital pour l’entreprise puisque le banquier pourrait être amené à traiter avec des entreprises concurrentes de ses propres clients et devenir ainsi un vecteur d’information confidentielles. Certains invoquent également l’article 8 de la Convention EDH, relatif à la vie privée et étende la justification aux simples particuliers. Toutefois, ces justifications paraissent aux yeux de l’application de la Cour de cassation comme résiduelles.

  1. l’usage concrète de la jurisprudence

        Malgré une absence d’explication détaillé sur le fondement, l’usage qu’en fait la Cour de cassation est révélateur de l’objet visé et des intérêts défendus en pratique.  En effet, l’étude de la jurisprudence montre que ce principe est appliqué de manière générale à l’utilisation du compte faite par le client, et opposé à son encontre ou celui d’un tiers, en responsabilité civile. Par exemple, une banque accordant un prêt à un client pour un investissement n’a pas à s’assurer de la qualité de cet investissement (Cass. com., 17 mars 2004) ou elle n’a pas à conseiller à son client le cadre juridique le  plus approprié pour un investissement immobilier qu’elle finance. Ainsi, le principe de non-ingérence ne paraît pas jouer comme une cause de responsabilité du banquier trop intrusif ou indûment curieux, mais bien au contraire comme une cause atténuante ou même de non-culpabilité lorsque par exemple il ne s’est pas aperçu, dans l’exercice d’une de ses missions, qu’il prêtait la main aux agissements coupable de son client ou d’un tiers.

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