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Droit fiscal: le caractère confiscatoire de l'impôt

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Par   •  3 Mars 2013  •  Cours  •  9 858 Mots (40 Pages)  •  2 309 Vues

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Droit fiscal n° 20, 17 Mai 2012, 291

Le caractère confiscatoire de l'impôt

Etude par David Larbre

doctorant en droit public, chargé de travaux dirigés en droit fiscal à l'université Paris Ouest-Nanterre-La Défense

Généralités

Sommaire

La crise des dettes souveraines que traversent les États de l’Union européenne a relancé le débat sur la hausse des prélèvements obligatoires. Si le spectre de l’imposition confiscatoire Note 1ressurgit, l’appréhension de cette notion n'est pas chose aisée car, à notre connaissance, il n'en existe pas de définition valide. Une telle définition se heurte même à des difficultés techniques et juridiquesNote 2. Pourtant, la nécessité d'une protection contre le caractère confiscatoire de l'impôt se révèle avec acuité au regard des jurisprudences conjuguées de la Cour EDHNote 3 et du juge judiciaireNote 4, mais également de ses effets en matière politique, économique, et socialeNote 5.

1. - Le dictionnaire Cornu définit la confiscation comme étant « l'acquisition par l'État, aux fins d'aliénation à son profit, de tout ou partie du patrimoine d'une personne condamnée ou de l'expropriation intervenant à titre de peine complémentaire dans les cas spécifiés par la loi ». On pourrait donc supposer que l'impôt, en tant que « prélèvement pécuniaire, de caractère obligatoire, effectué en vertu de prérogatives de puissance publique, à titre définitif, sans contrepartie déterminée, en vue d'assurer le financement des charges publiques de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics administratifs »Note 6, est par nature confiscatoire dans la mesure où il grève une partie du revenu et donc du patrimoine d'un contribuable. Toutefois, du point de vue politique et juridique, il faut tenir compte du pouvoir de l'État de lever l'impôt, qui constitue l'un des attributs de sa souverainetéNote 7, et du consentement à l'impôt se traduisant par une compétence du législateur dans ce domaineNote 8. C'est donc le niveau du prélèvement, et non sa nature, qui permet de déterminer le caractère confiscatoire ou non de l'impôt.

Il y a là deux dimensions à prendre en considération. La première est stricte et renvoie à l'impôt pris isolément. Dans ce sens, il s'agira de déterminer si l'impôt est confiscatoire au regard de son taux et son assiette. C'est l'un des risques de l'impôt sur le patrimoine, en particulier celui sur la fortune (ISF), et ce, moins pour son taux marginal très faible, que les effets de ses règles d'assiette. En se basant sur le patrimoine du contribuable, même improductif de revenu, il peut conduire à le déposséder de son bien et/ou à la captation de l'ensemble de ses revenus pour le payer. La seconde est plus globale et s'attache davantage à déterminer le niveau de pression fiscale, c'est-à-dire le taux d'un ensemble d'impositions. Nous étudierons ces deux aspects mais nous pouvons dès à présent écrire que la seconde a les faveurs des économistes qui, se référant à la notion plus large de prélèvements obligatoiresNote 9, vont rechercher les effets du taux d'imposition sur le comportement des agents économiques et les recettes de l'État. Ainsi, Adam Smith considère que « tout impôt doit être conçu de manière à ce qu'il fasse sortir les mains du peuple le moins d'argent possible (...) [précisant que] l'impôt peut avoir un caractère désincitatif sur l'activité économique ; les peines trop lourdes sur des impôts mal fondés détruisent des activités utiles à la société et les sources du paiement de l'impôt »Note 10. Plus près de nous, l'économiste Arthur Laffer s'est risqué à déterminer un taux d'imposition optimal en le désignant d'un point sur une courbe qui porte son nom. Celle-ci montre que la progression des ressources fiscales est inversement proportionnelle à celle du taux d'impositionNote 11. Cette démonstration, qui peut relever du bon sens, n'emporte pas l'adhésion de tous les économistesNote 12. Certains d'entre eux ont pu soutenir que l'augmentation des impôts n'induisait pas nécessairement un exil fiscalNote 13 ou ne conduisait pas à une baisse du revenu et des recettes fiscalesNote 14. À l'inverse, il est possible d'observer qu'une baisse des impôts conduit inexorablement à une baisse des recettes fiscales lorsque l'activité économique est atoneNote 15.

Ces éléments permettent de voir qu'une protection juridique contre le caractère confiscatoire de l'impôt peut s'incarner de différentes manières : par suppression de l'impôt sur la fortuneNote 16, ou, plus directement, par l'adoption d'une règle garantissant le caractère non confiscatoire de l'impôt dans la Loi fondamentaleNote 17. Cette règle peut également être dégagée par le juge. Ainsi en Allemagne, la Cour constitutionnelle a reconnu le caractère non confiscatoire de l'impôtNote 18 en se fondant sur la propriété et l'égalitéNote 19. À cette occasion, elle a fixé le seuil de la confiscation à un taux d'imposition supérieur à 50 % des revenus. La protection peut ainsi se matérialiser à travers un mécanisme de plafonnement prenant en compte un ensemble d'impositions. Cette option a été choisie en France, en prévoyant une limitation à 70 %, portée ensuite à 85 %, des revenus pour le paiement de l'ISF et l'IR. Plus récemment, un « bouclier fiscal » a permis au contribuable de plafonner le montant de ses impositions directes – IR, ISF, taxes foncières, CSG et CRDS –, à 50 % de ses revenus. Ce bouclier fiscal a donné l'occasion au Conseil constitutionnel de reconnaître, dans une formule inédite, l'exigence du caractère non confiscatoire de l'impôt sans qu'il fixe un taux de référence. Cette reconnaissance signifie-t-elle pour autant l'affirmation d'un nouveau principe dans notre droit ? Et dans l'affirmative, peut-on en mesurer les implications ?

Pour ce faire, il conviendra tout d'abord d'analyser les fondements d'une protection contre le caractère confiscatoire de l'impôt (1) avant d'envisager les conditions permettant d'en apprécier la réelle portée (2).

Plan de l'étude

1. Les fondements d'une protection contre le caractère confiscatoire

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