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Cass com 25 juin 2013

Commentaire d'arrêt : Cass com 25 juin 2013. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  12 Octobre 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  2 420 Mots (10 Pages)  •  3 958 Vues

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TD Droit des biens

Séance n°3.

Commentaire de Cass. Com., 25 juin 2013, n° 12-17037

L’article 1128 ancien du code civil disposait qu’« il n'y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet des conventions ».

C’est sur la base de cet article que la Cour de cassation rend un arrêt le 25 juin 2013.

En l’espèce, une société (Bout-Chard) avait constitué un fichier de clientèle contenant des données personnelles et, sans le déclarer à la Commission nationale informatique et libertés (ci-après CNIL), la société a vendu ce fichier à une personne tierce. L’acheteur a fait assigner la société en nullité de la vente du fichier de clients informatisé.

Dans un arrêt du 17 janvier 2012, la Cour d’appel de Rennes a débouté l’acquéreur de sa demande en nullité, au motif que la loi du 6 janvier 1978 n’avait pas prévu la nullité de la vente d’un fichier non déclaré à la CNIL. Les juges du fond ont ainsi estimé que la nullité de la convention ne pouvait pas découler d'un manquement à la loi informatique et libertés qui ne prévoit pas une telle sanction

L’acquéreur se pourvoit en cassation.

La Cour de cassation est ainsi amenée à répondre à la question suivante :la cession d’un fichier (contenant des données personnelles non déclaré à la CNIL) constitue-t-elle une chose hors commerce étant ainsi frappée de nullité ?

La chambre commerciale dans un arrêt du 25 juin 2013 répond par l’affirmative.  La cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Rennes, au visa de l’article 1128 du code civil et de l’article 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, en estimant que peu importe que la loi n’ait pas prévu cette sanction de la nullité, puisque le fichier non déclaré n’étant pas dans le commerce, sa vente avait un objet illicite.

Il convient ainsi d’analyser le fait que la non déclaration des fichiers informatisés auprès de la CNIL entraine une extra commercialité du fichier, ce qui permet d’élargir la catégorie des choses hors du commerce (I), et ensuite il s’agit d’analyser si la sanction apportée à la commercialisation d’une chose hors commerce peut paraitre excessive (II).

  1. Un élargissement de la catégorie des choses hors du commerce

La décision rendue le 25 juin 2013 représente une décision inattendue de la part de la Haute cour (A) d’autant plus que celle-ci fait place à un nouveau bien dans la catégorie des choses hors commerce (B).  

  1. Une résurrection inattendue des nullités pour illicéité de l’objet

La Cour de cassation dans l’arrêt rendu le 23 juin 2013, fonde sa décision notamment sur les dispositions énoncées à l’article 1128 (ancien) du code civil (et sur la l’article 22 de la loi du 6 février 1978). En effet, celui-ci posait le principe selon lequel « seules les choses dans le commerce peuvent faire l’objet d’une convention ». Le mot commerce doit être pris dans un sens spécifique au droit : le commerce s’entend plutôt dans le sens d’une relation qui s’inscrit dans un contrat, une relation d’échange même si l’échange est gratuit.

Or, il y a ici une limitation du principe de commercialité qui veut que dès que l’on est propriétaire d’une chose, on soit en mesure de l’engager dans n’importe quelle relation juridique. La propriété c’est la plénitude des pouvoirs sur quelque chose et dans cette plénitude il y a l’aptitude à engager la chose dans un acte quelconque. Cependant, un certain nombre d’intérêts peuvent expliquer que la loi soustrait au commerce des biens. Il peut y avoir des raisons tirées de la dignité de la personne, des considérations politiques, ce qui relève du sacré etc.

Mais, comme les autres choses, le contenu du commerce juridique change avec le temps. La notion de sacré est en recul. Dans une époque aussi marchande, aspirant à la liberté des échanges, la « chose hors commerce » devient une notion relative (Ph. Malaurie et L. Aynès, Droit civil, les biens) ; mais la recherche de l’humanité en maintient l’existence et parfois même en accroit le domaine.

C’est dans cette perspective d’élargissement du domaine des choses hors du commerce que la cour de cassation rend sa décision. Le fichier de clientèle dont dispose la société celui-ci devait remplir certaines formalités préalables auprès de la CNIL, afin que son contenu soit licite. Ainsi, la licéité d’un fichier est une condition sine qua none sa vente ne peut pas être réalisée. Dès que son contenu est déclaré par la CNIL comme étant licite, le fichier pourra intégrer le commerce juridique. En l’espèce, il y a une exclusion de la chose non déclarée du commerce juridique.

Or, cette décision semble innovatrice puisque la tendance a davantage été, ces dernières décennies, au « refoulement de la catégorie des choses qui sont hors du commerce afin d'affranchir le marché et la science des entraves que celles-ci leur apportent » (F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Les obligations : Dalloz, 11e éd., 2013, n° 274) : les conventions sur les produits du corps humain si elles ont une finalité thérapeutique ou scientifique, sont en ce sens possibles.

En effet, la Cour de cassation fonde sa décision sur la nécessité de soumettre ce fichier à la déclaration obligatoire auprès de la CNIL dans le but d’une particulière surveillance de la part de l'Administration, ce qui implique une volonté de protection des données personnelles, données ayant un caractère sensible.

Si la cour avait décidé dans un arrêt de 2006, au sujet de cosmétiques, que les produits périmés étaient hors commerce (Cass. com., 16 mai 2006), c’est justement pour étendre la protection, la sécurité des particuliers.

Or, l’article 22 de la loi du 6 janvier 1978 dispose que « les traitements automatisés de données à caractère personnel font l’objet d’une déclaration auprès de la CNIL », ce qui renforce la décision prise par la Haute cour.

La Cour d’appel de Rennes reconnait cependant que cette déclaration aurait dû avoir lieu, au sens de l’article 22 de la loi, mais que cette loi ne prévoit pas la nullité du contrat de vente en cas de non déclaration.

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