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La libre création de droits réels

Commentaire d'arrêt : La libre création de droits réels. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  5 Février 2019  •  Commentaire d'arrêt  •  2 790 Mots (12 Pages)  •  567 Vues

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  • Commentaire d’arrêt : Cour de cassation 3e chambre civile du 7/06/2018

Le droit réel de jouissance spécial est un principe admis depuis peu, et plus précisément depuis un arrêt de Cour de cassation Maison Poésie rendu le 31 octobre 2012.

En l’espèce, en 2004 la SCI acquiert grâce à un propriétaire d’un immeuble de copropriété portant plusieurs lots qui ont une vocation commerciale dont une piscine. Ce dernier avait en 1970 conclu une convention permettant aux copropriétaires d’avoir un accès gratuit à la piscine pendant toute la durée des vacances, et en ajoutant le fait qu’il prenne en charge des divers frais d’entretien que celle-ci nécessite. Cependant, la SCI refuse de procéder aux frais d’entretien de la piscine et décide de ne plus permettre l’accès gratuit à la piscine aux copropriétaires. Ainsi, le syndicat assigne la société en justice en se prévalent des droits inscrits dans le règlement de la copropriété. La SCI requérante se voit condamnée car elle doit respecter les conditions prévues dans le règlement. Elle fait appel du jugement, et dans une décision du 21 mars 2017 la Cour d’Appel de Chambéry rejette la demande du requérant. En effet, selon elle ce droit de cesser l’accès à la piscine et d’en arrêter les frais d’entretien ne peut s’éteindre que par une modification du règlement ou alors la disparition de l’état de copropriété.

Comment est-il possible de qualifier le droit réel de jouissance spéciale ? Peut-il avoir un caractère perpétuel ?

La Cour de cassation rejette le pourvoi non pas en qualifiant la limite par le temps du droit réel comme a pu le faire la Cour d’Appel, mais en admettant la liberté de créer des droits réels sui generis à perpétuité dans le domaine de la copropriété.

Afin de répondre à cette problématique, il faudra s’intéresser dans un premier temps à la création d’un droit réel sui generis à perpétuité (I), puis dans un second temps à la précarité de ce droit réel (II).

  1. La création d’un droit réel sui generis à perpétuité

Il s’agit ici de traiter tout d’abord la qualification du droit réel de jouissance spéciale (A), puis d’aborder le caractère perpétuel du droit réel de jouissance spéciale (B).

        A/ La qualification du droit réel de jouissance spéciale

        De prime abord, le droit réel c’est le droit qui découle du pouvoir que l’on peut exercer directement sur un bien Ce droit va conférer un pouvoir direct car il créé un lien entre la personne et ce bien. En l’espèce, la SCI qui acquiert divers lots dont une piscine possède en théorie un pouvoir direct sur ses biens. De plus, il s’agit aussi d’un droit réel principal car cette acquisition de lots procède d’un démembrement qui est montage patrimonial permettant de partager un bien avant de le transmettre. D’ailleurs un arrêt du 13 février 1834 Caquelard a reconnu ce droit démembrement (sous réserve du respect de l’ordre public). Donc, le droit réel principal permet notamment d’avoir accès à certaines utilités du bien.

En l’espèce, il s’agit ici d’une société (SCI) qui a fait l’acquisition de nombreux lots en 2004 dans un immeuble qui est en réalité une copropriété. Il serait possible d’envisager d’abord le fait que ce soit une servitude. La servitude, c’est le droit réel attaché à un immeuble (bâti ou non) qualifié de « fonds dominant », au détriment d’un autre immeuble qui lui est appelé « fonds servant » et qui s’applique à tout propriétaire de deux fonds. Mais ce n’est pas le cas puisqu’ici le requérant est titulaire des droits portant sur les lots à vocation commerciale dont la piscine (qui fait l’objet du litige). Cependant les copropriétaires vivant dans l’immeuble, eux disposent de la servitude car ils sont titulaires de droits sur leur(s) partie(s) privative(s) et sur les parties communes.

Mais l’arrêt « Maison de Poésie » du 31 octobre 2012 consacre le droit réel de jouissance spéciale sur un bien. En effet, la Cour de cassation valide la création de ce droit pour la durée d’existence du bien. Mais cela veut dire qu’une personne ne possède pleinement les 3 prérogatives de la propriété qui sont : l’usus, le fructus et l’abusus. En effet, ce droit de jouissance étant « spécial » il a été créé par la seule volonté des parties qui ont consenti cela dans le règlement de copropriété. Donc de ce fait en l’espèce, ce droit réel donne accès à la piscine pendant les vacances scolaires. En d’autres termes, il est possible de parler de droit réel de jouissance spécial sui generis, c’est-à-dire un droit de son propre genre.

Ainsi, il est possible d’affirmer qu’il n’y a pas de numérus clausus des droits réels car ceux-ci peuvent être créés de toute pièce comme l’a fait notamment le règlement de la copropriété.

Cependant, le droit réel de jouissance spéciale a fait l’objet de nombreux revirements jurisprudentiels en ce qui concerne la durée de celui-ci, et ce depuis 2012.

        B/ Le caractère perpétuel du droit réel de jouissance spéciale

        Par principe, le droit français et plus particulièrement le Code Civil interdisent les engagements contractuels perpétuels. En effet, l’article 1210 du Code civil dispose que en son premier alinéa : « Les engagements perpétuels sont prohibés ». Ce qui veut dire que ce délai légal de prescription est de trente ans. Cependant, l’arrêt de la Cour de cassation rendu en 2012 « Maison de poésie » qui valide la création du droit réel de jouissance spécial précise la durée de ce droit. En effet, il est valable pour toute la durée de la fondation. Ce qui veut dire que le droit réel de jouissance spéciale peut avoir une durée plus longue que la prescription trentenaire. En l’espèce la convention avait été signée par les vendeurs en 2000 et la SCI a acquis ces fonds en 2004. De ce fait, la société requérante ne peut se prévaloir de l’extinction trentenaire.

Enfin, l’arrêt « Maison de poésie II » rendu par la Cour de cassation le 8 septembre 2016 se prononce sur la durée du droit réel lui-même. Mais les choses sont moins claires le droit réel de jouissance spéciale. En effet, la Cour admet des parties puissent créer un droit réel de jouissance spéciale qui est considéré comme un régime autonome, mais cependant elle ne précise rien sur la durée du droit réel de jouissance spécial. Ce qui veut donc dire que la prescription trentenaire de l’article 1210 du Code Civil est mise de côté, et que sans précision il n’y a pas de durée limite à ce type de droit réel. C’est donc en ce sens qu’il est possible de parler de caractère perpétuel du droit réel de jouissance spécial. En l’espèce ici, il s’agit du d’un droit réel permettant l’accès aux copropriétaires à la piscine durant les vacances scolaires. Celui-ci qui a été consenti par les parties dans un règlement déroge donc à toute prescription trentenaire et revêt un caractère perpétuel. En effet, sa durée est donc indéterminée et n’a pas de limite. Donc la seule manière d’y déroger c’est de modifier ce règlement ou bien de le supprimer.

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